Kalf (Willem)
Peintre néerlandais (Rotterdam 1619 –Amsterdam 1693).
Élève de Pot au dire d'Houbraken, mais influencé à ses débuts par Ryjckhals et aussi par Cornelis Saftleven, Kalf est le maître de l'école amsterdamoise de nature morte. Il peignit tout d'abord des scènes rustiques dans le goût mis à la mode par Adriaen Van Ostade : Intérieurs de chaumière, Cours de ferme (Louvre, musée de Strasbourg, Berlin-Dahlem, Ermitage). La plupart de ces tableaux furent peints à Paris, où il se trouvait entre 1642 et 1646, fréquentant l'importante colonie flamande de Saint-Germain-des-Prés et se rapprochant de Bourdon, peintre de " bambochades ". Ce type d'œuvres (dans le goût de Brouwer, des Van Ostade, de Teniers et de C. Saftleven) est d'autant plus intéressant à signaler que celles-ci ont laissé d'évidents souvenirs chez Watteau (l'Écureuse de cuivres, musée de Strasbourg), Boucher et Chardin.
Mais, dès 1643, Kalf peint aussi de somptueuses Natures mortes avec des pièces d'orfèvrerie (Cologne, W. R. M. ; musée du Mans, de Rouen) et des armures (musée du Mans) caractérisées par un rendu particulièrement savoureux de la matière, des accords poétiques et mystérieux de tons recherchés et surtout des oppositions de pénombre (gris-brun) et de " coups de lumière " (ors, argents, jaunes) dérivés de l'esthétique de Rembrandt et de ses disciples, comme Dou. Rentré en Hollande v. 1646 (il réside en tout cas à Amsterdam à partir de 1653), il y perpétue ce style chaud et précieux auquel son renom est attaché à juste titre. Son répertoire comporte des juxtapositions d'orfèvrerie, de verres, de faïences ou de porcelaines de Chine et d'objets plus rares (coquillages, nautiles, corail), disposés sur des tapis luxueux ; citons les Natures mortes du Rijksmuseum, du musée d'Amiens, de Berlin, de Rotterdam (B. V. B.), du Mauritshuis (1658), de Copenhague (1678, S. M. f. K.), de Paris (Inst. néerlandais) ; la plus belle œuvre qu'il ait produite est certainement la Nature morte d'Aix-la-Chapelle (Suermondt-Ludwig-Museum), jouant sur un illusionnisme métallique, or et argent.
Nettement en réaction contre la nature morte austère et monochrome de Claesz et de Heda, Kalf, avec Beyeren et J. D. de Heem, caractérise bien dans ce domaine, aux environs de 1650, la nouvelle orientation de la peinture hollandaise vers un art somptueux, dérivé de tendances baroques. Son influence sur les peintres Van Streeck, Van Hulsdonck, Janssens, Roestraten fut si nette que l'on a parfois confondu leurs œuvres avec les siennes.
Kalinowski (Horst Egon)
Peintre et sculpteur allemand (Düsseldorf 1924).
De 1945 à 1948, il travaille à l'Académie des beaux-arts de Düsseldorf, où il expose en 1947. Sa peinture est alors proche du Purisme d'un Ozenfant, d'une figuration très construite et dépouillée (Nature morte, 1947). Il part ensuite pour l'Italie et vient se fixer à Paris en 1950. Il travaille à la Grande Chaumière puis à l'atelier d'art abstrait Dewasne-Pillet. Il passe alors naturellement à une expression plus strictement abstraite et expose en 1953 (gal. Arnaud) d'abord des gouaches aux couleurs fraîches puis des peintures. Après cette période " froide " où il cherche, selon sa propre expression, à exprimer " une spiritualité nouvelle ", sa peinture s'assouplit et s'ouvre aux recherches contemporaines. Des éléments étrangers y sont introduits (Floraison marine, 1957), et le collage ou l'assemblage d'objets les plus divers constituent pendant quelques années l'essentiel de sa production.
Après deux autres expositions à la gal. Arnaud (1954 et 1955), il fait figurer ses œuvres à la gal. Creuze (1956), puis chez Daniel Cordier (1958) : ces sortes de " châsses " ou premiers " caissons " qui vont brusquement, avec l'utilisation du bois, du cuir et du métal, se transformer en reliefs muraux parfois monumentaux, tels des portes ou des " meubles " (exposition gal. Cordier, 1963).
Peu à peu détachés de leur support original, le mur, les caissons ont quitté ces dernières années le domaine — très élargi — de la peinture, pour devenir stèles et véritablement sculptures. Kalinowski poursuit parallèlement un œuvre abondant dans le domaine du collage. Si, à partir de 1973, Kalinowski réalise des tableaux de grand format, entre peinture, collage et assemblage (Porte de Kos, 1977), au début des années 80 son œuvre adopte une tridimensionnalité plus structurée, associant le bois et le cuir dans des concrétions quasi organiques (Phaeton, 1981). En 1968, le C. N. A. C. de Paris lui a consacré une rétrospective. Ses œuvres figurent au M. N. A. M. à Paris.
Kandinsky (Vassily)
Peintre français d'origine russe (Moscou 1866 – Neuilly-sur-Seine 1944).
Naissance d'une vocation
Il s'engage d'abord dans des études de droit et d'économie, comme il est alors de mise dans la grande bourgeoisie moscovite ; les leçons de dessin, de peinture et de musique qu'il avait reçues plus jeune l'attiraient sans doute davantage vers la profession de peintre, mais, écrira-t-il plus tard, " je trouvais mes forces trop faibles pour me sentir en droit de renoncer aux autres obligations ". En 1889, il est envoyé en mission dans le gouvernement de Vologda, où l'architecture paysanne et l'art folklorique semblent cependant l'intéresser autant — comme en témoignent les pages de son calendrier — que l'étude du droit coutumier paysan, but officiel de sa mission. Sa première entrée dans une isba, au cours de ce même voyage, restera fixée dans sa mémoire : lorsque, devant les images populaires aux couleurs " vives et primitives " qui ornent les murs, il a le sentiment d'" entrer dans la peinture ", n'est-il pas déjà à la source même de sa quête ultérieure, cette " nécessité intérieure " qu'il définira à l'époque du Blaue Reiter ? Une autre révélation décisive fut celle de la Meule de foin de Monet, devant laquelle Kandinsky, alors attaché à la faculté de droit de Moscou (1895), sentait " sourdement que l'objet (le sujet) manquait dans cette œuvre ". Celle-ci pourtant le pénètre profondément, et tous ses détails se gravent dans sa mémoire ; dès lors, l'objet (ou le sujet : l'hésitation est ici révélatrice) devait inconsciemment perdre pour lui de son importance en tant qu'" élément indispensable du tableau ". Ainsi, d'appel en appel, Kandinsky renonce peu à peu à la carrière de juriste qui s'ouvre devant lui, et, lorsque, en 1896, une chaire de professeur lui est offerte à l'université de Dorpat, il démissionne pour se consacrer à la peinture.
La formation
Il arrive à Munich à la fin de l'année 1896 et s'inscrit à l'école Azbé, dont les cours de dessin ne l'intéressent guère. Il travaille seul quelque temps, notamment à des études de paysages, avant de suivre les cours de Franz Stuck à l'Académie (1900), où ses " extravagances de couleurs " lui valent les plus vives critiques du maître. Pour la première exposition du groupe Phalanx, qu'il fonde en 1901 et dissout trois ans plus tard, il crée une affiche qui n'échappe pas aux impératifs du Jugendstil, alors en vigueur à Munich. L'année suivante, il enseigne à l'école qui se rattache au groupe : parmi ses élèves se trouve Gabriele Münter, qui sera sa compagne jusqu'à la déclaration de guerre en 1914. Déçu sans doute par le conservatisme inébranlable du milieu artistique munichois, il effectue bientôt avec elle de nombreux voyages : Venise, puis Odessa et Moscou (1903), Tunis (1904), Dresde, Odessa de nouveau, puis l'Italie (1905), avant de séjourner une année entière près de Paris, à Sèvres. Durant cette période, riche et très active, Kandinsky, à travers divers procédés et techniques, cherche sa voie. " Chaque ville a un visage, Moscou en a dix " : le " modèle " qu'est pour lui sa ville natale le guide souvent, tant dans ses peintures " par cœur " que dans ses études ou croquis pris sur le vif. Exécutés dans le vieux Schwabing de Munich — dont la luminosité intense rappelle les couleurs de Moscou —, ces derniers le déçoivent cependant, car ils s'avèrent n'être qu'un " effort infructueux pour capter la force de la nature ". De ses tableaux peints " par cœur ", on retient surtout ses " peintures romantiques ", exécutées en atelier, de mémoire, telles que Promenade (1901), Vieille Ville (1903, Munich, Städtische Gal.) ou Panique (1907), dont le caractère moyenâgeux et russe à la fois se retrouve dans ses bois gravés (146 de 1902 à 1912). Ceux-ci, comme Poésies sans paroles (12 bois, 1904, Moscou) et surtout Xylographies (5 bois, 1906, Paris), s'apparentent beaucoup à son œuvre peint quant au " sujet ", mais révèlent une plus grande maîtrise de la couleur, traitée pour elle-même.