Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
B

blanc

En peinture, de nombreux blancs ont été employés ; ils se subdivisent en deux catégories : les blancs amorphes, qui, mélangés à l'huile, perdent leur opacité et leur blancheur ; les blancs permanents. Les premiers comptent parmi eux le blanc de chaux à base de carbonate de calcium (blanc de Meudon, de Paris, d'Espagne), le blanc fixe pour gouache, obtenu par la précipitation du sulfate de barium, le blanc d'os, le blanc de coquilles. Le blanc de chaux a été utilisé par les peintres principalement dans la technique murale " a secco ", sous forme d'une sorte de mastic épaissi par un long séjour dans l'eau, et dans la technique de la fresque toscane, où on l'appelle " bianco San Giovanni " (blanc de Saint-Jean) : le peintre et écrivain d'art Cennino Cennini, dans son Libro dell'arte (Traité de la peinture), le décrit comme plus dense et plus brillant que le blanc de chaux, car, modelé en galettes de chaux, il a été à plusieurs reprises exposé à l'air libre et enrichi par l'action du dioxyde de carbone qui s'y trouve présent.

   Parmi les blancs permanents, le blanc de plomb, ou céruse, est à la fois le plus ancien des pigments artificiels et le plus célèbre ; dans la peinture à l'huile, ses qualités sont celles des meilleurs pigments : extrêmement dense et opaque, il a un fort pouvoir couvrant et sèche particulièrement vite. On l'obtient depuis la plus haute antiquité en soumettant le plomb à l'action corrosive des vapeurs de vinaigre ou d'acide acétique, ce qui produit la formation de carbonate et d'hydroxyde de plomb. Cependant, on doit lui reconnaître deux défauts principaux : le blanc de plomb est un poison dangereux, il a une tendance à noircir sous l'action des gaz sulfureux contenus dans l'atmosphère ; pour cela, il n'est pas employé en peinture murale : les blancs de la Crucifixion de Cimabue dans l'église supérieure d'Assise ont viré au noir. Les blancs de zinc ou de titane sont des pigments plus récents : non toxiques, ils ne jaunissent pas ; ils sont cependant d'une qualité inférieure à celle du blanc de plomb.

Blanchard (Jacques)

Peintre français (Paris 1600  – id. 1638).

Élève à Paris de Nicolas Bollery dès 1613, dans la tradition bellifontaine, il complète sa formation à Lyon auprès d'Horace Le Blanc (1620-1623) avant de se rendre en Italie, à Rome d'abord (1624-1626), puis à Venise (1626-1628). Il est de retour à Paris en 1629 après s'être arrêté une nouvelle fois à Lyon. Sa première œuvre connue, sans doute peinte dans cette ville, la Vierge et l'Enfant Jésus remettant les clefs à saint Pierre (cathédrale d'Albi, 1628), révèle déjà toutes les caractéristiques de son style : fine tête de la Vierge, au profil légèrement tourné vers le spectateur et au minuscule chignon, composition en frise à la vénitienne, accentuée par un éclairage en diagonale, coloris chaud et flou. L'artiste utilisera cette formule à de nombreuses reprises, non seulement dans de robustes portraits (Portrait d'homme, Detroit, Inst. of Arts) et dans quelques compositions religieuses sensibles aux exemples bolonais, mais aussi dans un grand nombre de Saintes Familles (Louvre, musées de Karlsruhe et de Cherbourg) et de Charités (Louvre ; Londres, Courtauld Inst.), qui sont autant de variations sur un même thème. Mais, par deux fois durant sa brève carrière, dans sa Vénus et les Grâces surprises par un mortel du Louvre et l'Angélique et Médor du Metropolitan Museum (tableaux exécutés v. 1634-1635 ?), il l'amplifiera, créant de véritables chefs-d'œuvre. Le souvenir des nus de l'école de Fontainebleau n'est pas absent, mais se trouve mêlé à l'influence de Venise, en particulier à celle de Véronèse : même clarté du coloris, même goût pour les contrastes des ombres et des chatoiements de la lumière, même lyrisme voluptueux, qui explique le surnom de " Titien français " que donnent à Blanchard ses biographes anciens. La Bacchanale du musée de Nancy (1636) résume toutes les aspirations de l'artiste et place sa production aux côtés de celle de Jan Liss. La note originale de l'œuvre de Blanchard réside dans sa robuste sensualité ; mieux encore que Vouet, le peintre sait animer l'élégance intellectuelle du monde féminin de Primatice, lui donnant un aspect de vérité quotidienne, qui n'est pas sans rappeler les recherches de Rubens et de Jordaens.

   L'activité de Blanchard ne se limite pas aux tableaux de chevalet. Comme tous les grands peintres de son temps, il décore des hôtels particuliers. Vers 1631, il orne la petite galerie puis le cabinet de l'hôtel Le Barbier de sujets mythologiques et de paysages, dont le succès provoque en 1634 la commande de la galerie basse de l'hôtel Bullion (les mois évoqués par des divinités antiques, cadres et termes en trompe-l'œil imitant la sculpture) l'année même où il peint le may de Notre-Dame.

Blanchard (Maria Gutierrez Blanchard, dite Maria)

Peintre espagnol (Santander 1881  – Paris 1932).

De père espagnol et de mère franco-polonaise, elle naquit infirme. Bossue, d'une santé fragile, elle lutta avec un grand courage contre un destin presque toujours contraire. Après des études à Madrid, sous la direction de peintres académiques comme Sotomayor, elle part pour Paris en 1908 et travaille à l'Académie Vitti avec Van Dongen. Revenue en Espagne de 1913 à 1916, où elle ne réussit pas à s'imposer, elle repart pour la France et se lie avec Juan Gris et Metzinger, dont l'influence sera décisive sur son art. À partir de 1919, soutenue par la gal. Rosenberg, elle connaît un succès croissant, bien que toujours limité à une élite. Comme André Lhote, dont les critiques très lucides contribuèrent à sa renommée, et La Fresnaye, elle resta fortement marquée par le Cubisme ; mais celui-ci fut pour elle une discipline constructive, qui ne l'éloigna jamais de la peinture de la vie. Le souci de l'architecture et de l'équilibre des masses s'allie dans son œuvre à " une couleur austère et métallique ", à des lumières " excessives et miroitantes " (Lhote) et à un sentiment grave et mélancolique, qui donne un accent très personnel à ses thèmes préférés : intimité familiale (Brodeuse, Maternité), enfance (Fillette se peignant, Communauté, Enfant au ballon), natures mortes.

   L'exposition espagnole de 1937, au Jeu de paume, où elle figura avec 12 toiles, constitua une sorte d'hommage posthume et la révéla au grand public. Maria Blanchard est représentée par plusieurs œuvres à Paris (M.N.A.M. et M.A.M. de la Ville) et au musée de Grenoble.