Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
S

SUÁREZ (Gonzalo)

cinéaste et écrivain espagnol (Oviedo 1934).

S'il débute à Barcelone, à l'époque où Vicente Aranda, Pere Portabella et quelques autres partagent ses inquiétudes expérimentales, son premier long métrage, Ditirambo (1967), établit d'emblée des relations étroites avec son œuvre littéraire. Pas plus les premiers films qu'il interprète et produit en marge (El extra~no caso del doctor Fausto, 1969 ; Aoom, 1970) que les tentatives d'intégrer le système (Parranda, 1977) ne s'avèrent convaincants. Il réussit à retrouver son univers et ses personnages Rocabruno et Ditirambo à partir de Reina Zanahoria (1978) et surtout Epílogo (1983). Il peut désormais assumer d'autres défis, tels que Remando al viento (1988), où il met en scène Mary Shelley et ses fantômes. La littérature reste au cœur de Don Juan en los infiernos (1991) et de La reina anónima (1992). Il signe encore El detective y la muerte (1994) et Mi nombre es sombra (1996).

SUBIELA (Eliseo)

cinéaste argentin (Buenos Aires 1944).

Il tourne Un largo silencio (CM, 1963) et un premier long métrage, La conquista del paraíso (1980), pendant qu'il travaille dans la publicité. Son originalité s'impose avec Homme regardant au sud-est (Hombre mirando al sudeste, 1985), où il parvient à créer un climat étrange et ambigu, par des moyens très simples, en procédant par petites touches, à la manière des trompe-l'œil de Magritte. La dimension métaphorique et énigmatique de son personnage recouvre à la fois les blessures récentes de l'Argentine et les inquiétudes universelles de la jeunesse contemporaine. La littérature occupe dans Últimas imágenes del naufragio (1989) la place que tient la musique dans le film précédent. Mais le choix d'un écrivain comme pivot du récit permet de remplacer les subtilités de la suggestion par une franche irruption de l'imaginaire. El lado oscuro del corazón (1992) suppose la même liberté formelle. Il relève le défi de présenter un poète qui débite des vers et des phrases à effet, tout en évitant la pédanterie par une bonne dose d'humour. Subiela défend l'individu, l'irréductibilité de la personne humaine, contre l'égoïsme à la mode dans notre société mercantile. Il signe ensuite No te mueras sin decrime adónde vas (1994), Despabílate amor (1996), Peque~nos milagros (1997), Las aventuras de Dios (1999), une suite à El lado oscuro del corazón (2001), sans convaincre toujours.

SUBSTANDARD.

Se dit des films ou des formats (1) de film de largeur inférieure à la largeur (35 mm) du format standard. ( FORMAT.) Salle substandard, salle uniquement équipée pour projeter les films en copies 16 mm.

SUBSTRATUM.

Mince couche transparente qui assure la liaison mécanique entre le support d'un film et l'émulsion. ( FILM.)

SUBTITLE.

Mot anglais pour sous-titre.

SUCKSDORFF (Arne)

cinéaste suédois (Stockholm 1917).

Il est sans doute l'un des plus grands documentaristes suédois. Tous ses films reflètent un profond attachement à la nature, et tout particulièrement aux paysages du centre de la Suède parce qu'il y avait passé son enfance et son adolescence avant de partir pour Berlin, où il séjourne un temps, fréquentant l'école d'art Reimann et travaillant notamment avec l'acteur Rudolf Klein-Rogge. Il s'initie ensuite à la prise de vues en Sicile. Il tourne à partir de 1939 une série de courts métrages décrivant la flore, la faune, la marche des saisons de son pays natal avec une très grande précision. Ces esquisses soutenues par une idée-force (l'homme et la bête sont l'un comme l'autre à la fois chasseur et gibier et ce n'est qu'en se soumettant à ce principe que chacun d'entre eux peut assurer sa survie dans un climat de respect mutuel) lui assurent une place privilégiée. Sucksdorff ne se contente pas d'un réalisme brutal, il introduit parfois un violent lyrisme dans ses images et n'hésite pas à recourir à l'appui d'une trame anecdotique ou à certaines analogies (dans la Mouette [Trut, 1944], son étude sur le monde parfois cruel de ces oiseaux de mer s'accompagne d'un parallélisme avec la menace nazie). Auteur notamment de Rhapsodie d'août (Augustirapsodi, 1939), le Pays de ton avenir (Din tillvaros land, 1940), Une légende d'été (En sommarsaga, 1941), le Vent d'ouest (Vinden fron vaster, 1942), les Semailles (Sarvtid, 1943), l'Aube (Gryning, 1944), Ombres sur la neige (Skuggor over snön, 1945), la Vallée idéale (Den drömda dalen, 1947), le Départ (Uppbrott, 1948), le Son du cor dans le Nord (Ett hörn i norr, 1950), il part pour l'Inde en 1951 et en rapporte deux remarquables poèmes en images Village hindou (Indisk by, 1951) et le Vent et le Fleuve (Vinden och floden, id.). De retour en Suède, il s'essaye au long métrage avec la Grande Aventure (Det stora äventyret, 1953), dont l'héroïne est une renarde. L'Arc et la Flûte (En djungelsaga, 1957) est tourné de nouveau en Inde : Sucksdorff y peint avec tact et tendresse la vie d'un village de la tribu des Morias, à l'est de Bombay. Au début des années 60, le cinéaste fait appel à la fiction et dirige des acteurs dans le Garçon dans l'arbre (Pojken i trädet, 1961). Nommé directeur d'un Institut du film documentaire pour le compte de l'Unesco au Brésil, il aborde le monde de la ville (notons cependant que ce chantre rural avait signé en 1946 un excellent portrait de Stockholm dans le Rythme de la ville [Människor i stad]) et ses zones d'extrême pauvreté dans Chez moi à Copacabana (Mitt hem är Copacabana, 1965). Mais Sucksdorff, qui est un lyrique et non un pamphlétaire, habille la misère des favelas d'une joliesse photographique qui lui a été quelque peu reprochée. Il semble avoir clos son œuvre sur ce demi-échec.

SUÈDE.

En novembre 1894, le « Schnellscher », appareil pour la projection de « vues animées », dû à l'Allemand Ottomar Anschütz, puis, trois mois plus tard, le Kinétoscope d'Edison sont présentés au public suédois. En juin 1896, à l'occasion de l'Exposition industrielle de Malmö, on projette quelques films tournés par les frères Lumière. En 1897, Promio, l'un des plus célèbres opérateurs itinérants de la maison Lumière, filme l'arrivée du roi Oscar II à l'exposition du jubilé, inaugure à Stockholm une salle de projection, le « Lumière Kinematograph », et initie à la technique cinématographique Carl Ernest Florman (1862-1952), le fils d'un photographe de la Cour, qui devient ainsi l'un des grands pionniers du cinéma suédois. Deux autres pionniers sont l'illusionniste danois Nils Jacobsen, qui ouvre plusieurs nouvelles salles fixes (notamment le Blanchs Teater, à Stockholm, en 1904), et l'opérateur Robert Ohlson. Mais la véritable naissance du cinéma suédois se situe néanmoins aux alentours de 1909. C'est en effet l'année où Charles Magnusson (1878-1948), le très dynamique directeur de la Svenska Biografteatern (société de production fondée à Kristianstad, dans le sud du pays, le 16 février 1907, et qui s'était signalée à l'attention des chercheurs en appliquant à quelques courts métrages un procédé de cinéma sonore), lance sur le marché scandinave un film de 425 mètres : les Gens du Värmland (Värmlänningarna), tourné par un acteur de théâtre, Carl Engdahl, et adapté d'une opérette célèbre de F. A. Dahlgren. Le succès commercial semblant concluant, Magnusson cherche à étendre la renommée de sa firme : il engage en 1910 un metteur en scène de théâtre, Gustaf Linden (dit Muck Linden, 1875-1936), et surtout un excellent opérateur, Julius Jaenzon* (qui venait de participer au premier film de fiction norvégien : Un drame en mer [Ett drama på havet, 1908]), puis fait appel en 1911 à deux acteurs, Victor Sjöström* et Mauritz Stiller*, qui vont très rapidement prendre place parmi les réalisateurs les plus doués de leur époque.