L'HERBIER (Marcel) (suite)
Entre 1920 et 1928, tournant pour Gaumont d'abord, pour sa propre société (Cinégraphic, 1923-1928) ensuite, L'Herbier illustre la première avant-garde. Eldorado (1921) est son chef-d'œuvre, qui anticipe le Kammerspiel. Les moyens propres du cinéma : la lumière et les ombres, les déformations, les flous, les surimpressions visualisent les états psychologiques des personnages, l'atmosphère morale des lieux, la violence du drame. Beaucoup plus ambitieux, fourmillant d'inventions brillantes mais disparates, l'Inhumaine (1924) et l'Argent (1929) couronnent la période muette de l'auteur. Le parlant venu, L'Herbier renonce à tout avant-gardisme. Deux filons, également commerciaux, se partagent alors l'essentiel de sa production : une série « russe », non toujours dépourvue de charme, qui se souvient de l'école russe de Montreuil ; une série patriotique, militaire, maritime et coloniale, dont le discours spontanément nationaliste et petit-bourgeois, devenu criant avec le recul des ans, situe Marcel L'Herbier comme l'un des plus politiques parmi les cinéastes français de l'époque. À la veille du second conflit mondial, Entente cordiale (1939), édifiée sur l'amitié franco-anglaise, sera un parfait film de mobilisation. Après la Comédie du bonheur (1940-1942), où les formes brillent moins que les thèmes, la Nuit fantastique (1942), raffinée, subtile, alimente ce courant d'évasion poétique (Méliès et musée Grévin, arcanes postsurréalistes) qui a marqué le cinéma français de l'Occupation. En 1943, L'Herbier fonde l'IDHEC. L'après-guerre voit l'enlisement définitif de sa carrière cinématographique. De 1952 à 1973, il se consacrera à la télévision.
Films :
Phantasmes (CM, inachevé, 1918) ; Rose France (1919) ; le Bercail (CM, id.) ; le Carnaval des vérités (1920) ; l'Homme du large (id.) ; Villa Destin (1921) ; Eldorado (id.) ; Prométhée banquier (1922) ; Don Juan et Faust (id.) ; Résurrection (1923, inachevé) ; l'Inhumaine (1924) ; Feu Mathias Pascal (1925) ; le Vertige (1926) ; le Diable au cœur (1928) ; l'Argent (1929) ; Nuits de prince (1930) ; l'Enfant de l'amour (id.) ; la Femme d'une nuit (1931) ; le Mystère de la chambre jaune (id.) ; le Parfum de la dame en noir (id.) ; l'Épervier (1933) ; le Scandale (1934) ; l'Aventurier (id.) ; le Bonheur (1935) ; la Route impériale (id.) ; Veille d'armes (id.) ; les Hommes nouveaux (1936) ; la Porte du large (id.) ; la Citadelle du silence (1937) ; Nuits de feu (id.) ; Forfaiture (id.) ; Adrienne Lecouvreur (1938) ; Terre de feu (id.) ; la Tragédie impériale (id.) ; Entente cordiale (1939) ; la Brigade sauvage (id.) ; Histoire de rire (1941) ; la Comédie du bonheur (1942 [RÉ : 1940]) ; la Nuit fantastique (1942) ; l'Honorable Catherine (1943) ; la Vie de bohême (1945 [RÉ 1942]) ; Au petit bonheur (1946) ; l'Affaire du collier de la reine (id.) ; la Révoltée (1949) ; les Derniers Jours de Pompéi (1950) ; le Père de Mademoiselle (CO Robert Paul Dagan, 1953).