Ruoppolo (les)
Famille de peintres italiens (actifs à Naples au XVIIe s.).
La tradition considère Giovanni Battista (Naples 1629 – id. 1697) comme le plus fameux de ces spécialistes de la peinture de nature morte ; Giuseppe, mort en 1710, probablement neveu de Giovanni Battista, redécouvert depuis peu, semblerait, d'après De Dominici, avoir produit jusqu'en 1710. Il n'est pas exclu que l'on doive distinguer la personnalité de Giuseppe d'un autre peintre jusqu'alors identifié avec lui et qui signe avec le monogramme G. R. U. Giovanni Battista, l'un des meilleurs représentants de la peinture de nature morte à Naples, ne peut pas toutefois en être le chef d'école puisque, chronologiquement, il n'est qu'un continuateur. Cependant, il apparaît incontestable qu'il fut l'un des bons peintres européens de sa spécialité. L'artiste débute dans le climat de culture caravagesque tardive (où prévalent Luca Forte et l'auteur de la grande Nature morte à l'oiseau, attribuée par certains à Paolo Porpora, de la pin. de Bari), adoptant un Naturalisme rigoureux (comme en témoignent les plus anciennes Natures mortes au musée de Capodimonte à Naples ou celle, avec des Fleurs et des légumes, signée, de l'Ashmolean Museum d'Oxford) et mêlant quelque réminiscence de la composition de Juan Van der Hamen. Cette première production, assez importante, d'une haute qualité, se trouve également représentée au Nm de Stockholm et au Rijksmuseum. Vers 1665-1670, Giovanni Battista modifie sa manière ; il subit l'influence de Porpora, alors dans toute la maturité de son talent, ainsi que celle des " peintres de genre " romains et des représentants du Baroque à Naples (Giordano, Preti ou C. Fracanzano). À l'attentive recherche luministe se substitue un jeu plus vibrant d'atmosphère colorée, tandis que la composition se fait luxuriante, théâtrale, chargée de décorations emphatiques. Cette évolution (exemples à Naples, Capodimonte, Museo di S. Martino et diverses coll. part) fait découvrir un peintre différent, non moins intense et heureux qu'il ne le fut dans sa phase naturaliste, mais désormais d'une tout autre qualité, en accord avec l'époque et s'opposant aux résultats de Giuseppe Recco et d'Andrea Belvedere.
L'évolution artistique de Giuseppe, pour autant qu'on la connaisse, n'est pas tellement différente de celle de Giovanni Battista, plus âgé ; le niveau artistique est également très remarquable, à en juger par quelques toiles signées (la signature est toutefois de lecture incertaine), comme le " bodegone " du Museo " Duca di Martina " à Naples ou la Nature morte de la coll. Molinari-Pradelli à Bologne. Giuseppe ne se distingue de Giovanni Battista que par un certain goût pictural, rendu par un luminisme appuyé et par une ouverture aux modes de Giuseppe Recco (Luca Forte restant toutefois son plus ancien modèle). Cependant, Giuseppe, dans sa maturité, se détache de Giovanni Battista ; au lieu de suivre la même évolution vers une écriture libre et vive, plus nettement baroque, il se replie au contraire sur une sorte d'académisation des expériences précédentes. Les dernières œuvres (si elles sont de Giuseppe), portant le monogramme G. R. U., révèlent une répétition conventionnelle, fatiguée et maniérée, des résultats précédents, qui, eux, reflétaient une tout autre intensité stylistique (exemples à Naples, Capodimone).
Plusieurs " peintres de genre " napolitains se rattachent très étroitement aux Ruoppolo (Francesco della Questa, Aniello Ascione [connu de 1680 à 1708] et plus tard Marco de Caro) tout en étant également sensibles à la manière de Giuseppe Recco, l'autre célèbre protagoniste du genre du XVIIe s. napolitain.
Ruscha (Edward)
Artiste américain (Umaha, Nebraska, 1937).
Edward Ruscha est l'un des artistes les plus originaux du pop art américain et sans conteste le plus conceptuel. Il a suivi, à partir de 1956, les cours de graphisme publicitaire du Chouinard Art Institute et du Williams Institute de Los Angeles. Il découvre alors la peinture expressionniste abstraite puis l'œuvre de Jasper Johns et de Robert Rauschenberg. En 1960-61, Ruscha travaille dans la publicité comme dessinateur et maquettiste. Il rapporte de son voyage en Europe des peintures à l'huile sur papier où les mots prennent déjà une grande importance (Métropolitain, 1961). De 1963 (Twenty Six Gasoline Stations) à 1978 (Hard Light), il réalise de petits livres, la plupart à l'aide de documents photographiques et dans lesquels il montre, de façon systématique et objective, une réalité banale (Every Buildings on the Sunset Strip, 1966). Ses livres constituent un apport capital à l'histoire de l'art des années 60 par la nouveauté de leur conception, leur contenu radical et leur utilisation de la photographie. En 1970, il réalise son premier film, Premium, suivi notamment de Miracle, en 1975. Mais il n'arrête pas pour autant de peindre. Ses tableaux utilisent des mots très dessinés. Noise (1963, coll. part.) est une peinture à l'huile sur toile où sont inclus des éléments de la réalité : crayons, albums de bandes dessinées, des images simplifiées comme dans les publicités anciennes (Standard Station Amarillo Texas, 1963, Hanover, New Hampshire, Dartmouth College Museum), qui montrent l'appartenance de l'artiste à l'univers du pop art. Dans les années 1964-1974, il utilise également des éléments organiques, minéraux et végétaux pour réaliser ses dessins et ses tableaux, ainsi Nashville (1967, poudre à canon sur papier), Satin (1971, pétales de rose sur papier), Sand in the Vaseline (1974, jaune d'œuf sur satin), Pure Ecstasy (1974, thé sur moire, Eindhoven, Stedelijk Van Abbe Museum). Mais sa peinture et ses compositions restent fortement marquées par les grands espaces de l'Ouest américain et par l'univers hollywoodien, dans son utilisation des panoramiques, des titrages (I just can't bear to look, 1973), des cadrages ou des formats horizontaux étirés (Three Murders, 1981). Ruscha intervient également dans l'architecture en inscrivant des lettres à l'intérieur de la rotonde d'entrée d'une bibliothèque de Miami (Words without Thoughts Never to Heaven, 1985, Miami Dade Public Library). Utilisant la technologie de la typographie et l'esthétique du cinéma dans ses tableaux, combinant le mot et l'image (Talk Radio, 1988), Ruscha reste un artiste profondément original. Une exposition a été consacrée à l'artiste (Paris, M. N. A. M.) en 1989.