STAREVITCH (Wladyslaw Alexandrovitch Starewicz, dit Ladislas) (suite)
Fuyant la famine, Starevitch s'établit en France en 1919 et se consacre, à partir de 1921, exclusivement à l'art de la marionnette. À cet effet, il crée un studio à Fontenay-sous-Bois, où il réside. En artisan méticuleux, aidé de ses filles (Irène qui collabore à la fabrication de certains de ses films, Nina qui donne la réplique aux poupées dans ceux des années 20 — cf. : la Voix du rossignol, 1923), il confectionne une œuvre unique en son genre, dont les modèles iconographiques se retrouvent chez des cinéastes aussi divers que Joseph von Baky (les Aventures du baron de Munchhausen [Munchhausen], 1943), Michael Powell et Emeric Pressburger (les Contes d'Hoffmann [The Tales of Hoffmann], 1951) ou Aleksandr Ptouchko (le Tour du monde de Sadko [Sadko], 1952). À l'exception du Roman de Renart (1928-1931), Starevitch n'a à son actif que des courts métrages : l'Épouvantail (1921), le Mariage de Babylas (id.), les Grenouilles qui demandent un roi (1923), Dans les griffes de l'araignée (1924), les Yeux du dragon (1927), le Rat des villes et le Rat des champs (id.), la Petite Parade (1929)... et, en Allemagne, Der verzauberte Wald (1928), Die Wunderuhr (id.). Il s'agit de fables imagées puisées, le plus souvent, chez des conteurs comme La Fontaine. Une formation scientifique alliée à une solide connaissance des techniques du 7e art permettent à Starevitch d'animer ses figurines de manière très fluide (mouvements des yeux, de la bouche, des antennes...), encore inédite à l'époque. Son bestiaire rappelle parfois celui du dessinateur Grandville. Habile pionnier, fondateur du film de marionnettes en tant que genre en soi, l'animateur reste toutefois prisonnier d'un imaginaire suranné qu'il ne réussit jamais à dépasser. Cela admis, on peut considérer le Roman de Renart — d'après des textes anonymes des XIIe et XIIIe siècles, adaptés ici par Goethe —, son seul long métrage, comme une indéniable réussite plastique. Terminé en 1931, le film est sonorisé ultérieurement. Il connaît, initialement, en France, une exploitation sous forme de courts métrages : sa construction faite de récits différents autorise cela. Il sort, dans son intégralité, d'abord en Allemagne, en 1936, puis dans son pays d'origine, en 1939. Cette sortie différée l'empêche d'être le premier long métrage d'animation de volumes au monde : Ptouchko le devance avec le Nouveau Gulliver (Novyi Gulliver, 1935).
Dans les années 30, Starevitch dirige une série avec la marionnette « Fétiche » : Fétiche mascotte (1933), Fétiche en voyage de noces (1936), Fétiche chez les sirènes (1937)... Après la guerre, il poursuit dans la même voie d'une animation destinée aux enfants : Zanzabelle à Paris (1947), Gazouilly, petit oiseau (1953), tous deux avec la collaboration de Sonika Bo, Fleur de fougère (1949), le Nez au vent (1956)... Il entreprend, avant sa mort, Entre chien et chat (1965), demeuré inachevé.