YOUNG (Victor)
musicien américain (Chicago, Ill., 1900 - Palm Springs, Ca., 1956).
Ancien enfant prodige et concertiste, diplômé du conservatoire de Varsovie (sa famille est d'origine polonaise), il entre à la Paramount en 1936 et y devient l'équivalent de Max Steiner à la Warner, de Herbert Stothart à la MGM. Sa musique est brillante, richement orchestrée, peu compliquée et très souvent sentimentale, marquée par l'influence de Tchaïkovski. Elle verse parfois vers un romantisme un peu appuyé, mais possède souvent un charme réel, comme sa partition pour la Falaise mystérieuse (L. Allen, 1945), pour L'aventure vient de la mer (M. Leisen, id.) ou pour Sous le plus grand chapiteau du monde (C. B. De Mille, 1952). Ses dernières compositions, modestes, sont les plus belles : Johnny Guitare (N. Ray, 1954), le Jugement des flèches (S. Fuller, 1956). On peut citer d'autres titres : Une nation en marche (F. Lloyd, 1937) ; l'Esclave aux mains d'or (R. Mamoulian, 1939) ; les Tuniques écarlates (De Mille, 1940) ; les Conquérants d'un Nouveau Monde, id., 1947) ; Rio Grande (J. Ford, 1950) ; l'Homme tranquille (id., 1952) ; Scaramouche (G. Sidney, id.) ; l'Homme des vallées perdues (G. Stevens, 1953) ; Strategic Air Command (A. Mann, 1955) ; le Tour du monde en 80 jours, pour lequel il re¸coit l'Oscar (M. Anderson, 1956).
YOUSSOV (Vadim) [Vadim Ivanovič Jusov]
chef opérateur soviétique (Klav'lino 1929).
Diplômé de la faculté de prise de vues du VGIK (1954), il est directeur de la photographie en 1957, et se signale à l'attention par son travail sur le Rouleau compresseur et le Violon, premier film de Tarkovski, pour lequel il réalise ensuite les images intensément dramatiques de l'Enfance d'Ivan, puis les admirables ciselures en noir et blanc d'Andrei Roublev, et encore les images de Solaris. Il a également collaboré à trois comédies de Danelia (Je m'balade dans Moscou, 1963 ; Ne sois pas triste, 1969 ; le Gaŗcon perdu, 1973), à deux épopées historiques de Bondartchouk (Ils ont combattu pour la patrie, 1975 ; les Cloches rouges, 1983) et au feuilleton de TV de Koulidjanov, ‘ les Années de jeunesse de Karl Marx ’ (1980). Il a également signé les images raffinées du film d'Ivan Dykhovitchny, le Moine noir (Černyj monah, 1988), prix de la meilleure photographie à la Mostra de Venise et signé la photo de la co-production franco-soviétique de G. Daniela : Passeport (1989).
YOUTKÉVITCH (Sergueï) [Sergej Iosifovič Jutkevič]
cinéaste soviétique (Saint-Pétersbourg 1904 - Moscou 1985).
Sa famille, de bourgeoisie intellectuelle, se réfugie en Ukraine aux débuts de la guerre civile. À Kiev, il se lie avec Grigori Kozintsev. Ils peignent des décors, ouvrent leur premier théâtre. Il a quatorze ans ! Bientôt, à Petrograd, ils fonderont la FEKS (1921) ; ils exposeront toiles, collages et affiches aux côtés de Tatline et de Malévitch. 1921-22 : Youtkévitch partage la débordante activité théâtrale d'Eisenstein, qu'il a rencontré aux cours de Meyerhold. (Au Proletkult, Eisenstein lui confie un cycle de conférences sur les lois de construction du film d'aventures et du roman policier.) Ensemble, ils composent pour la FEKS une pantomime, la Jarretière de Colombine (1922) où apparaissent les « attractions scéniques ». 1925-26 : Youtkévitch anime un spectacle de cabaret, la Blouse bleue, un « journal vivant ». Il aborde le cinéma en 1924, mais il n'abandonnera jamais le théâtre. Débutant à Moscou comme assistant réalisateur, il tourne par un pur hasard le court métrage À nous la radio ! (1925), parodie futuriste-expressionniste des films d'aventures américains. Décorateur et assistant d'Abram Room pour le Traître (1927) et Trois dans un sous-sol (id.), son décor parfaitement fonctionnel et « psychologique » fait merveille pour la vérité du second film cité, et les quelques séquences qu'il filme signalent déjà sa manière future : un picturalisme impressionniste raffiné (qu'il avoue inspiré de Jean Epstein). Ce même esthétisme qualifie ses deux premiers longs métrages muets : Dentelles (1928) et la Voile noire (1929), et son premier sonore : Montagnes d'or (1931), films qu'on accusera un peu vite de « formalisme » : l'art n'a-t-il pas aussi pour fonction d'ennoblir le quotidien ? Le cinéma n'est-il pas un art figuratif ? Profondément marqué par l'esprit d'avant-garde — une avant-garde largement ouverte sur l'Occident — Youtkévitch ne se pliera pas sans efforts aux exigences mouvantes du cinéma soviétique. Il lui faudra conjuguer concessions et résistances, audace et académisme, accepter les commandes et ruser avec les tabous. (Néanmoins, Švejk s'en va-t-en guerre et Lumière sur la Russie ne seront jamais distribués.) Il touchera à tous les genres : cinéma de poésie, réalisme socialiste qu'il inaugure quasiment avec Contre-Plan ; documentaires lyriques, la France libérée, Salut Moscou, à la manière du Vertov de Trois Chants sur Lénine ; films de poupées (les Bains) ; transpositions théâtrales (Othello) ; biographies (Yakov Sverdlov, Skander Beg) ; burlesque caricatural (les Nouvelles Aventures du brave soldat Švejk) ; films de maquettes entre la gravure et le dessin d'animation mais habitées par des vivants (Un amour de Tchekhov). Il illustrera, avec un bonheur très variable, toutes les possibilités du montage. Il ne reniera pas sa jeunesse. Dans les six films qu'il a consacrés à la vie de Lénine, il a refusé de « jouer le monument », se conformant au précepte de Marx : « Pas de cothurne aux pieds ni d'auréole autour de la tête. » Son thème dominant est la transformation psychologique d'un individu qui travaille à s'insérer dans la nouvelle réalité soviétique et à y devenir un leader, ce qui est, au fond, sa propre histoire.
Films ▲ :
À nous la radio ! (Daëš' radio, CM, 1925) ; Dentelles (Kruževa, 1928) ; la Voile noire (Čërnyj parus, 1929) ; Montagnes d'or (Zlatye gory, 1931) ; Contre-Plan (Vstrečnyj, CO F. Ermler, 1932) ; Ankara, cœur de la Turquie (Ankara, serace Turcii, DOC, CO L. Arnchtam, 1934) ; Ceux de la mine (Šahtëry, 1937) ; Comment va voter l'électeur (Kak budet golosovat‘ izbiratel', DOC, id.) ; l'Homme au fusil (Čelovek s ruž'ëm, 1938) ; Yakov Sverdlov (Jakov Sverdlov, 1940) ; Ciné-recueil de guerre no 7 (Boevoj kinosbornik no 7, 1941) ; Švejk s'en va-t-en guerre (Švejk gotovitsja k boju, 1942, non distribué) ; Nouvelles Aventures du brave soldat Švejk (Novye pohoždenija Švejka, 1943) ; la France libérée (Osvoboždënnaja Francia, DOC, 1945) ; Salut Moscou (Zdravstvuj Moskva !, DOC, 1946) ; Jeunesse de notre pays (Molodost' našej strany, DOC, id.) ; le Carillon du Kremlin / Lumière sur la Russie (Svet nad Rossiej, 1947, non distribué) ; Trois Rencontres (Tri vstreči, CO A. Ptouchko et V. Poudovkine, 1950 [RÉ 1948]) ; Prjevalski (Prževal' skij, 1952) ; Skander Beg (Velikij voin Albanii Skanderbeg, 1954) ; Othello (Otello, 1956) ; le Poète Yves Montand (Poët Iv Montan, CO M. Sloutski, 1957) ; Récits sur Lénine (Rasskazy o Lenine, 1958) ; Rencontre avec la France (Vstreča s Franciej, DOC, 1960) ; les Bains (Banja, CO Anatolij Karanovitch, 1962) ; Lénine en Pologne (Lenin v Pol'še, 1966) ; O samom čelovečnom (DOC, 1967) ; Un amour de Tchekhov (Sjužet dlja nebol'šogo rasskaza, 1969) ; Maïakovski rit (Majakovskij smeëtsja, CO A. Karanovitch, 1975) ; Lénine à Paris (Lenin v Pariže, 1981).