Van de Venne (Adriaen Pietersz)
Peintre et graveur néerlandais (Delft 1589 – La Haye 1662).
Né à Delft, fils d'un émigré flamand de Lierre, poète, portraitiste, peintre d'histoire et de genre, il fut élève de l'orfèvre Simon de Valck à Leyde, puis du peintre de grisailles Hieronymus Van Diest à La Haye. Il est cité en 1607 à Anvers, puis de 1614 à 1625 à Middelburg, et son art atteint alors un premier apogée : en effet, ses tableaux, à la polychromie vive, à la touche rapide et d'un esprit encore maniériste, proches de ceux de Molanus et de Christoffel Van den Berghe, sont comparables à l'œuvre de Bruegel de Velours par la conception du paysage (Paysage d'été, 1614, musées de Berlin) et surtout par l'illustration de proverbes, tradition reprise de Bosch et de Pieter Bruegel (le Fils prodigue, 1617, musée de Kassel). Venne s'apparente enfin à ces derniers par la conception même de ses œuvres, qui s'attachent à la description de l'homme et où abondent les détails réalistes, traités avec un humour délicat (la Pêche des âmes, 1614, Rijksmuseum). Un des plus importants tableaux de cette première période est la Fête pour la trêve de 1609 (1616, Louvre), merveille de raffinement pictural et de finesse réaliste qui, dans certains détails minutieux et parfaitement observés, contient déjà le meilleur du fameux Réalisme intimiste de la peinture des Pays-Bas. Citons aussi de ces mêmes années quelques portraits : le Prince Maurice de Nassau (1618, Rijksmuseum), Portrait de jeune homme (1616, Rotterdam, B. V. B.). Ayant exécuté en 1625 un véritable adieu à sa ville favorite (le Port de Middelburg, Rijksmuseum), Venne s'installa définitivement à La Haye. Là, il peint les Quatre Saisons (1625, id.), où l'on retrouve le style alerte de la période précédente, mais change bientôt d'orientation en se consacrant à la peinture de grisailles, très originales, et à la gravure, en pratiquant la monochromie claire à base de bruns, de gris et d'argentés, en usage chez Van Goyen et nombre de ses contemporains ; il exécuta ainsi des portraits (Frédéric V de Bohême, dit " le Roi d'Hiver ", 1626, id. ; Frédéric-Henri de Nassau, 1629, Rotterdam, B. V. B.), des scènes populaires, dont un proverbe inscrit dans une légende tire souvent la moralité (la Danse villageoise, 1632, Amsterdam, Rijksmuseum ; Rixe de mendiants, Nantes, musée Dobrée ; Guerriers au bivouac, 1632, Haarlem, musée Frans Hals ; Scène paysanne, 1635, Mauritshuis ; les Pauvres Gens, 1635, Rotterdam, B. V. B. ; Danse de gueux, la Stupidité, Lille, musée des Beaux-Arts).
Son activité de graveur fut importante ; il illustra des poèmes de Jacob Cats (1628) et de J. de Brune, et il grava des portraits de Guillaume Ier, de Maurice et de Frédéric-Henri de Nassau, que publia son frère aîné Jan Pietersz éditeur à Middelburg, dont la mort, en 1625, allait amener l'artiste à déménager à la Haye ; Adriaen Pietersz dessina aussi des modèles que gravèrent Willem et Crispin Van den Passe et Cornelis Van Dalem.
Ses deux fils furent également peintres : Hubert (La Haye 1634/35 – ? apr. 1675) fut l'auteur de grisailles, et Pieter (Middelburg ? – ? 1657) , inscrit en 1639 à la gilde de Saint-Luc de La Haye, fut un charmant peintre de fleurs.
Van de Venne (Jan)
ou Jan Van der Vinnen
Peintre flamand (Malines av. 1600 – Bruxelles [ ? ] av. 1651).
Ce n'est que tout récemment que l'on a pu identifier définitivement cet étonnant petit maître surnommé de manière approximative le " Pseudo-Van de Venne " ; on a trouvé son identité, grâce à la mention " Vinnen, peintre de Bruxelles " dans l'inventaire de la coll. de l'archiduc Léopold-Guillaume, en 1659, à propos d'un Joueur de vielle (auj. Vienne, K. M.) et grâce à plusieurs mentions " Venne " sur des inventaires du XVIIIe s., à propos de tableaux qui se rapportent au même peintre. Le " Pseudo-Van de Venne " est donc un Flamand, et non un Hollandais comme on le pensait le plus souvent au vu de son répertoire de figures rustiques ou pittoresques et d'une écriture picturale extrêmement brillante, aux effets ciselés d'une grande préciosité. Jan Van de Venne est reçu maître à Bruxelles en 1616 ; un seul de ses tableaux est daté, le Miracle de saint Théodule de la cathédrale de Besançon (1626), donné en 1647 par le chanoine Jules Chiffet, d'une famille bruxelloise. L'œuvre de l'artiste présente d'ailleurs d'étroits rapports avec les Flamands, notamment avec David Téniers I, dont il a pu être l'élève et dont il a pu imiter la facture brillante et les rares effets de lumière. Il affectionne les types populaires de personnages aux proportions courtes, les visages grimaçants et crispés, dans des clairs-obscurs complexes, avec des effets cuivrés ou argentés très délicats et une touche vive et nerveuse. Le " Maître des Tziganes ", comme on l'a aussi appelé, a peint plusieurs Campements de bohémiens (Brunswick, Herzog Anton Ulrich-Museum) ; il se signale souvent par son goût de l'étrange et du fantastique, comme dans les monstres scintillants de sa Tentation de saint Antoine (Utrecht, musée du couvent Sainte-Catherine). Il est particulièrement bien représenté dans les musées français, notamment à Dijon : Saint Pierre délivré par l'ange, Tête de vieillard, Tête de vieille femme, l'Adoration des mages (tous au musée des Beaux-Arts), Saint Mathieu et l'ange (musée Magnin) ; à Besançon : le Colporteur et la diseuse de bonne aventure ; à Strasbourg : la Résurrection de Lazare ; à Dunkerque : Deux Têtes de profil, la Tentation de saint Antoine. Une Tête de vieillard à Quimper. Il n'est pas exclu que le jeune Georges de La Tour ait vu des tableaux de Jan Van de Venne et en ait tiré profit pour certains de ses types de vieillard et son goût pour une facture calligraphique et virtuose.
Van Dongen (Kees)
Peintre français d'origine néerlandaise (Delfshaven, près de Rotterdam, 1877-Monte-Carlo1968).
Il travaille d'abord dans la malterie dirigée par son père et suit les cours de l'Académie de Rotterdam (1895). Il dessine pour le compte du Groene et du Rotterdamsche Nieuwsblad (1896), et les études de scènes de port, de filles de joie que le journal publie font scandale. Il traite d'ailleurs en peinture des sujets analogues et s'exprime déjà dans un style aux simplifications énergiques, haut en couleur. Il arrive à Paris le 14 juillet 1897 et élit domicile à Montmartre, où il est, en 1906-1907, l'un des hôtes du Bateau-Lavoir. Il expose chez le père Soulier (près du cirque Médrano) et chez Le Barc de Boutteville (1898), rue Le Peletier, où il peut voir des œuvres des Nabis ; il donne des aquarelles à de nombreux journaux, comme l'Assiette au beurre (enquête sur les prostituées, 1901), Frou-Frou, l'Indiscret, le Rabelais. Il se lie avec Fénéon, qui le fait entrer à la Revue blanche en 1903 et décide Vollard à lui consacrer une importante exposition l'année suivante. Il passe par une courte phase d'un divisionnisme dru (le Boniment, 1904, Paris, coll. part.), puis l'exemple des Nabis l'amène à alléger son métier. À la veille de l'éclatante manifestation du Fauvisme, à laquelle il participe, Van Dongen a produit déjà une œuvre très représentative de son esprit et dont les principaux caractères se maintiendront durant plusieurs années : harmonie audacieuse mais recherchée des accords, touches en animation rapide compensant des zones d'une exécution plus régulière, sensualité souvent canaille ou complice des visages ou des attitudes (Modjesko, 1908, New York, (M. O. M. A.), Saltimbanque au sein nu, v. 1907-1908, Paris, M. N. A. M.) dans une suite de nus entreprise en 1905 (Torse, coll. part.). La fréquentation assidue du cirque Médrano lui inspire en 1906-1907 une série de tableaux d'une qualité très homogène (le Maillot blanc, 1906). En 1908, Van Dongen collabore avec le céramiste Metthey, expose à Düsseldorf à l'instigation de Kahnweiler, puis à Dresde, où il envoie des dessins à l'exposition de Die Brücke ; il présente en effet avec les expressionnistes allemands des affinités plus grandes qu'avec les fauves français (Au bois de Boulogne, 1907-1908, musée du Havre). Il connaît le succès et il est en contrat avec la galerie Bernheim-Jeune (1909-1915). Il voyage en Espagne et au Maroc (1910-11), d'où il rapporte de belles toiles d'un sentiment plus frais (Femmes à la balustrade, v. 1911, musée de Saint-Tropez) ou d'une exécution allègre et spirituelle (les Fellahs, 1911, Paris, M. N. A. M.). Les compositions décoratives, en grands aplats colorés, apparaissent en 1911 (Rouge et jaune, Rouge et bleu) et, probablement confirmées par un voyage en Égypte en 1913, vont évoluer vers un style hiératique à deux dimensions (Homme bleu et femme rouge, v. 1918, Nice, musée Chéret). En 1913, la liaison de Van Dongen avec la marquise Casati, puis, surtout, en 1916, la liaison avec Léo Jasmy (qui se prolongera jusqu'en 1932) vont orienter la peinture de l'artiste vers le style mondain auquel il devra sa célébrité après la guerre, sorte de compromis entre le portrait officiel et l'affiche ; la composition se stabilise, rythmée par les longues verticales à quoi se réduisent ses modèles féminins (la Vasque fleurie, 1917, Paris, M. A. M. de la Ville), et la couleur, si elle conserve une insolence souvent heureuse, perd parfois de son raffinement. Van Dongen devient le peintre des célébrités du monde et du demi-monde, à Paris comme à Deauville. Cette longue suite d'effigies, d'une vérité assez cruelle sous des apparences arbitraires, reste un témoignage sur une partie de la société de l'entre-deux-guerres (Boni de Castellane, 1922 ; les Dolly Sisters, 1925). L'activité de portraitiste de Van Dongen devait se maintenir fort tard, mais, après 1930, une vision plus véridique, plus conventionnelle aussi, du modèle est sensible (Utrillo, 1948 ; Brigitte Bardot, 1954). C'est dans les paysages peints au cours de la même période que Van Dongen retrouve le bonheur et la justesse d'expression de toiles plus anciennes (Petit Âne sur la plage, v. 1930, musée de Saint-Tropez). Son œuvre, dont le meilleur est antérieur à 1920, est demeurée fidèle à l'esprit comme aux moyens d'un Fauvisme nettement expressionniste, tout au long d'une évolution qui reste indifférente aux avatars de l'art contemporain.
Il prit la nationalité française en 1929 et s'installa à Monaco en 1959, dans une villa appelée le Bateau-Lavoir. On lui doit quelques écrits (la Hollande, les Femmes et l'Art, Paris, 1927 ; la Vie de Rembrandt, Paris, 1927 ; Peindre, conseils pratiques, Paris, 1937) et des lithographies pour les Lépreuses de Montherlant (1946), la Princesse de Babylone de Voltaire (1948), la Révolte des anges d'Anatole France (1951), dont il avait fait le portrait en 1917. Van Dongen est bien représenté à Paris (M. N. A. M.), à Saint-Tropez, à Nice, à Grenoble, à Montpellier, à Genève, à New York (M. O. M. A.) et dans les musées néerlandais.