Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Bryen (Camille Briand, dit Camille)

Peintre et poète français (Nantes 1907  – Paris 1977).

Il se fixe à Paris en 1926 et publie ses premiers essais poétiques (Opoponax, 1927) en même temps qu'il exécute des dessins spontanés. Il invente bientôt des procédés insolites de création plastique et expose en mai 1934 des dessins et des collages " Au grenier ". S'il se rapproche un moment des surindépendants et des surréalistes, il reprend plutôt l'action destructrice de Dada en faisant profession d'anti-peinture et d'" abhumanisme ", caractérisée comme une " disponibilité absolue ", attitude qu'il recherchera également dans sa peinture. Dans la continuité de l'esprit dada et surréaliste, il fabrique quelques " objets à fonctionnement " (Morphologie du désir, 1934-1937, Paris, M. N. A. M.) et fait à leur propos une conférence à la Sorbonne en 1937, l'Aventure des objets (publiée chez José Corti). Sa première œuvre, tachiste avant la lettre, Cire et fumée, est exposée en 1936 au Salon des surindépendants. Bryen aborde la peinture après la guerre en maintenant sa volonté de désintégrer le langage convenu. Son refus de toute expression liée à la figuration l'amène à s'associer aux activités les plus libres de l'art abstrait, bien qu'il n'accepte pas pour lui-même cette définition. Il expose au premier Salon des réalités nouvelles (1946) et prend une part active, avec Mathieu, aux manifestations de la Non-Figuration psychique (1947-48), opposée au formalisme géométrique et justifiant ainsi le courant de l'abstraction lyrique. Participant de Véhémences confrontées (1951) et de Signifiants de l'informel (1952), Bryen invente à partir de 1950 une forme d'expression picturale désignée comme " tachiste ". La composition est d'une grande souplesse chez Bryen ; à l'assise géométrique des fonds, généralement en tonalités claires, se superposent des foyers colorés plus denses et brefs, en touches carrées bien affirmées, dont des lignes colorées ponctuées ou continues infléchissent le dynamisme (les Cloîtres du vent, 1966 ; Virgile, 1967). L'effet spatial qui résulte de cette composition atteint, selon Jean Grenier, à un " mysticisme atmosphérique " admettant comme hautes références Venise, Turner et Monet. Simultanément, dans ses très nombreux dessins à l'encre de Chine et dans ses gravures, l'artiste a continué à développer son écriture, faite de concentration et de finesse incisive. Il a illustré plusieurs textes, notamment Vigies de Tzara (1963), Feuilles éparses de René Crevel (1965), Lettres du Nouveau-Mexique (1971) et la Querelle des États (1973) de Michel Butor, l'Imitation de Notre-Dame la Lune de Jules Laforgue (1974). Bryen est représenté à Paris (M. N. A. M. et M. A. M. de la Ville), dans les musées du Havre, de Lyon, de Lille. Le M. N. A. M. lui a consacré une rétrospective en 1973.

Brzeski (Janus-Maria)

Peintre polonais (Varsovie  1907  – Cracovie  1957).

Après avoir effectué ses études à Poznań, en Italie et à Paris, Janus-Maria Brzeski va résider à Poznań. Il développera l'essentiel de son art en pratiquant le collage en 1929 et 1930 à Paris. Il se tourne ensuite vers la photographie, exécute des photomontages, puis travaille en Pologne avec un artiste proche de lui, Casimir Podsadecki, avec lequel il va aborder la réalisation de films d'avant-garde (Profils, 1931 ; Béton, 1933, auquel collabore Podsadecki). En 1933, il réalise notamment un cycle de collages sur le thème de la Naissance du robot, dont l'esthétique et la mise en œuvre ne sont pas éloignées des exemples donnés par Alexandre Rodtchenko et dans une certaine mesure Laszlo Moholy-Nagy. Brzeski s'est également illustré comme typographe.

Brzozowski (Tadeusz)

Peintre et dessinateur polonais (Lwow 1918-Rome 1987).

Il fit ses études à l'Académie des beaux-arts de Cracovie et les termina en 1946. Membre du groupe d'avant-garde dit " Groupe de Cracovie ", il fut professeur dès 1959, puis directeur du lycée des Arts décoratifs de Zakopane. Son art, qui relève de l'Expressionnisme abstrait, est d'une rare qualité picturale : le Prophète (1950, musée de Varsovie), la Corde (1957, id.), le Douanier (1958, musée de Cracovie).

Buchet (Gustave)

Peintre suisse (Étoy  1888  – Lausanne  1963).

Gustave Buchet est l'un des premiers peintres abstraits suisses. Il a effectué ses études à Genève, puis a séjourné à Paris de 1916 à 1917, où il a fréquenté l'atelier de la Grande Chaumière. Il rencontre Zadkine à cette époque. Il a sa première exposition à Genève en 1919. Après avoir fait connaissance de l'écrivain Marinetti et du sculpteur Archipenko, il est de nouveau à Paris en 1920, où il résidera jusqu'en 1940. Il est influencé par le Cubisme et le Futurisme, comme le montre son tableau l'Avion (1923, Winterthur, Kunstmuseum). Marqué par le Purisme à partir de 1925, il se tourne vers l'abstraction : ses œuvres sont alors composées de surfaces de couleurs vives, de formes géométriques simples, disposées dans des compositions fondées sur l'horizontale et la verticale : il participe à l'exposition " L'art d'aujourd'hui " à Paris en 1925, pour laquelle il réalise la couverture du catalogue et l'affiche. À partir de 1929, Gustave Buchet retournera à la peinture figurative.

Buchheister (Carl)

Peintre allemand (Hanovre  1890  – id.  1964).

Après avoir été mobilisé à la fin de la guerre, Buchheister commence à peindre en 1919. Il devient l'ami de Kurt Schwitters en 1921 et réalise ses premières œuvres abstraites, marquées par l'art de Kandinsky en 1923. Il entre en contact avec Théo Van Doesburg à Hanovre en 1925 et se rapproche des idées du Stijl, comme le montre son tableau Rosa Rechteck Komposition (1927, Wilhelm-Hack Museum, Ludwigshafen), dont la composition est fondée sur des horizontales et des verticales et utilise de grands aplats de couleur à l'intérieur de formes géométriques simples. En 1926, il a sa première exposition personnelle à la galerie Der Sturm à Berlin. Il crée en 1928 avec Kurt Schwitters le groupe d.a.h. (Die Abstrakten Hanover [" les Abstraits de Hanovre "]) dont les autres membres sont Friedrich Vordemberge-Gildewart, Hans Nitzschke, Rudolf Jahns et César Domela, qui résidait à Berlin. Buchheister réalise quelques-unes de ses œuvres les plus réussies à cette époque, en particulier le tableau Dreieck Komposition (1928, Museum Ludwig, Cologne), dont le châssis est en forme de triangle équilatéral et la composition entièrement fondée sur des lignes obliques, des aplats de couleur rouge, bleu, jaune, blanche et grise et dont certaines parties sont sablées : ce tableau, tout à fait original dans la production contemporaine, illustre un aspect particulier du constructivisme par la complexité de sa construction, en même temps que par sa recherche de l'instabilité à l'intérieur d'une structure très déterminée. À partir de 1930, Buchheister va s'intéresser de plus en plus à l'utilisation du relief et va expérimenter des matériaux différents de la peinture à l'huile, tels que le Plexiglas et le métal. Des éléments en relief lui permettent de composer avec l'espace, notamment dans son œuvre intitulée Glas Holz Faden Komposition (1931), dans laquelle il a recours à l'utilisation du cadre, qui, incorporé à la composition, sert de support à un fil tendu devant la surface. En 1933, il réalise le tableau Diagonal Komposition 533 R, intitulé aussi Dornerbild, en hommage au directeur du Provinzial Museum de Hanovre, Alexander Dorner. Cette œuvre est constituée de lignes obliques qui déterminent des plans dont l'un est réalisé avec de minuscules morceaux de liège collés. En 1932, Carl Buchheister, de même que Vordemberge-Gildewart, adhère à l'association Abstraction-Création, à Paris. Après la guerre, il évoluera, dans un esprit un peu identique à celui de Willi Baumeister, vers une peinture plus organique. Buchheister est particulièrement bien représenté au Museum Sprengel de Hanovre, au Centre Georges-Pompidou à Paris (M. N. A. M.) et au musée de Grenoble.