Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Fleischmann (Adolf)

Peintre allemand (Esslingen  1892  – Stuttgart 1968).

Élève d'Adolf Hölzel à Stuttgart de 1911 à 1913, Adolf Fleischmann ne trouvera véritablement sa voie que tardivement, après avoir beaucoup voyagé. Vers 1938, au moment où il se fixe en France, ses compositions abstraites se révèlent assez proches de certaines œuvres des années 20 réalisées par Willi Baumeister. En 1939, Fleischmann participe à la première exposition des Réalités nouvelles organisée par le groupe Renaissance plastique. En 1946, il participe à la fondation du Salon des Réalités nouvelles. Il est assez proche de Georges Vantongerloo, comme le montrent la composition et la gamme colorée du tableau 1948 (1948, musée de Grenoble). En 1948, il a sa première exposition personnelle à Paris à la galerie Raymond Creuze, qui sera suivie en 1951 d'une exposition à la galerie Colette Allendy. L'artiste a trouvé son style, fait d'un système de lignes parallèles verticales et horizontales colorées, qui créent une mosaïque de plans dans laquelle interviennent des lignes en surimpression. L'ensemble est peint avec une facture relativement sensible dans une gamme sourde à base de gris (Composition n° 43, musée de Grenoble).

   En 1952, Fleischmann émigre aux États-Unis. Il participe à la fondation du groupe Espace. À partir de 1960, il réalisera également quelques reliefs qui rappellent la matière du carton ondulé.

   L'œuvre de Fleischmann est bien représentée dans les musées allemands, américains, à Paris au Musée national d'art moderne, ainsi qu'au musée de Grenoble.

Flémalle (Berthollet)

Peintre de l'école liégeoise (Liège 1614  – id.  1675).

D'abord élève d'Henri Trippet, il travailla à partir de 1623, au retour d'un voyage en Italie, dans l'atelier de G. Douffet. De 1638 à 1647, il voyagea en Italie (Rome, Florence), puis en France : à Paris, il participa à la décoration de l'hôtel Lambert (Sacrifice d'Iphigénie pour le cabinet de l'Amour, Louvre). De 1649 à 1651, il résida à Bruxelles, puis se fixa à Liège. Au cours d'un nouveau séjour à Paris en 1670, il fut reçu à l'Académie et réalisa pour les Tuileries une Allégorie. On connaît encore un bon nombre de ses tableaux, difficiles à dater, du reste : sujets religieux (la Fuite en Égypte, la Peste des Philistins, musée de Liège ; Adoration des bergers, musée de Caen ; Héliodore chassé du Temple, Bruxelles, M. R. B. A.), mythologiques (Achille blessé au talon, Stockholm, Nm) ou portraits (musées de Liège, de Bruxelles).

   Ses meilleures œuvres, comme la Lamentation sur le Christ mort (musée de Karlsruhe), témoignent d'un Classicisme à la manière de Poussin, qui prouve les liens de l'artiste avec le milieu parisien. Il eut comme élèves Carlier, Englebert Fisen et Lambert Blendeff.

fleurs

La peinture de fleurs est l'un des aspects essentiels de la nature morte. Découpage artificiel, elle se sépare difficilement, à certaines époques, d'autres aspects du genre, par exemple la peinture de fruits ou de jardins ; les plus anciens peintres de natures mortes, en Espagne ou en Italie, étaient autrefois désignés sous l'appellation générale de " peintres de fruits et de fleurs ". À nos yeux, aujourd'hui, les fleurs n'ont plus qu'un aspect décoratif ; mais il importe de rappeler le symbolisme religieux, érotique ou moral particulier qui s'attache à la représentation de certaines fleurs, l'amarante, le lis, l'œillet, la rose.

   Il faut distinguer l'art religieux de l'art profane. Dans le premier, les fleurs sont principalement utilisées dans des scènes du cycle marial, surtout dans la scène de l'Annonciation, où le bouquet de fleurs de lis et d'iris est le symbole de la pureté et de la royauté de Marie (début du XVe s.).

   Dans l'art profane, la fleur peut être l'attribut de Flore, de Zéphyre, de l'Aurore, du Printemps, de la Terre, de la Jeunesse, de l'Odorat, de la Dialectique, de la Vertu ; dans cette représentation allégorique, elle n'aura qu'une place secondaire. La fleur peut être aussi le symbole de la brièveté de la vie humaine et de la vanité des biens qu'elle nous propose : elle sera alors un des objets importants de la Vanité.

   Une question se pose à propos de la signification du bouquet de fleurs ; on sait qu'il peut être une allusion à un verset du Livre de Job : " Pareil à la fleur, l'homme s'épanouit et se fane, il s'efface comme une ombre... " Le pavot, la tulipe, l'œillet ou le reflet de la croisée de fenêtre sur le vase sont-ils autant de symboles de la brièveté de la vie ? Plusieurs critiques l'ont soutenu ; d'autres se refusent à soutenir des interprétations trop précises et systématiques.

L'Antiquité

Tous les historiens de la nature morte ont souligné la difficulté de retrouver ses origines. Les Crétois ont peint à fresque la fleur de lis sur des murs entiers. Pline l'Ancien rapporte une anecdote sur Pausias, qui, en rivalisant avec sa maîtresse Glycera de Sicyon, habile à tresser des guirlandes, " parvint à reproduire en peinture la variété extrême des nuances de fleurs ". Au temps d'Alexandre, les petits sujets de fleurs sont assez répandus pour que le peintre Nikias en condamne la pratique. Les générations grecques suivantes ont donné plus d'importance aux fleurs, témoin cette mosaïque du Vatican découverte dans la villa romaine des Quintilli du IIe s. apr. J.-C., copie romaine d'une œuvre hellénistique. C'est peut-être la première trace tangible d'une représentation de fleurs, et une trace de grande maturité à une époque qui porte la nature morte à un très haut niveau.

   La peinture de fleurs a peu de place à Herculanum et à Pompéi. Des 4 styles de la peinture murale, seul le troisième (Ier s. apr. J.-C.) offre quelques représentations de fleurs d'un style miniaturiste. Plus intéressante est la peinture de grotesques de la Domus Aurea, témoignage de l'habileté, répandue à Rome sous Néron, de peindre fruits et fleurs de façon décorative. Ces grotesques, découverts à la fin du XVe s., joueront un grand rôle dans la formation, pendant la Renaissance, d'une peinture indépendante de fleurs et de fruits.

Le Moyen Âge

Les fleurs ont un rôle important dans la naissance du genre de la nature morte. Deux moments se succèdent dans la représentation des fleurs, celui où le bouquet de fleurs est un symbole utilisé par le peintre et un des éléments, minime, de la scène religieuse (XIVe-XVe s.) et celui où le peintre sépare de la scène religieuse les symboles usuels pour leur donner une existence propre sous forme d'une nature morte symbolique (fin du XVe s.).

   Le bouquet de fleurs, symbole utilisé dans le cycle marial, nous intéresse surtout dans l'Annonciation ; c'est d'abord l'archange Gabriel qui tient le lis (Simone Martini) ; puis le lis, l'iris et l'ancolie sont réunis dans un bouquet posé à terre, entre l'archange et la Vierge (Broederlam, musée de Dijon ; Rogier Van der Weyden, Louvre, v. 1435 ; Barthélemy d'Eyck, église de la Madeleine, 1442-43). Le bouquet de fleurs est utilisé dans d'autres scènes de la vie de la Vierge peintes par exemple par J. Van Eyck (Madone au chanoine Van der Paele, 1436, musée de Bruges, où la Vierge tient un petit bouquet de fleurs), par R. Van der Weyden (Vierge avec quatre saints, v. 1450, Francfort, Städel. Inst., où l'on trouve un bouquet de fleurs au pied du trône). Mais les plus beaux vases de fleurs des primitifs sont ceux du Triptyque Portinari, de Hugo Van der Goes (v. 1476-1478, Offices).

   Les fleurs peuvent envahir le tableau et servir de véritable décor (Stephan Lochner, Vierge au buisson de roses, Cologne, W. R. M.) ; le Jardin du Paradis (Francfort, Städel. Inst.) permet d'évoquer les rapports avec la tapisserie dite " mille fleurs ". Le jardin de ce tableau est un véritable Hortus conclusus, jardin clos du Moyen Âge, où la Vierge, parmi les anges, est au milieu d'un jardin émaillé de fleurs, dont le style fait penser à celui de la tapisserie. Mentionnons, dans le domaine du décor monumental, un texte ancien sur l'appartement de la reine dans la galerie de Charles V (1364-1380) à l'hôtel Saint-Pol à Paris, qui rappelle la place des fleurs dans la peinture décorative : " Depuis le lambris jusques dans la voûte, était représentée sur un fond vert [...] une grande forêt pleine d'arbres et d'arbrisseaux, de pommiers, poiriers [...] et entremêlée de lis, de flambes, de roses et de toutes sortes d'autres fleurs : des enfans répandus en plusieurs endroits du bois y cueillaient des fleurs [...] " Plus rien ou presque de peinture décorative de ce genre ne subsiste. La tapisserie a repris, dans les mille fleurs, cette idée de vaste surface à couvrir par les fleurs.