Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
V

VAUTIER (René) (suite)

René Vautier a créé et animé plusieurs institutions et associations importantes. Directeur du Centre audiovisuel d'Alger entre 1961 et 1965, il a formé la première génération des cinéastes algériens, et dirigé la réalisation collective de Peuple en marche, sur la guerre et la première année de l'indépendance. Parallèlement, il crée les Ciné-Pops, association populaire de « culture citoyenne par le film », préfiguration de ce qui deviendra la Cinémathèque algérienne. En 1972, il fonde l'Unité de production cinéma Bretagne, sous-titrée « Du colonialisme au socialisme ». En 1984, il fonde « Images sans chaînes », pour diffuser les films censurés par les chaînes de télévision françaises.

René Vautier représente l'archétype du cinéaste engagé, l'exemple héroïque de son courage intellectuel et physique a inspiré nombre de réalisateurs et techniciens. La nature militante de son cinéma s'appuie d'une part sur une extrême rigueur plastique, capable de faire au présent immédiat l'hommage de sa grandeur épique, et de l'autre sur une constante inventivité formelle, qui l'ont aidé à surmonter en toutes circonstances les difficultés pratiques liées à une œuvre « d'intervention sociale ». Son slogan pourrait être, selon ses propres termes : « Écrire l'histoire en images. Tout de suite. » Un portrait filmique, René Vautier, l'homme de paix, lui a été consacré en 1999 par Ahcene Osmani.

Autres films :

Un général revient, (1950), Pavillon chinois (1955) ; Vacances en Giscardie (1980) ; Et le mot frère et le mot camarade (1995) ; Dialogues d'images en temps de guerre (1998). Nombreuses émissions de télévision et films vidéo. René Vautier aurait réalisé environ 180 films ; son œuvre, dispersée par les urgences de l'histoire, reste largement à identifier, retrouver et restaurer.

VÁVRA (Otakar)

cinéaste tchèque (Hradec Kralové, Autriche-Hongrie, 1911).

Après avoir suivi des cours d'architecture, il s'intéresse au cinéma comme publiciste, écrit dans certaines revues et participe au mouvement d'avant-garde Front gauche (Levá fronta). Auteur de plusieurs documentaires et courts métrages (‘ La lumière perce les ténèbres ’ [Světlo proniká tmou], 1931 ; ‘ On vit à Prague ’ [Žijenc v Praze], 1934 ; ‘ Novembre ’ [Listopad], 1935), il aborde la fiction avec ‘ Un chameau par le chas d'une aiguille ’ (Velbloud uchem Jehly, 1936) et deux longs métrages, ‘ Un conte philosophique ’ (Filosofské historie, 1937, d'après Alois Jirásek) et ‘ Virginité ’ (Panenství, id., d'après Marie Majerova). Scénariste depuis 1932 — il a signé entre autres le script de ‘ l'Aube ’ (Svitáni, V. Kubásek, 1933) et de ‘ Maryša ’ (J. Rovenskÿ, 1935) —, il va devenir le grand spécialiste des adaptations littéraires. La littérature, tchécoslovaque (K. Čapek, J. Kopta, J. Drda, V. Řezáč, T. Svatopluk, J. Otčenášek, K. M. Čapek-Chod, V. Mrštík, A. Jirásek, F. Hrubin) ou étrangère (Balzac par exemple pour ‘ l'Amante masquée ’ [Maskovaná milenka], 1940), trouve en lui un serviteur fidèle, habile, intelligent, cultivé, d'une grande habileté technique, éclectique dans les thèmes choisis (du drame psychologique à la fresque historique en passant par le récit social), influencé tout à la fois par le cinéma soviétique muet et le réalisme poétique français des années 30. Sans doute n'évite-t-il pas parfois un académisme froid, presque impersonnel, et sans doute a-t-il été obligé de diriger quelques films de circonstance, mais il est certain que, au long de ses cinquante années de travail au service du cinéma, il est le plus représentatif, avec Martin Frič, de la « continuité » tchécoslovaque dans ses moments forts et aussi dans ses moments faibles. Certaines de ses œuvres ont marqué leur époque : ‘ la Confrérie des demoiselles de Kutna Hora ’ (Cech panen Kutnohorskÿch, 1938), ‘ Humoresque ’ (Humoreska, 1939), ‘ le Conte de mai ’ (Pohádka máje, 1940), ‘ la Turbine ’ (Turbina, 1941), ‘ le Pressentiment ’ (Předtucha, 1947), ‘ Krakatit ’ (1948), ‘ la Barricade muette ’ (Něma barikáda, 1949), la trilogie hussite composée de ‘ Jan Hus ’ (1954), ‘ Jan Žižká ’ (1955) et ‘ Contre Hus ’ (Proti všem, 1957). Les films de la fin des années 50 et du début des années 60 n'avaient guère su éviter les pièges du conventionnel (‘ le Citoyen Brych ’ [Občan Brych], 1958) mais curieusement, à l'époque du printemps de Prague, le cinéaste subit la contagion artistique de ses cadets et signe deux adaptations réussies de Frantisek Hrubin : ‘ la Reinette d'or ’ (Zlata reneta, 1965) et ‘ Romance pour bugle ’ (Romance prokridlovku, 1966). ‘ Un marteau pour la sorcière ’ (Kladivo na čarodějnice, 1969) est peut-être son dernier film très personnel. Au cours des années 70, il entreprend une nouvelle trilogie historico-politique qui illustre l'histoire de son pays, du traité de Munich (les Jours de la trahison [Dny zrady], 1974) à ‘ la Libération de Prague ’ (Osvobození Prahy, 1977) en passant par les batailles de la guerre (Sokolovo, 1976). Il n'abandonne pas les studios malgré son âge respectable et donne encore ‘ Une histoire d'amour et d'horreur ’ (Přiběh lásky a cti, 1977) ; ‘ Soleil noir ’ (Temné slunce, 1980), ‘ le Pèlerinage de Jan Amos ’ (Putováni Jana Amose, 1983), ‘ Oldřich et Božena ’ (Oldřich o Božena, 1984), ‘ Un comédien ’ (Komediant, id.), ‘ Véronique ’ (Veronika, 1986), ‘ l'Europe a dansé la valse ’ (Evropa tančila valčík, 1989).

VEBER (Francis)

scénariste et cinéaste français (Neuilly-sur-Seine 1937).

Issu d'une famille d'écrivains, il passe vite du journalisme à l'écriture. Sketches, pièces de théâtre, nouvelles et romans l'amènent tout droit au cinéma, où son premier scénario, Appelez-moi Mathilde, est tourné en 1969 par P. Mondy. Commence alors une carrière prolifique de scénariste grand public, où son talent d'inventeur de situations voisine avec un sens de la construction et du ressort d'une efficacité telle que la plupart de ses histoires sont des succès : le Grand Blond avec une chaussure noire (Y. Robert, 1972) ; Il était une fois un flic (G. Lautner, id.) ; l'Emmerdeur (É. Molinaro, 1973) ; le Magnifique (Ph. de Broca, id.) ; Adieu poulet (P. Granier-Deferre, 1975) ; la Cage aux folles (É. Molinaro, 1978) ; Coup de tête (J.-J. Annaud, 1979) ; la Cage aux folles II (É. Molinaro, 1980) ; Hold up (A. Arcady, 1985). À partir de 1976, il se lance dans la réalisation avec le Jouet, une comédie douce-amère où transparaît une sensibilité que les grosses productions auxquelles il participe ne dénotent pas souvent. Créant le couple Gérard Depardieu / Pierre Richard et s'en emparant il trouve une sorte de filon et enchaîne trois films dont le succès public ne se dément pas, la Chèvre (1981), les Compères (1983), les Fugitifs (1986). En 1991, il réalise Welcome to Buzzsaw aux États-Unis. De retour en France il remporte de nouveaux succès avec le Jaguar (1996), le Dîner de cons (1999), le Placard (2000), films fondés sur les ressorts les plus traditionnels de la comédie, qui-proquos, gaffes et caricatures.