Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Sørensen (Henrik)

Peintre norvégien (Fryksände, Värmland, 1882  – Oslo 1962).

Il fréquenta l'atelier Zahrtmann à Copenhague (1904-05) et celui de Matisse à Paris de 1908 à 1910. Certaines œuvres de ses débuts sont marquées par le Fauvisme mais, peu après, il traduisit l'ambiance mystique de la forêt, de l'être humain solitaire en étroit contact avec la nature, thèmes qu'il reprit souvent (Svartbekken, 1909, Bergen, Rasmus Meyers Samlinger). Une suite de compositions, inspirées par la Première Guerre mondiale et par l'entre-deux-guerres, est empreinte de l'angoissante atmosphère de l'époque : trilogie de la Passion (Gethsemani, Golgotha, Pietà, 1921-1925, Oslo, Ng ; Inferno, 1924-25, id.), et l'on retrouve les mêmes caractères dans le portrait de l'écrivain suédois Pär Lagerkvist (1920-21). Après huit années de séjour à Paris, Sørensen revient en Norvège en 1927 ; la province du Telemark, riche en forêts et montagnes, lui inspire les motifs de quelques-uns de ses plus remarquables paysages, ne comportant souvent qu'un personnage solitaire : Paysage du Telemark (1925), le Pan norvégien (1933), Tone Veli, traités en de nombreuses variantes. Simultanément, Sørensen effectue des travaux décoratifs tels que le grand tableau d'autel de la cathédrale de Linköping, en Suède (1934), l'imposante peinture murale du palais de la Société des Nations, à Genève (1939), et le mur de fond (300 m²) du nouvel hôtel de ville d'Oslo (1938-1950). Il réalisa, par ailleurs, des décorations d'églises, de moindre importance. Il était également réputé comme portraitiste et illustrateur. Un musée lui est consacré à Holmsbu, près de Drammen (1972). Une exposition rétrospective a eu lieu à Copenhague en 1986-87 (S. M. f. K.).

Sorgh (Hendrick Maertensz Rokes, dit)
ou Hendrick Maertensz Rokes, dit Sorg
ou Hendrick Maertensz Rokes, dit Sorch

Peintre néerlandais (Rotterdam 1610/11  – id. 1670).

Il aurait été l'élève de David Téniers et de Willem Buytewech. En 1630-1632, il est à Amsterdam, mais il vit principalement à Rotterdam, où il est cité en 1651. Il commença par peindre des scènes d'intérieur, proches de Brouwer et de Saftleven : Intérieur d'un cabaret, Scène d'estaminet (1646, Louvre), Intérieur rustique (musées de Dunkerque et de Montpellier), Intérieur de cuisine (musées de Caen et de Mulhouse) ; mais il est surtout connu pour ses scènes de marchés, au coloris agréable et alerte, influencées par Adriaen Van Ostade et Jan Steen : la Halle aux poissons (Rijksmuseum), le Marché aux poissons (1653, musées de Kassel et de Marseille), le Marché de Rotterdam (Rotterdam, B. V. B.).

Soria (Martín de)

Peintre espagnol (actif en Aragon entre 1449 et 1487).

Il appartient au vaste cercle de Jaime Huguet, mais il donne à ses personnages des physionomies plus caractérisées et empreintes d'une certaine mélancolie que le créateur de l'école. Son œuvre la plus connue est le retable de Pallaruelo de Monegros (signé et daté 1485) dont il reste la Circoncision et la prédelle, inspirée de gravures de Schongauer au musée de Huesca. Soria est aussi l'auteur des retables de Saint Christophe (Chicago, Art Inst.), de Saint Michel et saint Antoine abbé (Boston, Museum of Fine Arts) et de Saint Pierre (id.) ; celui de Saint Blas (v. 1487, église de Luesia,dans la prov. de Saragosse) est probablement sa dernière œuvre.

Sorolla y Bastida (Joaquín)

Peintre espagnol (Valence 1863  – Cercedilla, prov. de Madrid, 1923).

Issu d'une famille d'artisans valenciens, orphelin dès l'enfance, élevé par un oncle forgeron, qui l'employait le jour et lui laissait les soirées pour suivre des cours, notamment à l'Académie des Beaux-Arts, il révéla ses dons très jeune. Dès 1884, il obtenait une médaille à l'Exposition nationale de Madrid avec son Dos de Mayo a Valencia (Villanneva y Geetŕıs musée Balaguer), tableau d'histoire dans le goût de l'époque, mais peint en plein air, et, l'année suivante, une œuvre de même genre (Soulèvement de Valence contre Napoléon) lui valait un séjour à Rome, qui n'eut aucune influence sur son art. En revanche, Paris allait lui révéler en 1885 à la fois le réalisme de Bastien Lepage et la technique des impressionnistes, sans qu'il eût été en rapports personnels avec eux. De retour en Espagne, installé à Madrid, il éclaircit sa palette ; à Valence, où il se rend fréquemment, il est attiré à la fois par la lumière du paysage et par la vie des pêcheurs ; il se met à peindre les paysages ensoleillés du Levant espagnol. Entre 1890 et 1900, il se partage entre Madrid et Valence : il atteint la plénitude de son art, se dégageant graduellement d'un certain naturalisme anecdotique et humanitaire (Et ils disent que le poisson est cher, 1895, Caśon) et adoptant pour des sujets " intemporels " — plages méditerranéennes, jeux d'enfants nus, pêcheurs valenciens (Retour de pêche, 1892 ; Bœufs tirant une barque, Paris, musée d'Orsay) — une manière de plus en plus lumineuse et abrégée. Exposant fréquemment en Espagne, en France, en Allemagne et aux États-Unis, il collectionne les médailles et triomphe à l'Exposition universelle de Paris en 1900 : Monet parle avec éloges de son art joyeux et coloré. Dans les années 1910, son œuvre devient plus lumineuse, sa manière plus brusque (Enfants sur la plage, 1910, Casón, Madrid ; Baie de Valence le matin, 1908, Hispanic Society of America à New York.

   Ce succès se confirme avec une exposition de ses œuvres aux Craffton Galleries de Londres (1908) puis en 1909 à la toute nouvelle Hispanic Society de New York. Le fondateur, Archer Huntington lui commande en 1911 le décor d'une salle spécialement conçue à cet effet sur le thème des Costumes et Fêtes des Provinces d'Espagne, l'un de ses centres d'intérêts. 14 grandes toiles, lumineuses, joyeuses, sont le brillant point d'orgue du " costumbrisme " espagnol (1911-1919) [esquisses au musée Sorolla à Madrid]. Il réalisa également, pour la bibliothèque d'Huntington, fortement influencé par la génération de 98, 47 portraits d'intellectuels espagnols (Ortega y Gasset, Pardo Bazén...). Son art du portrait peut d'ailleurs traduire un Sorolla plus intime, portraitiste parfois sobre et pénétrant de ses familiers (D'Antonio Garcia, son beau-père ; le Docteur Gonzalez, musée de Valence), de ses filles (Maria convalescente, Valencienne à cheval, Valence, musée des Beaux-Arts), des écrivains, artistes en vogue au début du XXe s. (le peintre Aureliano de Beruete, les actrices Maria Guerrero, Prado ; Lucrecia Araña, musée de Valence). Certains tableaux de ses dernières années, où Ségovie et Burgos voisinent avec Grenade et Ibiza, surprennent par des architectures simplifiées, une matière épaisse, des harmonies éclatantes et larges. Le peintre légua à l'État espagnol sa maison et son atelier de Madrid, devenus aujourd'hui le musée Sorolla. Le Prado, le musée de Valence, de nombreux musées provinciaux et, surtout, l'Hispanic Society of America de New York abritent l'essentiel de son œuvre.