Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Gontcharova (Natalia Sergueïevna)

Peintre russe (Ladychkino, gouvernement de Toula, 1881  – Paris 1962).

Après des études de sculpture à l'École de peinture, de sculpture et d'architecture de Moscou, où elle est entrée en 1898 et où elle a travaillé dans l'atelier de sculpture de Paul Troubetskoï, Gontcharova se consacre à la peinture. Elle se lie avec Larionov, qu'elle ne quittera plus jusqu'à sa mort. Elle forme avec lui le couple phare de l'avant-garde russe, à l'initiative de tous les mouvements (Valet de carreau, Queue de l'Âne). Après avoir subi l'influence du fauvisme, elle opère un retour à l'art populaire, à l'icône et réalise des œuvres néo-primitivistes (Bûcherons, v. 1911 Paris, M. N. A. M.). En 1912-13, elle travaille en étroite collaboration avec les poètes futuristes Kroutchorykh et Khlebnikov (Jeu en enfer, Monde à rebours), et participe à la naissance du rayonnisme dont elle signe le manifeste en 1913 (Forêt constructive rayonniste, Stuttgart, Staastgalerie). Elle se rend à Paris en 1914 avec Larionov, expose avec lui chez Paul Guillaume et, à la demande de Diaghilev, s'emploie aux décors de ballet, sans pourtant abandonner la peinture de chevalet. Elle dessine en 1914 les décors et les costumes du Coq d'or de Rimski-Korsakov. En 1915, les deux artistes quittent la Russie à l'invitation de Diaghilev ; ils s'installeront définitivement à Paris en 1917. En 1916, à la suite d'un voyage en Espagne, elle crée ses hiératiques Espagnoles qui expriment son désir de retour à un folklore national. En 1922, elle réalise les décors et costumes du Mariage d'Aurore, en 1923 le rideau, les décors et les costumes des Noces de Stravinski et d'Une nuit sur le mont Chauve de Moussorgski, en 1926 ceux de l'Oiseau de feu de Stravinski, repris à Londres.

   En 1932, elle fournit les décors et les costumes de l'opéra-ballet de Michel Benoît On ne s'avise jamais de tout et ceux de la Foire de Sorotchintsys (Moussorgski), montée à Buenos Aires. Elle dessine des robes pour la maison Myrbor à Paris tout en préparant une nouvelle version du Coq d'or, présenté à Londres en 1937 par le colonel de Basil, auquel elle donnera l'année suivante les décors et les costumes de Cendrillon et Bogatyri. Expositions, décors de théâtre, livrets de ballet constituent alors son activité. Elle participe avec Larionov à l'exposition du Rayonnisme en 1948 organisée par Michel Seuphes et, en 1954, à l'" exposition Diaghilev " à Londres. Le lancement des spoutniks lui inspire des " compositions cosmiques " et elle prolonge les idées rayonnistes dans ses " bouquets de lumière ".

   Le M. N. A. M. de Paris possède une très importante collection d'œuvres de Gontcharova qui a donné lieu à une exposition en 1995.

Gonzalès (Éva)

Peintre français (Paris 1849  – id. 1883).

Fille de l'écrivain Emmanuel Gonzalès (1815-1887), elle fut l'élève de Chaplin, puis, en 1869, de Manet, dont elle subit l'influence. Celui-ci fit son portrait, exposé au Salon de 1870 (Londres, N. G.), où elle-même débutait avec éclat (l'Enfant de troupe, 1870, musée de Villeneuve-sur-Lot). Retirée à Dieppe pendant la guerre, Éva peignit des scènes d'intérieur assez sombres (le Thé ; Une loge aux Italiens [œuvre refusée au Salon de 1874], Paris, musée d'Orsay), des pastels plus clairs, comme la Nichée (id.), et exécuta quelques paysages avant sa mort survenue prématurément (Sur le seuil, 1878 ; les Oseraies, 1880, Dresde, Gg). Elle épousa en 1879 le graveur Henri Guérard.

Gonzalez-Torres (Felix)

Artiste américain (Cuba, 1957  – Miami 1996).

Felix Gonzalez-Torres appartient à la génération des jeunes artistes apparus sur la scène new-yorkaise au milieu des années 80. Son travail, d'une profonde cohérence sans être trop démonstratif, sollicite souvent la participation du spectateur qui entame l'intégrité de l'œuvre en emportant les feuilles de ses piles de papier ou les bonbons disposés en grappes ou en nappes sur le sol. Ses œuvres évolutives empruntent leur simplicité à la sculpture minimaliste dont le formalisme est ici largement détourné par l'utilisation de matériaux sensibles, affectifs et séduisants (bonbons, ampoules, rideaux, photographies.). La disparition est au cœur de cette œuvre, grave dans son propos, mais d'une extrême douceur dans sa forme, chargée d'une utopie participative et réconciliatrice qui traite en permanence du souffle éphémère de la vie. Le Guggenheim Museum de New York (1995) et le M. A. M. de la Ville de Paris (1996) lui ont consacré une importante rétrospective.

González (Bartolomé)

Peintre espagnol (Valladolid 1564  – Madrid 1627).

Élève de Pantoja de la Cruz et peintre du roi à partir de 1617, il est le dernier représentant de la tradition du portrait de cour du XVIe s. (Marguerite d'Autriche, 1609, Prado ; Philippe IV, enfant, Pitti), dont Antonio Moro avait été l'initiateur à la cour d'Espagne. D'autre part, dans ses tableaux religieux, il apparaît comme l'un des premiers adeptes, encore timide, du Naturalisme ténébriste (Saint Jean-Baptiste, 1621, musée de Budapest ; Profession du bienheureux Orozco, 1624, Madrid, Acad. S. Fernando).

González (Joan)

Peintre espagnol (Barcelone 1868  – id. 1908).

Étrange destin que celui de ce peintre sorti de l'ombre un demi-siècle après sa mort (exposition " les Trois González ", Paris, gal. de France, 1965 et 1971). Frère du sculpteur Julio González, Joan était l'aîné d'une famille de ferronniers de Barcelone. À la mort du père, la famille entière émigre à Paris (1897) et vend les ateliers. Les enfants, abandonnant la lime et le ciselet, se consacrent alors à la peinture, mais sans parvenir à en vivre. Dix ans plus tard, Joan, malade, retourne à Barcelone, où il meurt l'année suivante. C'est durant sa " période parisienne " qu'il donna le meilleur de lui-même ; ses dessins, gouaches et pastels, le plus souvent effectués en camaïeu (les Cinq Arbres, 1904, Paris, musée d'Orsay), rappellent étonnamment, par leur organisation formelle, les paysages de Kandinsky : les formes, souvent schématisées, les contrastes de clair-obscur et l'usage des cernes (Paysage tourmenté, 1904, id.), témoignent d'une recherche formelle qui s'inscrit bien dans la crise des valeurs figuratives de la première décennie du siècle.