Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
G

Gilarte (Mateo)

Peintre espagnol (Orihuela v.  1625  – Murcie 1675).

Il débute à Valence, puis se rend à Murcie en 1651, où il devient le peintre le plus en vue de son temps. Son style, d'abord un peu archaïque et sombre, s'inspire du naturalisme ténébriste (les Disciples d'Emmaüs du musée de Tolède reflètent l'influence d'Orrente), puis graduellement s'éclaire (Vie de la Vierge, peinte en 1651 pour S. Esteban de Murcie, dispersée entre divers musées secondaires, Albacete, Gérone, Huesca ; seule la Nativité de la Vierge est au Prado). Gilarte imite parfois les gravures flamandes d'après Rubens (Adoration des mages, au musée de Gérone). Mais ses meilleures toiles évoquent la peinture de Zurbarán, par leur réalisme rustique et leur intimité paisible, comme par leurs draperies assez sculpturales. Dans le dernier grand ensemble de Gilarte, celui de la chapelle du Rosaire à S. Domingo de Murcie (1663-1666), les compositions (Jacob et l'ange, Saint Dominique et la Vierge) gagnent en souplesse et en mouvement, tandis que le paysage prend une importance nouvelle.

Gilbert et George

Artistes britanniques (Dolomites 1943 et Devon 1942).

Depuis 1968, date à laquelle ils exposent pour la première fois ensemble, Gilbert et George poursuivent une pratique commune, polyvalente mais homogène, désignée sous le terme générique de " sculpture " (dessin, peinture, " performances ", travaux photographiques, films et publications). Désireux de se faire connaître rapidement, mais dépourvus de moyens, Gilbert et George décident d'exposer leurs propres corps comme des objets. Ils créent ainsi en 1969 les premières " Living Sculptures " (" sculptures vivantes "), qui très vite vont les faire connaître sur la scène internationale. Toujours vêtus du même costume étriqué et ordinaire, ils se manifestent dans des endroits très divers, dans des galeries et des musées, posant pendant plusieurs heures, le visage recouvert souvent de peinture dorée ou rouge (" Red Sculpture ", 1975 à 1977).

   Prenant comme devise " l'art pour tous ", Gilbert et George vont manier les paradoxes, s'identifier totalement à leur art, se représentant constamment dans leur œuvre, se voulant le reflet du monde qui les entoure et jouant sur l'humour et le conventionnel. Ils réalisent ainsi, parallèlement aux " Living Sculptures ", de grands dessins au fusain et des peintures, naïfs et académiques, clin d'œil à la tradition du paysage anglais (With us in Nature, 1971). À partir de 1971, la photographie va prendre de plus en plus d'importance dans leur travail. De petites compositions faites de séries de photos noir et blanc réparties de manière éclatée sur les murs, on passe à des compositions monumentales où les photographies sont disposées les unes à côté des autres, formant des rectangles ou des carrés, l'encadrement noir de chacune d'elles fonctionnant comme le cloisonnement d'un vitrail ; et d'un univers intimiste et euphorique à une atmosphère de plus en plus inquiétante et oppressante, à laquelle l'introduction de la couleur monochrome à partir de 1974 (le jaune, le rouge et le vert) va ajouter une dimension symbolique. Dans la belle et monumentale série de 1977 (Prick ass, Communism, Bummed), Gilbert et George, simples figures en retrait, assistent impuissants à la dégradation du climat social en Grande-Bretagne. Dans les œuvres suivantes, les couleurs vives se multiplient, le dérisoire et l'absurde supplantent le tragique et la gravité, tandis que les jeunes garçons, allusions de plus en plus obsessionnelles à une sexualité homosexuelle, détrônent les chômeurs et les immigrés (1990). Renouant avec la distanciation ironique de leurs débuts, Gilbert et George continuent d'être fidèles au but qu'ils se sont fixés, " frapper le spectateur avant qu'il ait le temps de réfléchir " (Praying Gardens, 1982, Paris, M. N. A. M.).

   Le M. N. A. M. leur a consacré une importante exposition en 1981 et le C. A. P. C. de Bordeaux a présenté l'ensemble de leurs peintures et dessins en 1986.

gilde
ou guilde
ou ghilde

Association d'artisans, de marchands ou de personnes exerçant le même métier. Le terme est souvent pris dans le même sens que celui de corporation, mais les gildes, associations de patriciens, sont essentiellement flamandes du XIIIe au XVe s.

   Dès le XIIIe s. et durant le XIVe, les gildes furent en rivalité avec les corporations (véritables associations corporatives). Après un compromis, la gilde devint une association de maîtres, ou patrons. Les maîtres peintres, ou francs maîtres, étaient les patrons des ateliers ; ils avaient acquis la qualité de bourgeois en payant un droit par lequel ils étaient affranchis. Ils pouvaient, à la différence des compagnons et des apprentis qu'ils employaient, exercer leur métier librement où ils voulaient.

   Presque toutes les grandes cités flamandes possédaient une gilde de peintres : Gand, Tournai, Bruges, Bruxelles. La plupart des corporations de peintres flamands avaient saint Luc pour patron. C'est pourquoi il existe de nombreux tableaux représentant ce saint peignant la Vierge. Ce genre de peintures ornait la chapelle ou le local de la corporation des peintres.

Gille (Christian Friedrich)

Peintre et lithographe allemand (Ballenstedt, Harz, 1805  – Wahnsdorf, près de Dresde, 1899).

Il suivit à partir de 1825 à l'Académie de Dresde des cours de gravure dans l'atelier de Frenzel et reçut de 1827 à 1830 l'enseignement du paysagiste Dahl, dont l'influence apparaît nettement dans le Paysage au clair de lune (1831, Dresde, Gg). Gille fut le seul élève de Dahl à perpétuer la tradition du paysage réaliste et il demeura isolé lorsque Bendemann, Richter et Schnorr, nommés à l'Académie, assurèrent le triomphe des nazaréens. Pour subvenir à son existence, il exécuta tout d'abord des lithographies (vues, scènes de genre le Don Quichotte d'après A. Schrödter, 1835, portraits) et ne s'orienta définitivement vers la peinture qu'à partir de 1850. Le réalisme de ses paysages des environs de Dresde est plus prononcé que celui de Dahl. Gille fut un des premiers à rendre les aspects fortuits de la nature, dont il restitue la véritable atmosphère. Les gros plans habituels avec un groupe d'arbres, le bord d'une rivière ou des jardins de banlieue (Au bord de la Weisseritz, Cyprès, Dresde, Gg), firent place au cours des années 1840 à des panoramas observés d'un point élevé permettant de dégager l'horizon de vastes étendues (la Vallée de l'Elbe, id.). L'essentiel de son art se trouve dans ses études à l'huile qui semblent évoquer les premiers tableaux impressionnistes. Gille fut redécouvert en 1906, à Berlin, lors de l'exposition centennale de l'Art allemand. Ses œuvres, qui constituaient la collection Lahmann, furent réparties en 1937 entre les musées de Dresde et de Brême.