Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
G

Giovanni del Biondo

Peintre italien (Florence, documenté à partir de 1356  – id.  1398/99).

Il fut peut-être l'élève de Taddeo Gaddi et certainement celui de Nardo di Cione, collaborant avec ce dernier pour les fresques de la chapelle Strozzi à S. Maria Novella à Florence (v. 1356). Il eut par la suite une activité considérable, aidé à son tour par des élèves pour l'exécution des nombreux retables dont il reçut commande. Tout en restant dans les limites de l'académisme orcagnesque, son style, souvent rustique, ne manque pas de fraîcheur ni d'aisance décorative, surtout durant la première période de son activité. En témoignent, par exemple, les fresques de la Vie de saint François, de saint Pierre et saint Paul à l'église S. Francesco de Castelfiorentino (v. 1360), le Retable de saint Jean-Baptiste (Florence, Pitti, donation Contini-Bonacossi), le retable de la chapelle Tosinghi à Santa Croce (1372), celui de la chapelle Rinuccini (1379) dans la même église ou le Martyre de saint Sébastien de l'Opera del Duomo. Parfois, l'artiste fait preuve d'une vraie personnalité par la gaieté de ses polychromies, la souplesse de ses rythmes (Saint Jérôme, musée d'Altenburg) et la vivacité ingénue de son goût narratif (Prédelle de saint Benoît, partagée entre la coll. Acton de Florence, le musée de Toronto et la coll. Colonna de Rome).

Giovanni del Ponte (Giovanni di Marco, dit)

Peintre italien (Florence 1385  – id. 1437).

Giovanni di Marco fut surnommé " del Ponte " parce qu'il avait un atelier près de S. Stefano a Ponte, à Florence. Formé dans l'atmosphère de la tradition orcagnesque et peut-être élève de Spinello Aretino, il assimila de façon superficielle les nouveautés du début du siècle et réalisa ses œuvres les plus aiguës sous l'influence du courant gothique international de Lorenzo Monaco, du Maître du Bambino Vispo (Starnina) et de Ghiberti, puis d'Arcangelo di Cola da Camerino. Son œuvre, assez abondant, comprend des retables, des fresques et des " cassoni ". Parmi les retables, on peut citer, dans l'ordre chronologique : le triptyque du Couronnement de la Vierge (Chantilly, musée Condé), la Madone avec saint Georges et saint Michel (musée de Columbia), le Mariage mystique de sainte Catherine (1421, musée de Budapest), le Polyptyque de saint Jean l'Évangéliste (Londres, N.G.), trois triptyques ayant l'Annonciation pour centre (1434, Rosano, église S. Maria ; Poppiena, Badia ; 1435, Vatican). Giovanni peignit des " cassoni " à sujets profanes (les Arts libéraux, Prado ; Dante et Pétrarque, Cambridge, Mass., Fogg Art Museum ; le Jardin d'Amour, Paris, musée Jacquemart-André). L'église S. Trinita de Florence conserve plusieurs de ses fresques. Les plus significatives par la nervosité de leur graphisme sont celles de la chapelle Scali (1434-35, Martyre de saint Barthélemy).

Giovanni di Consalvo
ou Maître du Chiostro degli Aranci

Peintre portugais (actif à Florence entre 1436 et 1439).

Le cycle mystérieux et admirable des 10 Scènes de la vie de saint Benoît dans le cloître supérieur de l'église de la Badia à Florence a été tour à tour attribué à l'entourage de Fra Angelico, de Masaccio, de Domenico Veneziano (divers noms furent même prononcés, parmi lesquels ceux d'Andrea di Giusto, de Domenico di Michelino et du Maître de la Nativité de Castello), ou considéré comme un élément de transition entre la première et la seconde moitié du XVe s. En fait, un document d'archives fait mention d'un paiement effectué entre 1436 et 1439 à un artiste portugais, Giovanni di Consalvo, pour le cloître de la Badia. La présence de ce maître, qui allie de façon très originale le monde lumineux de Fra Angelico à la netteté flamande de Van Eyck, est attestée à Lisbonne en 1428. On sait également qu'en 1435 un certain Giovanni da Portagallo comptait parmi les meilleurs disciples de Fra Angelico, ce qui apporte un argument supplémentaire à l'identification. Sous les fresques de la Badia, qui ont été restaurées et détachées, sont apparues des sinopie d'un intérêt exceptionnel.

Giovanni di Francesco
ou Maître du Triptyque Carrand

Peintre italien (actif à Florence v. le milieu du XVe s.).

La personnalité de ce maître fut autrefois reconstituée autour du triptyque (la Vierge et l'Enfant entre Saints François et Jean-Baptiste et Saints Nicolas et Pierre) de la collection Carrand (Florence, Bargello), dont il porta provisoirement le nom. On put ensuite identifier ce " Maître du Triptyque Carrand " avec un certain Giovanni di Francesco, qui fut immatriculé en 1442 à l'Arte dei medici e degli speziali, et qui, en 1458-59, fut payé pour l'exécution d'une fresque avec Dieu le Père et des anges, peinte en lunette au-dessus de l'entrée de l'hôpital des Innocents à Florence, fresque qui, par son style, se lie étroitement aux œuvres groupées sous le nom du Maître du Triptyque Carrand. Cet excellent artiste est doté d'une solide culture, dans laquelle se mêlent les courants dominants de la peinture florentine vers le milieu du XVe s., qui vont de la ligne de Castagno et des formes de Lippi aux recherches de couleur et de lumière de Domenico Veneziano. Il aboutit parfois à des résultats voisins de ceux de Baldovinetti. On doit encore à Giovanni di Francesco un triptyque, aujourd'hui dispersé, avec la Madone (Pitti, donation Contini-Bonacossi), Saint Antoine abbé (Milan, Ambrosienne) et Saint Jacques (musée de Lyon), une prédelle à la Casa Buonarroti (autref. à S. Croce à Florence) avec des Scènes de la vie de saint Nicolas, une Adoration des mages au Louvre, et un Crucifix venant de S. Andrea a Brozzi (Florence, grand séminaire).

Giovanni di Paolo

Peintre italien (Sienne v. 1399  – id. 1482).

Il se forma probablement dans l'entourage de Taddeo di Bartolo et de Gregorio di Cecco. On sait qu'il livra ses premières commandes, auj. perdues, en 1420 et 1423. Le Polyptyque Pecci (1426), dont subsistent le panneau central (la Vierge et des anges, Castelnuovo Berardenga, Prepositura), 2 volets (Saint Dominique et Saint Jean-Baptiste, Sienne, P. N.) et les panneaux de la prédelle (Résurrection de Lazare ; Portement de croix ; Descente de croix ; Déposition, Baltimore, W. A. G. ; la Crucifixion, musée d'Altenburg), est l'œuvre la plus ancienne qui nous soit parvenue de lui. Le style nerveux et incisif du Christ souffrant et triomphant (Sienne, P. N.) exprime avec une rare intensité le sentiment pathétique exalté de l'artiste. Âme encore médiévale, celui-ci se refusera à adhérer aux principes expressifs de la Renaissance, poursuivant un idéal de haute spiritualité douloureuse, d'irréalité effrénée pénétrée d'un souffle religieux archaïque. Si l'influence de Gentile da Fabriano se reflète dans certains détails décoratifs, elle n'attaque pas cette cohérence dans le panneau subsistant du Polyptyque Branchini (la Vierge à l'Enfant, 1427, Pasadena, N. Simon Foundation) ; et les nouveautés apportées entre-temps à Sienne, en particulier par Sassetta, n'ont sur les œuvres ultérieures de Giovanni que des conséquences purement formelles. Ces observations s'appliquent encore aux panneaux conservés de la prédelle du Polyptyque Fondi, de 1436 (Crucifixion ; Présentation au Temple ; Fuite en Égypte, Sienne, P. N. ; Adoration des mages, Otterlo, Kröller-Müller) : les suggestions de Sassetta se transforment en visions d'un irréalisme tout gothique correspondant à la reprise des conceptions paysagistes d'Ambrogio Lorenzetti, comme le montre bien l'étonnante Fuite en Égypte (Sienne, P. N.). Les panneaux dispersés du Polyptyque des Pizzicaiuoli (1447-1449), la Présentation au Temple (Sienne, P. N.) et les Scènes de la vie de sainte Catherine de Sienne (Madrid, fondation, Thyssen – Bornemisza ; Metropolitan Museum ; Minneapolis, Inst. of Arts ; Detroit, Inst. of Arts) confirment la volonté tenace de l'artiste de traduire en langage ancien les idées modernes d'un Vecchietta ou d'un Pietro di Giovanni d'Ambrogio, par exemple.

   Le maître atteint une expression dramatique incomparable dans les différentes versions de la Crucifixion (1440, Sienne, P. N. ; 1440, San Pietro Ovile ; Dublin, N. G.) ou dans les prodigieuses et fameuses Scènes de la vie de saint Jean-Baptiste (Chicago, Art Inst. ; Metropolitan Museum ; musée de Münster ; Pasadena, Norton Simon Foundation ; Avignon, Petit Palais), où la ferveur de sa vision ascétique s'exalte au point de retrouver le " stylisme " gothique de Lorenzo Monaco dans ce qu'il a de plus visionnaire.

   Le catalogue de l'artiste comporte des enluminures (Divine Comédie, Louvres, British Museum ; Antiphonaire Sienne, Biblioteca degli Intronati) et encore un très grand nombre de panneaux (beaucoup provenant de polyptyques démembrés). Parmi les plus remarquables, on peut citer, dans l'ordre chronologique, le Jardin des Oliviers et la Déposition (Vatican), qui datent sans doute d'avant 1440, la Madone d'humilité (2 exemplaires : Sienne, P. N., et Boston, M. F. A.), le Paradis et l'Expulsion du paradis (Metropolitan Museum), le Polyptyque de 1445 des Offices, la prédelle de l'Enfance du Christ (l'Annonciation, Washington, N. G. ; la Nativité, Vatican ; le Calvaire, Berlin ; l'Adoration des mages, musée de Cleveland ; la Présentation au Temple, Metropolitan Museum), dont plusieurs éléments sont inspirés de Gentile da Fabriano ; le Retable de saint Nicolas (1453, Sienne, P. N.), le Retable du dôme de Pienza (1463) ; la prédelle du Jugement dernier (Sienne, P. N.) ; le Retable de San Galgano (id.) ; Saint Jérôme (Sienne, Opera del Duomo). Les toutes dernières œuvres, tel le Polyptyque de San Silvestro (1475) à Staggia (Sienne, P. N.), révèlent un affaiblissement incontestable.