MORRIS (Oswald)
chef opérateur britannique (Ruislip, Middlesex, 1915).
Il se fait connaître grâce à la perfection formelle de plusieurs films de John Huston : Moulin-Rouge (1953) ; Plus fort que le diable (1954) ; Moby Dick (1956) ; Dieu seul le sait (1957) ; les Racines du ciel (1958) ; Reflets dans un œil d'or (1967) ; l'Homme qui voulut être roi (1975). Tony Richardson l'associe à l'expérience du Free Cinema avec les Corps sauvages (1959) et le Cabotin (1960). Autres réussites : l'Adieu aux armes (K. Vidor, 1957) ; les Canons de Navarone (J. Lee Thompson, 1961) ; Lolita (S. Kubrick, 1962) ; la Colline des hommes perdus (S. Lumet, 1965) ; la Mégère apprivoisée (F. Zeffirelli, 1967) ; le Limier (J. Mankiewicz, 1972) ; Sherlock Holmes attaque l'Orient-Express (H. Ross, 1976). En 1971, il reçoit un Oscar pour la photo d'Un violon sur le toit de Norman Jewison.
MORRISSEY (Paul)
cinéaste américain (New York, N. Y., 1939).
Il étudie à la Fordham University et travaille un temps dans les assurances. Au début des années 60, il confectionne des courts métrages indépendants : Taylor Mead Dances (1963), Civilization and Its Discontents (1964). Il rencontre alors Andy Warhol, avec qui il collabore quelques années. Paul Morrissey aime le cinéma hollywoodien. Il oblige peu à peu Warhol à structurer ses œuvres. Assistant sur My Hustler (1965) et The Chelsea Girls (1966), il devient opérateur et monteur de Lonesome Cowboys (1968). L'éducation catholique de Morrissey transparaît dans son aversion avouée pour les individus qui forment le milieu avant-gardiste dans lequel il évolue : homosexuels, drogués... Pourtant, il dépeint cet univers dans les deux premiers films dont il assume l'entière responsabilité : Flesh (1968), Trash (1970). Le mélange de répulsion et de fascination pour les sujets piégés par la caméra donne naissance à des œuvres ambiguës que la critique prend alors pour le manifeste d'une génération. Avec Heat (1972), Morrissey se rapproche déjà du cinéma hollywoodien. Il dirige un pastiche sur un groupe de travestis (Women in Revolt, 1972) et une comédie sophistiquée (l'Amour, 1973) avec Andy Warhol. Le célèbre artiste pop sert encore de prête-nom aux deux films d'épouvante que Morrissey conçoit par la suite : Chair pour Frankenstein (Flesh for Frankenstein / Andy Warhol's Frankenstein, 1974) — pour lequel il utilise le système du relief en 3 D — et Du sang pour Dracula (Blood for Dracula / Andy Warhol's Dracula, id.). Le cinéaste fait encore une incursion dans le fantastique avec The Hound of the Baskervilles (1975), tourné en Grande-Bretagne. Paul Morrissey revient à la description des marginaux dans Madame Wang (1980), New York 42e rue (Forty Deuce, 1981), une adaptation de la pièce Off Broadway d'Alan Browne, ou dans Cocaïne (Mixed Blood, 1984). Il change radicalement de genre en 1985 avec le Neveu de Beethoven.
MOSCHIN (Gaston)
acteur italien (San Giovanni a Lupatoto, Vérone, 1929).
En 1955, il obtient le diplôme de l'Accademia d'arte drammatica de Rome et s'affirme comme un interprète populaire au théâtre puis à la télévision. Il débute au cinéma dans la Rivale (Anton Giulio Majano, 1955), et il crée dans plus de 50 films un personnage corpulent et sympathique. Parmi ses meilleures réussites : La rimpatriata (D. Damiani, 1963) ; Sept Hommes en or (M. Vicario, 1965) ; Ces messieurs dames (P. Germi, 1966) ; le Harem (M. Ferreri, 1967) ; le Conformiste (B. Bertolucci, 1971) ; Mes chers amis (M. Monicelli, 1975) ; le Parrain, 2e partie (F. F. Coppola, 1974).
MOSJOUKINE (Ivan Ilitch) [Ivan Il'ič Mozžuhin]
acteur russe (Penza 1889 - Neuilly-sur-Seine, France, 1939).
L'une des premières, sinon la première star masculine du cinéma. Fils d'une famille de grands propriétaires terriens d'ancienne noblesse, il entreprend, pour obéir à son père, des études de droit à l'université de Moscou, puis s'enfuit à Kiev, résolu à devenir comédien. Il se joint à une troupe amie, partage ses tournées en province, rentre enfin à Moscou. Il jouera au Théâtre populaire et au Théâtre dramatique « un peu de tout » : répertoire russe, boulevard européen. Il débute au cinéma en 1909 auprès des studios Khanjonkov. Il se signale dès son premier vrai rôle, celui de Troukhatchevski, le séducteur violoniste de la Sonate à Kreutzer (Krejcerova Sonata, P. Tchardynine, 1911). Il tourne avec les principaux cinéastes de l'époque : Vladislav Starevitch, Vassili Gontcharov, Petr Tchardynine et, particulièrement, Evguéni Bauer. Ce dernier lui permet de révéler son puissant tempérament et d'atteindre à une grande intensité et une grande sobriété de jeu dans des mélodrames romantiques, « sataniques », « décadents », aux éclairages et aux décors raffinés (Dans la chambre de la jeune fille [Djaduškina kvartira], 1913 ; la Vie dans la mort [Žizn'v smerti], 1914). Sobriété très spéciale au demeurant : ce plus grand naturel est recherché par l'acteur au travers d'une convention avouée, d'une permanente composition, « le visage est sur un masque » (Leonardo Sciascia).1915 : après une quarantaine de films, dont 11 dirigés par Bauer (1913 - été 1915), Mosjoukine, non mobilisé (ou selon d'autres sources mobilisé dans l'artillerie, blessé, réformé), entre à la firme Ermoliev. Il va s'affirmer, sous la direction de Yakov Protazanov, comme le plus grand et le plus populaire acteur du cinéma russe. Parmi les vingt films qu'il interprète pour Protazanov, c'est dans la Dame de pique (Pikovaja dama, 1916) et plus encore le Père Serge (Otec Sergij, 1918) qu'il parvient à la plus haute création, sur un registre réaliste inusité. À la fin de 1918, fuyant la révolution et les prévisibles nationalisations, Ermoliev transfère ses studios à Yalta. Mosjoukine y tourne deux films. En 1920, la troupe Ermoliev émigre. En France, épaulée par la société Pathé, elle sera au départ de l'« école russe de Montreuil ». Mosjoukine renoue avec la gloire, se surpasse dans des films esthétiquement ambitieux : Kean d'Aleksandr Volkov (1924), le Lion des Mogols de Jean Epstein (id.), Feu Mathias Pascal de Marcel L'Herbier (1925). Il aborde aussi la mise en scène avec deux œuvres insolites revendiquées par la première avant-garde : l'Enfant du carnaval (1921, où il joue également le rôle principal, interprétation qu'il reprendra en 1934 sous la direction cette fois de Volkov) et surtout, naviguant entre rêve et veille avec de subtiles liaisons parapsychanalytiques, le Brasier ardent (1923) dont il est également l'interprète principal. Après une expérience hollywoodienne (The Surrender, Edward Sloman, 1927) qui tourne court et une malencontreuse opération de chirurgie esthétique qui dépersonnalise son visage, il apparaît dans cinq films médiocres réalisés à Berlin pour la UFA (1928-1930). Mosjoukine voit sa carrière sombrer à l'avènement du cinéma parlant. La Mille et Deuxième Nuit (A. Volkov, 1933), les Amours de Casanova (René Barberis, id., une nouvelle interprétation d'un personnage qu'il avait déjà joué en 1927 dans le Casanova de Volkov) sont des demi-succès. Il n'a qu'un rôle secondaire dans Nitchevo (J. de Baroncelli, 1936). Il vivra trois années encore mais d'expédients et s'éteindra dans la misère, après une longue maladie.