Pijnacker (Adam)
ou Adam Pyjnacker
Peintre néerlandais (Pijnacker 1622 – Amsterdam 1673).
On ignore qui fut son maître, mais Houbraken signale qu'il séjourna trois ans en Italie après son apprentissage. Pijnacker habita ensuite Delft (1649) et Schiedam (1657-58). Ce n'est qu'à l'âge de quarante ans env. qu'il s'installa à Amsterdam, centre artistique de l'époque. Comme Jan Both, Jan Asselijn, Nicolaes Berchem et Karel Dujardin, tous nés entre 1615 et 1620 env., Pijnacker appartient à la génération la plus importante des paysagistes italianisants néerlandais. Il semble qu'il n'ait commencé à peindre qu'à un âge assez avancé, alors que ses collègues avaient déjà exécuté des tableaux importants aux alentours de 1640. Le premier tableau du peintre en effet, encore représentatif de sa première manière, est daté de 1654 (Paysage à la chute d'eau, musées de Berlin). Il exécutait alors d'une part des paysages majestueux, boisés et montagneux, dont le dessin et le style évoquent ceux de Jan Both, d'autre part des vues de fleuves et de rivages inspirées de Jan Asselijn. Ces tableaux, peints v. 1650, illustrent la phase classique dans l'art des paysagistes italianisants néerlandais. C'est surtout dans les vues de rivages (Rivage d'un fleuve, Ermitage) que Pijnacker sut réaliser par des moyens extrêmement simples une sobre harmonie jamais atteinte par ses prédécesseurs.
Vers 1659-60, la simplicité classicisante fait place à des compositions pleines de mouvement et riches de contrastes. Après 1660, le premier plan du paysage est occupé par des troncs de bouleaux et de grandes feuilles de choux, qui, dans un clair-obscur irréel, se détachent sur un fond beaucoup plus sombre. Les arbres ont une écorce lisse et luisante, dont la surface semble argentée dans les parties éclairées. La façon dont Pijnacker a reproduit la couche de mousse rugueuse qui recouvre les troncs, le pointillé des petites feuilles au centre du tableau contrastent avec les arbres du premier plan, d'autant plus vivement que les troncs, indiqués avec une précision minutieuse, ressortent sur la végétation du fond, voilée d'une lumière diffuse. D'un style encore plus turbulent et nerveux sont les tableaux exécutés juste avant 1660, où des groupes de nuages prennent la forme de diagonales irréelles (Paysage sous un ciel orageux, Bruxelles, M. R. B. A.). Les qualités exceptionnelles du style tardif de Pijnacker sont dues à l'équilibre maintenu entre l'invention et le goût des contrastes, d'une part, et une composition réfléchie, dont les détails ont été exécutés avec grand soin, d'autre part (Paysage au chevreuil mort, Paris, musée des Arts décoratifs). Ses représentations de paysages italiens ou de scènes méditerranéennes au sens large, figurant une Italie de rêve, romantique à certains égards, en tout cas exagérément cristalline et détaillée, ont connu de tout temps un grand succès mais plaisent particulièrement à l'œil moderne. On ne constate un certain relâchement que dans les toutes dernières années de la vie de l'artiste, qui, moins inspiré, se répète.
L'œuvre peint d'Adam Pijnacker, qui compte 200 tableaux env., dont 4 seulement à sujets bibliques, est principalement réparti entre les musées de Saint-Pétersbourg, Stockholm, Amsterdam, Paris, Munich, Hambourg, Kassel, Francfort, Berlin.
Pillement (Jean)
Peintre français (Lyon 1728 – id. 1808).
Issu d'une famille de peintres lyonnais, il fut élève de Daniel Sarrabat, qui travaillait pour les églises de la ville et dont il se souvint dans certaines anatomies : Chinoiserie (musée de Saint-Étienne) ; il voyagea beaucoup : Lisbonne (1745-1748 et 1780), Londres (1750-1760), Vienne (1763), Pologne (1765-1767 ; nombreux dessins conservés à la bibl. de Varsovie), Russie (1767). On peut admettre que, jusque v. 1775, il fut essentiellement un ornemaniste : comme Watteau, Boucher, C. Huet ou Peyrotte, il sacrifia au goût chinois dès 1743, date de son passage aux Gobelins. Mais son œuvre eut peut-être plus d'influence, prolongeant sous Louis XVI le style rocaille (Chinoises dans un paysage adorant un singe, Paris, musée des Arts décoratifs). À la différence de celles de Boucher, ses chinoiseries (dessins, panneaux, gravures, réunies en 2 vol. en 1767 et 1771) restent dans le domaine d'une fantaisie un peu folle, avec une féerie de couleurs, un entrelacs d'échafaudages inquiétants et d'animaux sinueux orchestrés dans de belles mises en page (Fleurs de caprice). Les ébénistes utilisèrent ses motifs décoratifs ou s'en inspirèrent (petit salon du musée Carnavalet à Paris, provenant de l'hôtel de Lariboisière), de même que les manufactures de soie et d'indienne, dont les opérations d'impression devinrent libres sous Louis XVI (exemples à Lyon, musée des Tissus).
Pillement s'oriente alors vers le paysage : exact contemporain de Robert et de Fragonard, il peint quelques vues d'après nature (série des Jardins de Bemfica, près de Lisbonne, 1785, Paris, musée des Arts décoratifs), issues de la tradition des vues perspectives du XVIIIe s. ; mais il compose le plus souvent des paysages animés, où il agence des accessoires en un décor féerique pour le ballet de ses figures (l'Orage, musée de Besançon). Avec l'atmosphère ouatée de ses marines (Naufrages, musées de Besançon et de Montpellier, musée des Arts décoratifs à Lyon), les empâtements de ses ruines (musée d'Avignon) et ses animaux étranges (panneaux du musée des Arts décoratifs à Paris, 1765, provenant de Pologne), Pillement se situe à la charnière de la tradition classique du paysage clair et du courant déjà empreint de Réalisme (L. G. Moreau) ou davantage influencé par les Néerlandais (J. Vernet).
Pilo (Carl Gustav)
Peintre suédois (Runtuna, Södermanland, 1711 – Stockholm 1793).
Sa formation artistique est peu connue, et l'hypothèse d'un séjour à Venise et en Allemagne aux environs de 1730 n'est pas confirmée. En 1741 Pilo s'établit à Copenhague, où il fit rapidement carrière : il devint peintre de la Cour en 1745 et dirigea la réorganisation de l'Académie des beaux-arts, dont il fut professeur à partir de 1745 ou 1748 et directeur en 1771-72. À la suite d'intrigues, vraisemblablement de caractère politique, il fut expulsé du Danemark en 1772. Durant quelques années, il mena une vie errante en Suède avant de se fixer, en 1780, à Stockholm, où il avait été nommé directeur de l'Académie des beaux-arts en 1777. Il se consacra totalement au portrait. Il s'exprima à partir de 1740 en un style rococo personnel, au dessin nerveux, plein de vie, à la touche large, généreuse, aux tons raffinés, où dominent vert marin et bleu vif et qu'illustrent une suite de peintures représentant la famille royale danoise autour de 1750 (versions figurant en divers musées, notamment au S. M. f. K. de Copenhague). Sous l'influence du portrait français, son art prit un caractère plus intime, un modelé plus doux. Ses études approfondies sur Rembrandt ainsi que sa rencontre avec Tocqué, qui visita le Danemark en 1758-59, entraînèrent un changement dans sa technique. Le dessin devient calme et concis, la couleur plus chaude, les figures sont traitées au moyen d'un clair-obscur suggestif : portraits de la Reine Sophie-Magdeleine (1765-66, Stockholm, Nm). Avec sa grande composition le Couronnement de Gustave III (id.), que Pilo commença en 1792 sur la commande du roi, mais qu'il laissa inachevée à sa mort, la peinture de l'artiste atteignit à sa plus magistrale expression. Par son jeu scénique visionnaire, où lumière et couleurs unissent figures et architecture, et par sa riche galerie de personnages, contemporains de premier plan, cette toile constitue l'un des chefs-d'œuvre de la peinture suédoise. La couleur, que Pilo considère comme un élément autonome, est son véritable moyen d'expression. Comme professeur, Pilo eut une grande influence d'abord au Danemark, auprès de ses élèves et de ses successeurs, puis en Suède, auprès des romantiques suédois.