Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Sluyters (Jan)

Peintre néerlandais (Bois-le-Duc 1881  – Amsterdam 1957).

Il se forme à l'École normale pour l'enseignement du dessin, puis à l'Académie des beaux-arts d'Amsterdam (1896) et est marqué d'abord par le Symbolisme à son déclin. Il se rend à Paris en 1904 avec Léo Gestel, voyage en Italie et en Espagne, revient à Paris en 1906. Pendant une dizaine d'années, son évolution reflète celle de la peinture contemporaine. Proche du Van Dongen fauve dans le rendu d'un soir de fête (Deux danseuses, 1906), puis ayant assimilé l'influence de Van Gogh, Sluyters adopte le pointillisme en 1907. À partir de 1908, il développe un style luministe, faisant jouer sur des paysages le soleil et ses rayons dans des jeux abstraits de couleurs selon un principe d'" orchestration colorée " (Paysage au clair de lune II, 1911, La Haye, Gemeentemuseum). Il se rallie au Cubisme en 1913, soumettant alors le motif à d'audacieuses analyses (Portrait cubiste d'une femme, 1914). Sa période la plus originale est celle de Staphorst (1915-1917), au cours de laquelle les stylisations issues de la discipline cubiste sont humanisées par l'expression pathétique d'un rude terroir, inspirée par celle du Van Gogh de Nuenen : Famille de paysans à Staphorst (1917, Haarlem, musée Frans Hals). Installé à Amsterdam en 1919, l'artiste renonce à l'austérité et pratique de nouveau la couleur claire de ses débuts. Peintre de portraits, de nus, d'intérieurs (la Famille du peintre, 1922, La Haye, Gemeentemuseum), son intimisme coloré est une variation hollandaise (à laquelle la leçon de Matisse n'est pas étrangère) de l'art détendu et aimable qui caractérise, partiellement, l'entre-deux-guerres et que Sluyters a prolongé jusqu'à la fin de sa carrière : Portrait de l'échevin Wibaut (1932), la Joie de peindre (1946, Amsterdam, Stedelijk Museum). Son œuvre a fait l'objet d'expositions rétrospectives au Stedelijk Museum d'Amsterdam en 1927 et en 1952.

Smith (Leon Polk)

Peintre américain (Chikasha 1906-Bennington, Vermont, 1965).

D'abord enseignant, Smith se familiarisa avec la peinture lors de ses séjours d'été à New York. Si ses premières œuvres sont figuratives et fort proches du Surréalisme, très vite il subit l'influence de Mondrian, dont il a découvert l'œuvre en 1936 lors de la visite de la collection Gallatin à New York. Il s'engage dans l'art abstrait en devenant dans un premier temps un héritier de Mondrian (Hommage to Victory Boogie-Woogie n° 2, 1946-47, The Fort Worth Art Museum) au même titre qu'Ilya Bolotowsky, Harry Holtzmann, Burgoyne Diller, Fritz Glarner et Charmion von Wiegand. Le Néoplasticisme a représenté pour Leon Polk Smith un champ d'investigation pour les problèmes d'organisation formelle de la toile. Il se dirigea pourtant vers des issues qui devaient le conduire à libérer le concept de l'espace de Mondrian, de manière à l'exprimer aussi bien avec la ligne courbe qu'avec la ligne droite. Il allait ainsi devenir l'un des créateurs du Hard Edge (Yellow Edge, 1954). En 1962 apparaît la série des Correspondances, dans laquelle l'artiste met en jeu les relations réciproques entre les champs colorés. La forme gagne son existence à travers la couleur, et la couleur la sienne à travers la forme. Les couleurs-formes sont complémentaires l'une à l'autre et les titres sont alors limités aux désignations des éléments constituant la toile : ainsi Correspondence Blue-Yellow, 1963, ou Correspondence Black white, 1967 (New York, Brocklyn Museum). À partir de 1967 apparaît une série dite Constellations, qui permet à Leon Polk Smith d'élargir son champ d'action, jusqu'alors limité au plan de la toile. L'utilisation de plusieurs panneaux aux formes découpées (" shaped canvas ") lui permet d'atteindre, au-delà du tableau, l'espace environnant. L'œuvre devient un objet tridimensionnel plutôt qu'une surface peinte (Constellation n° 5, 1972). En 1976, L. Smith créa une série où il retrouve les préoccupations de Malevitch en 1915 (Cross Roads, 1978). Les dernières peintures des années 80 sont souvent des monochromes aux formes géométriques simples qui donnent une nouvelle dimension au concept d'espace. Dans les Form Space Series, par exemple, l'artiste associe des toiles découpées d'une même couleur ou des panneaux de couleurs distinctes que l'on peut accrocher de diverses manières afin de créer des œuvres différentes. À partir de 1984 apparaissent des œuvres qui sont soulignées par des baguettes de bois noires non limitées au format des châssis mais se poursuivant sur le mur, lequel devient alors une partie de l'œuvre. Le tableau, sortant de son cadre habituel, s'ouvre à tout l'espace environnant (Americas, 1986).

   Smith a participé à toutes les grandes expositions de l'art abstrait géométrique américain et a connu en 1989 une rétrospective au Wilhelm-Hack Museum de Ludwigshafen et au musée de Grenoble.

Smith (sir Matthew)

Peintre britannique (Halifax 1879  – Londres 1959).

Il fit ses études à Manchester, à la Slade School de Londres et en France, où il fit un bref mais décisif séjour dans l'atelier de Matisse. En 1916, il se lia avec Sickert et Epstein et adopta le style des fauves (Fitzroy Street Nude n° 2, 1916, Londres, British Council). En 1919, il s'installa à Grez-sur-Loing et rencontra le peintre O'Conor, qui lui donna le goût des peintures hautes en couleur, ainsi ses paysages de Cornouailles exécutés en 1920-21 (Cornish Landscape, 1920, coll. part.). Dès cette période, ses œuvres relèvent d'un expressionnisme intense, d'une attaque radicale de la couleur, jusqu'alors inconnus dans l'art anglais. Il rencontra dans les années 20 le peintre Vera Cuningham. Elle deviendra le modèle d'une série de nus qui révèle l'unité entre les couleurs et les formes et une connaissance de l'art de Rubens (The Folling Model, 1926, coll. part.). Smith vécut surtout en France jusqu'en 1940, année où il regagna Londres. Des rétrospectives de ses œuvres eurent lieu à la Tate Gal. en 1953 et à la Royal Academy en 1960. Smith est représenté à Ottawa (N. G.) et, en Angleterre, à Oxford (Ashmolean Museum), à Londres (Courtauld Inst. et surtout Tate Gal.).