TRINTIGNANT (Jean-Louis) (suite)
En 1959, il se reconstruit, d'abord au théâtre dans un Hamlet qui a fait date, puis à l'écran, à la fois en France (dans les Liaisons dangereuses 1960 de Vadim) et en Italie (dans Été violent de Zurlini). Et, depuis 25 ans, il alterne les tournages des deux côtés des Alpes, dirigé dans les studios romains notamment par Risi, Bertolucci, Comencini et surtout Scola.
Le Trintignant du début des années 60 joue sur la fragilité, sur une gentillesse tendre, sur un sourire déconcertant, ou sur une dureté coupante — celle qu'Alain Cavalier a su découvrir en lui confiant le rôle du militant d'extrême droite du Combat dans l'île (1962). Avec l'âge, la fragilité s'estompe, la dureté se fait complexe, se nuance dans des compositions discrètes et efficaces. Trintignant n'est pas un comédien à effets. Il construit des personnages subtils avec une grande sûreté : le petit juge inflexible de Z, puis l'ingénieur catholique de Ma nuit chez Maud (E. Rohmer), en 1969, le consacrent.
Plus tard, il saura enrichir encore ses créations, ajoutant à nombre de rôles un dessèchement sarcastique, une raideur construite : il joue les antihéros tourmentés, il est souvent le policier implacable ou le tueur froid. En 1984, son physique devenu anguleux lui permet de composer un président de la République crédible (il est le premier acteur français à endosser ce rôle) dans le Bon Plaisir de Francis Girod.
Deux singularités enrichissent encore sa carrière. Il a été, à quatre reprises, dirigé par son épouse Nadine Marquand Trintignant, dans Mon amour, mon amour (1967), le Voleur de crimes (1969), Défense de savoir (1973) et le Voyage de noces (1976). Et puis, il est passé deux fois derrière la caméra, réalisant, en 1973, Une journée bien remplie et, en 1979, le Maître nageur. Deux films originaux, où l'humour nonchalant de l'auteur tempère une vision fort noire de l'espèce humaine. Il y a du moraliste désabusé chez le cinéaste Trintignant.
Films :
Si tous les gars du monde (Christian-Jaque, 1956) ; la Loi des rues (Ralph Habib, id.) ; Et Dieu créa la femme (R. Vadim, id.) ; Club de femmes (Habib, id.) ; les Liaisons dangereuses 1960 (Vadim, 1959) ; Été violent (V. Zurlini, id.) ; Austerlitz (A. Gance, 1960) ; la Millième Fenêtre (Robert Mennegoz, id.) ; Pleins Feux sur l'assassin (G. Franju, 1961) ; le Cœur battant (J. Doniol-Valcroze, id.) ; l'Atlantide (E. G. Ulmer, id.) ; le Jeu de la vérité (R. Hossein, id.) ; les Sept Péchés capitaux (sketch de J. Demy, id.) ; Horace 62 (André Versini, 1962) ; le Combat dans l'île (A. Cavalier, id.) ; le Fanfaron (D. Risi, id.) ; Il sorpasso (Mauro Morassi, 1963) ; Château en Suède (Vadim, id.) ; les Pas perdus (Jacques Robin, 1964) ; la Bonne Occase (M. Drach, id.) ; Mata Hari, agent H 21 (Jean-Louis Richard, id.) ; Io uccido, tu uccidi (sketch : La donna che viveva sola, G. Puccini, 1965) ; Merveilleuse Angélique (Bernard Borderie, id.) ; Compartiment tueurs (Costa-Gavras, id.) ; la Longue Marche (A. Astruc, 1966) ; le 17e Ciel (Serge Korber, id.) ; Un jour à Paris (CM, Korber, id.) ; Paris brûle-t-il ? (R. Clément, id.) ; Un homme et une femme (C. Lelouch, id.) ; Safari diamants (Drach, id.) ; Trans-Europ-Express (A. Robbe-Grillet, id.) ; Mon amour, mon amour (N. Trintignant, id.) ; En cinquième vitesse (T. Brass, 1967) ; Un homme à abattre (Philippe Condroyer, id.) ; La mort a pondu un œuf (La morte ha fatto l'uovo, Giulio Questi, 1968) ; l'Homme qui ment (Robbe-Grillet, id.) ; les Biches (C. Chabrol, id.) ; le Grand Silence (S. Corbucci, id.) ; l'Amour à cheval (La matriarca, P. Festa Campanile, id.) ; le Voleur de crimes (N. Trintignant, 1969) ; Z (Costa-Gavras, id.) ; Disons, un soir à dîner (G. Patroni Griffi, id.) ; Ma nuit chez Maud (É. Rohmer, id.) ; Si douces, si perverses (Cosi dolce, cosi perversa, Umberto Lenzi, id.) ; l'Américain (M. Bozzuffi, id.) ; l'Opium et le Bâton (Ahmed Rachedi, id.) ; les Bonnes Intentions (Las secretas intenciones, Antonio Eceiza, id.) ; le Conformiste (B. Bertolucci, 1970) ; le Voyou (Lelouch, id.) ; Sans mobile apparent (Philippe Labro, 1971) ; la Course du lièvre à travers les champs (R. Clément, 1972) ; l'Attentat (Y. Boisset, id.) ; Un homme est mort (J. Deray, 1973) ; le Train (P. Granier-Deferre, id.) ; les Violons du bal (Drach, 1974) ; le Mouton enragé (M. Deville, id.) ; Glissements progressifs du plaisir (Robbe-Grillet, id.) ; l'Escapade (M. Soutter, id.) ; le Secret (R. Enrico, id.) ; l'Agression (G. Pirès, 1975) ; le Jeu avec le feu (Robbe-Grillet, id.) ; Flic Story (Deray, id.) ; Il pleut sur Santiago (H. Soto, id.) ; la Femme du dimanche (L. Comencini, id.) ; le Voyage de noces (N. Trintignant, 1976) ; l'Ordonnateur des pompes funèbres (Pirès, id.) ; le Désert des Tartares (Zurlini, 1976) ; les Passagers (Serge Leroy, 1977) ; l'Affaire (Marco Pico, id.) ; Repérages (Soutter, id.) ; l'Argent des autres (Ch. de Chalonge, 1978) ; le Maître nageur (J.-L. Trintignant, 1979) ; Melancoly Baby (Clarisse Gabu, id.) ; la Terrasse (E. Scola, id.) ; la Banquière (F. Girod, 1980) ; Je vous aime (C. Berri, id.) ; Un assassin qui passe (Michel Vianey, 1981) ; Malevil (de Chalonge, id.) ; Passion d'amour (Scola, id.) ; Une affaire d'hommes (Nicolas Ribowski, id.) ; Eaux profondes (Deville, id.) ; le Grand Pardon (A. Arcady, 1982) ; la Nuit de Varennes (Scola, id.) ; Boulevard des assassins (Boramy Tioulong, id.) ; la Crime (Labro, 1983) ; Vivement dimanche ! (F. Truffaut, id.) ; Under Fire (id., R. Spottiswoode, id.) ; Colpire al cuore (G. Amelio, id.) ; le Bon Plaisir (Girod, 1984) ; Viva la vie (Lelouch, id.) ; Femmes de personne (Christopher Frank, id.) ; l'Été prochain (N. Trintignant, 1985) ; Partir, revenir (Lelouch, id.) ; Rendez-vous (A. Téchiné, id.) ; David, Thomas et les autres (Sortüz egy tekete bivalyert, Laszlo Szabo, id.) ; l'Homme aux yeux d'argent (P. Granier-Deferre, id.) ; Un homme et une femme, vingt ans déjà (C. Lelouch, 1986) ; la Femme de ma vie (Régis Wargnier, id.) ; le Moustachu (Dominique Chaussois, 1987) ; la Vallée fantôme (A. Tanner, id.) ; Bunker Palace Hôtel (Enki Bilal, 1989) ; Merci la vie (B. Blier, 1991) ; l'Œil écarlate (Dominique Roulet, 1992) ; Regarde les hommes tomber (Jacques Audiard, 1994) ; Trois Couleurs : Rouge (K. Kieśłowski, id.) ; Fiesta (Pierre Boutron, 1995) ; Tykho Moon (Enki Bilal, 1996) ; Un héros très discret (J. Audiard, id.) ; Ceux qui m'aiment prendront le train (P. Chéreau, 1998).