Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Colombe (Jean)

Peintre français (Bourges v. 1440  –id. 1493).

Il fit toute sa carrière à Bourges, protégé dès 1467 par la reine Charlotte de Savoie, puis en faveur auprès des grands seigneurs du centre de la France ; en 1485 et 1486, il travailla pour le duc de Savoie Charles Ier, qui lui fit terminer 2 célèbres manuscrits inachevés, l'Apocalypse de l'Escorial et les Très Riches Heures du duc de Berry (Chantilly, musée Condé). Il semble avoir dirigé un atelier surchargé de commandes ; d'où l'abondance et l'inégalité des manuscrits qui relèvent de son style. Ses premières œuvres connues (Vita Christi, Heures de Louis de Laval, v. 1480-1485, Paris, B. N.) se ressentent de l'influence de Fouquet : influence surtout formelle, dans la technique, les compositions, certains types de personnages. Son tempérament personnel, tout d'imagination et d'emportement, l'éloigne de plus en plus de l'équilibre classique de Fouquet (Romuléon, v. 1490, Paris, B. N.), et son atelier, où travaille son petit-fils François († 1512) , qui continue son œuvre après sa mort, accentue encore ces traits (Destruction de Troie, v. 1500, id.). Peinture poétique et mouvementée, peu soignée, sans recherche du réalisme ni crainte de la schématisation, où tout est poussé à l'extrême : effets de lumière, perspectives outrées, compositions encombrées de figures, décors surchargés d'ornements et d'or. À l'aube du XVIe s., Colombe reste un artiste foncièrement conservateur, dont l'inspiration profonde est voisine de l'esprit du Flamboyant plutôt qu'annonciatrice du maniérisme qui triomphera à la Renaissance.

Colombel (Nicolas)

Peintre français (Sotteville-lès-Rouen 1644  – Paris 1717).

Jeune, Colombel se rend à Rome pour " étudier Raphaël et Poussin ". Il sera reçu en 1686 à l'Académie de Saint-Luc de Rome, à l'Académie de Paris en 1694, mais, dès 1682, il envoie de Rome à Paris 4 tableaux, très caractéristiques de son style, identifiés par A. Blunt : le Christ guérissant les aveugles et le Christ chassant les marchands du Temple du musée de Saint Louis (Missouri), la Madeleine devant le Christ du musée de Baroda (Inde) et la Femme adultère, autrefois dans le commerce à Berlin. Ses œuvres mentionnées encore (Mars et Rhéa Sylvia, 1694, Paris, E. N. B. A. ; Jésus et la Samaritaine, Salzbourg, Residenz ; Agar, musée de Budapest ; Saint Hyacinthe sauvant la statue de la Vierge des ennemis du nom chrétien, Louvre) révèlent un artiste au tempérament classique et au coloris froid, prolongeant, au temps de Watteau, le style ample et majestueux d'un Philippe de Champaigne.

Colombo (Gianni)

Peintre italien (Milan 1937-Melzo 1993).

Gianni Colombo est le principal créateur de l'Art lumino-cinétique en Italie. Dès 1959, il a réalisé des reliefs variables qui bougent en permanence ou qui réclament la participation du spectateur (Superficie en devenir, 1960 ; Structure fluide, id.). Sa première exposition personnelle date de 1960 à la galerie Pater à Milan. Gianni Colombo s'est intéressé tout de suite au problème du mouvement dans l'art ainsi qu'à celui de l'instabilité du changement. D'autre part, il a utilisé très tôt la lumière et a poursuivi ses recherches sur la lumière et le mouvement dans l'espace, en créant des environnements qui peuvent être soit fixes, soit plutôt mobiles et qui ont la particularité de se déformer, de changer, entraînant par là pour le spectateur une perception physique très perturbante. En utilisant des projecteurs ou des lasers, en faisant bouger les murs, le plafond et le sol des ambiances qu'il crée par exemple, à partir de 1964, et qui ont la particularité de présenter des espaces élastiques, Gianni Colombo retrouve l'idée qu'avaient tenté d'exprimer certains artistes maniéristes comme Giulio Romano, qui avait réalisé dans la salle des Géants dans le palais du Té à Mantoue une architecture qui paraissait s'écrouler sur le spectateur (Espace élastique. Superficie, 1971). Gianni Colombo, qui a participé à de nombreuses expositions en Europe et aux États-Unis, et en particulier à celles organisées par Matko Mestrovic à partir de 1961 à Zagreb, intitulée Nouvelles Tendances et Arte programmata à partir de 1962 à Milan, a reçu, en 1968, le premier prix de la Biennale de Venise.

colorfield

Signifiant littéralement " champ coloré ", ce terme fut utilisé par le critique Clément Greenberg à propos d'artistes comme Barnett Newman, Mark Rothko et Clifford Still. Héritiers de Matisse et issus de l'expressionnisme abstrait, les peintres " colorfield " utilisent un nombre réduit de couleurs étalées uniformément afin d'éviter toute mise en relief de la pâte. La couleur emplit l'espace entier selon le principe du " all over " pour former une image homogène excluant toute composition, toute hiérarchie entre les éléments. À ces artistes C. Greenberg joignait une seconde génération comprenant Helen Frankenthaler, Morris Louis et Kenneth Noland. Tous trois reprennent de façon plus radicale la technique du " staining " (imprégnation) : les couleurs se déposent en voiles successifs d'une épaisseur impalpable, se chevauchant les unes les autres mais sans créer la moindre profondeur.

Columbano (Bordalo Pinheiro, dit)

Peintre portugais (Lisbonne 1857  – id. 1929).

Formé par son père, le peintre romantique Manuel Maria Bordalo Pinheiro, il montra très jeune de grandes dispositions pour le portrait et étudia à l'École des beaux-arts de Lisbonne. De son séjour à Paris (1880-1883), où il fut influencé par Carolus-Duran, ressort la scène nocturne et intimiste de Soirée chez lui (Lisbonne, M. A. C.), exposée au Salon de 1882. Rentré à Lisbonne, il adhère au Groupe du Lion, dont il réalise en 1885 l'important portrait collectif (Lisbonne, M. A. C.), d'un naturalisme saisissant. Il se consacre essentiellement au portrait, souvent fondé sur des effets de pénombre, une recherche " naturaliste " de la personnalité, et marqué par son tempérament romantique et son caractère difficile (nombreux portraits au musée d'Art contemporain de Lisbonne, dont celui du poète Antero de Quintal, 1889, Teixeira Gomez, Oliveira Martins, etc.). Il exécuta de nombreux autoportraits (1926, Florence, Gal. Pitti. Lisbonne, M. A. C.). Délicat peintre de nature morte (Nature morte, 1917, Paris, M. N. A. M.), il ne se montre guère novateur dans ses peintures religieuses ou mythologiques. Reprenant les thèmes historiques traditionnels du Portugal et le thème littéraire des Lusiades de Camoëns, il exécuta de nombreux décors (Lisbonne, Palacio do Conde de Valenças, 1888 ; Musée militaire, 1899-1904).

   Professeur à l'École beaux-arts de Lisbonne (1901-1913), il devint académicien, directeur du musée d'Art contemporain de Lisbonne (1901-1927), il fut très célébré de son vivant, même si sa peinture, profondément enracinée dans le réalisme, est à l'écart des courants européens du début du siècle.