Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
M

mannequin

Petite poupée de bois, de cire ou de carton dont les peintres se servent comme modèle pour étudier les mouvements. Articulé, le mannequin peut prendre toutes les attitudes d'un être humain. Habillés, ils peuvent servir à des études de draperies. Il existe aussi des mannequins d'animaux (surtout de chevaux).

Mansouroff (Paul)

Peintre russe (Saint-Pétersbourg 1896  – Nice 1983).

Lorsqu'en 1915 il sort de l'École de peinture et de dessin de la Société pour le progrès des arts à Petrograd, Mansouroff effectue aussitôt son service militaire au ministère de l'Aviation en qualité de dessinateur d'hélices et de carlingues d'avions. C'est en pleine révolution de février qu'il peint ses premiers tableaux abstraits (Formule picturale, 1918), sous l'influence du Suprématisme et du Constructivisme, et, dès après la révolution d'Octobre, il travaille avec Lunatcharsky à la section de vulgarisation de l'art du Commissariat à l'avancement du peuple. Il se lie bientôt avec l'avant-garde artistique révolutionnaire, notamment avec Malevitch et Tatlin, qui l'encouragent à exposer ses œuvres abstraites au palais d'Hiver de Saint-Pétersbourg (sa première exposition), en 1918. C'est encore avec eux qu'il fonde l'Institut de culture artistique du groupe Inhuk en 1921, dont il dirige la section expérimentale jusqu'en 1928. Il se dégage cependant très vite de l'influence de ses amis et oriente ses recherches vers la fonction de la ligne et des plans juxtaposés (Lignes et sphères, 1922 ; Forme picturale, 1923). Après deux grandes expositions à Moscou en 1923 et 1927 (5e et 10e anniversaires de la révolution d'Octobre), il part pour Rome, où il expose ses œuvres au théâtre Bragaglia, avant de s'installer en 1929 à Paris, où il vit assez solitaire. Cherchant le " rapport exact entre l'instinct et le calcul ", il continue à peindre des tableaux et des gouaches selon les mêmes principes que ceux qu'il enseignait à l'Inhuk, et reste fidèle au compartimentage coloré du panneau et à la grande surface blanc foncé. Plusieurs rétrospectives de son œuvre ont été organisées, notamment par la gal. Lorenzelli à Milan (1963), la gal. Daniel-Gervis à Paris (1968) et le M. N. A. M. de Paris (1972-73).

Mansueti (Giovanni di Niccolò)

Peintre italien (Venise, documenté de 1485 à 1526/27).

Les premiers documents qui le concernent datent de 1485. Élève de Gentile Bellini, dont il prolonge le style narratif, il utilise, dans ses grandes toiles, un langage analytique et chargé : deux Miracles de la vraie croix, 1494 et vers 1506, peints pour la Scuola di S. Giovanni Evangelista (Venise, Accademia), 3 Scènes de la vie de saint Marc exécutées pour la Scuola di S. Marco (Venise, Accademia, et Milan, Brera) et Saint Marc expulsé de la synagogue (1499, Vaduz, coll. de Liechtenstein).

   Dans les œuvres plus tardives, Mansueti reste plutôt attaché au langage de sa génération (G. Bellini et Cima) qu'à celui de Titien.

Mantegna (Andrea)

Peintre italien (Isola di Carturo, près de Vicence, 1431– Mantoue 1506).

La critique s'est accordée depuis le XVIe s. pour le définir par son " grand dessin ", sa " vérité naturaliste ", son " habileté technique ", ses " recherches de coloris " et surtout par ses étonnants " raccourcis ". Mantegna s'inscrit par là dans cette famille d'artistes qui, à la Renaissance, de façon très savante et grâce à un répertoire de formes archéologiques, tenta d'exprimer la nature en termes de perspective, d'articulation nouvelle de l'espace, de volumes nettement définis.

Padoue

Mantegna est cité pour la première fois dans les registres padouans en 1441 comme apprenti et fils adoptif du peintre Francesco Squarcione, avec qui il séjourna à Venise en 1447, mais dont il secoua vite la tutelle excessive. À dix-sept ans, il semble exécuter seul sa première œuvre signée et datée (Retable de S. Sofia, Padoue, 1448, détruit au XVIIe s.). Un séjour à Ferrare est attesté en 1449. La décoration de la chapelle Ovetari dans l'église des Eremitani consacre la renommée du peintre à Padoue, où il travaille de 1449 à 1456, acquérant une importance et une liberté toujours accrues du fait de la mort ou de la disparition des autres peintres, dont Giovanni d'Alemagna, Antonio Vivarini et Pizzolo, son collaborateur direct. Mantegna s'affirme dans les Scènes de la vie de saint Jacques et de saint Christophe, avec un style dur, ferme, impressionnant par la force du dessin et l'invention des perspectives. Ce cycle a malheureusement été presque entièrement détruit au cours de la Seconde Guerre mondiale : seuls subsistent à peu près intacts l'Assomption, le Martyre et le Transport du corps de saint Christophe. En 1453, il reçoit la commande du Polyptyque de saint Luc pour l'église S. Giustina de Padoue (Brera), qui se présente encore dans la tradition du Gothique tardif appris par Antonio Vivarini, et, en 1454, il signe une Sainte Euphémie (Naples, Capodimonte) qui préfigure la " Pala " de S. Zeno (Vérone), chef-d'œuvre de l'artiste, commandée dès 1456, mais terminée après 1460. Mantegna exécuta seul cet ensemble, composé de six panneaux disposés dans un imposant encadrement sculpté figurant un édicule, que l'artiste dessina lui-même et qui s'inspire de l'ouvrage de Donatello au Santo de Padoue. L'œuvre fut démembrée en 1797 et transportée en France avec les saisies napoléoniennes ; la Vierge à l'Enfant, qu'entourent deux groupes de Saints, fut restituée en 1815 et est conservée sur place, des copies remplaçant les trois tableaux de la prédelle : la Crucifixion (Louvre), l'Agonie au jardin des Oliviers et la Résurrection (musée de Tours). L'ensemble possédait une remarquable unité, les éléments architecturaux et les motifs sculptés formant un tout homogène. Mantegna avait fait ouvrir spécialement une fenêtre sur le côté droit de l'édifice, de façon à identifier cette source réelle de lumière avec l'éclairage supposé de la peinture, placée sur l'autel principal.

Mantoue

En 1453, par son mariage avec Nicolosia Bellini, fille de Jacopo et sœur de Gentile et de Giovanni, l'artiste s'était allié à la plus puissante famille de peintres vénitiens. Et lorsque, en 1456, Ludovic Gonzague lui écrit pour la première fois, l'appelant à son service, c'est donc à un artiste bien en place et en pleine possession de ses moyens qu'il s'adresse. L'installation à Mantoue en 1459 marque une étape essentielle pour Mantegna, qui y restera peintre officiel jusqu'à sa mort. Ses premiers travaux mantouans sont mal connus. On date souvent de cette époque le Saint Sébastien de Vienne (K. M.), signé en grec, dominé par des préoccupations d'espace et de perspective dans la représentation du sol en damier, qui font écho à Piero della Francesca ; Roberto Longhi, soulignant la calligraphie raffinée du Saint Sébastien, le plaçait plus tard, v. 1470 ; des liens avec Filarete ont été suggérés. Trois gravures : Déposition de la croix, Mise au tombeau, Descente aux limbes, sont peut-être des témoignages de la décoration de la chapelle du château aujourd'hui, détruite. Certains ont vu dans le " triptyque " des Offices (Ascension, Adoration des mages, Circoncision), qui ne serait qu'un assemblage factice, les vestiges d'une œuvre très admirée par Vasari dans cette chapelle lorsqu'il séjourna à Mantoue en 1565 et qui correspondrait à une œuvre citée en 1464.

   En 1463 et 1464, Mantegna dirigeait les chantiers de Cavriana et de Goito, résidences ducales, et il aurait fait également un cycle homérique dans le palais de Revire. Il entretenait alors des rapports étroits avec les humanistes, notamment Felice Feliciano ; c'est dans cette période que se situe le curieux voyage archéologique qu'il fit sur le lac de Garde, dont le but était la recherche d'inscriptions et de vestiges antiques, très révélateur des intérêts constants de l'artiste.

La " Chambre des époux "

Deux courts séjours en Toscane sont attestés en 1466 et 1467 ; le Triptyque des Offices pourrait avoir été fait pour un membre de la famille des Médicis à ce moment. L'œuvre capitale de cette époque confuse est la Chambre des époux (Camera degli sposi) au château de Mantoue, dont le thème semble être une véritable glorification de la famille régnante. La décoration de la pièce, à peu près cubique, a été conçue à la façon d'un pavillon ouvert sur la nature, avec, au centre, un oculus en trompe-l'œil et, sur les murs latéraux, des scènes de la vie de cour, encadrées par de lourdes tentures. La chronologie de cette œuvre absolument originale reste floue, les travaux ayant duré, selon les historiens, de quatre à dix ans, mais étant, en tout cas, achevés en 1474. Mantegna inaugurait là tout un système décoratif nouveau, sans rien de commun avec les antécédents toscans, et annonçait un type de perspective illusionniste qui devait impressionner Bramante et Corrège et dont devait tirer parti Vinci. Les peintures, qui multiplient les portraits, célèbrent la vie de cour, comme en d'autres cycles contemporains de l'Italie du Nord (Ferrare, palais Schifanoia), mais en utilisant un répertoire cohérent et complet de pilastres et de médaillons à l'antique et en créant un décor illusionniste étendu à l'ensemble de la salle, dominée par l'étonnant oculus en trompe-l'œil où sont figurés des personnages se penchant à une balustrade, motif qui devait connaître par la suite un immense succès.