PROJECTION. (suite)
Jusqu'à la fin des années 50, la seule source lumineuse suffisamment puissante pour éclairer les images projetées sur un écran de relativement grandes dimensions était l'arc à charbons, où l'on fait jaillir une décharge électrique permanente entre deux électrodes en graphite appelées « charbons ». L'arc usant rapidement les électrodes, on employait de longs charbons montés sur un mécanisme d'avance automatique destiné à maintenir constant l'écartement (quelques mm) entre les électrodes. Au sommet de la lanterne, un large tuyau, raccordé à une cheminée, permettait l'évacuation des gaz chauds, des fumées et surtout de l'oxyde de carbone produits au niveau de l'arc.
Puissant, d'un bon rendement, l'arc à charbons était en contrepartie d'un emploi contraignant : impossibilité de projeter un long métrage sur un seul projecteur, en raison de la vitesse de consommation des charbons ; nécessité d'une surveillance régulière, le dispositif d'avance automatique n'assurant qu'en première approximation la stabilité de fonctionnement.
L'arc à charbons a aujourd'hui totalement disparu, remplacé par la lampe au xénon, où l'arc électrique jaillit cette fois entre deux électrodes en tungstène, enfermées dans une ampoule emplie de xénon sous assez forte pression (plusieurs atmosphères à froid, 20 à 30 atmosphères à chaud), le rôle du xénon étant à la fois de favoriser l'évacuation de la chaleur et d'améliorer la qualité de la lumière produite.
Apparue dans les années 60, la lampe au xénon conjugue les avantages d'un bon rendement, d'une lumière comparable à celle de l'arc charbon, voisine de la lumière du jour, et surtout d'une grande commodité d'emploi car elle ne nécessite pas de surveillance. La puissance des lampes varie entre 450 W et 7 kW pour l'exploitation commerciale et jusqu'à 15 kW pour les grands formats (surface d'écran pouvant atteindre 1 000 m²). Leur durée de vie varie de 800 heures pour les fortes puissances à 3 000 heures, et parfois plus pour les faibles puissances. Sans la lampe au xénon, la « projection automatique » (voir plus loin) aurait été inconcevable. Mentionnons pour mémoire la lampe pulsée, à peu près contemporaine de la lampe au xénon. Il s'agissait d'une lampe à décharge, de taille très réduite, qui fonctionnait par impulsions très brèves tous les 1/72 de seconde.
Agencement des projecteurs.
Le chrono et la lanterne de projection sont montés sur un socle, également appelé pied qui supporte également les bobines de film. À l'époque du film nitrate, le film était enfermé dans des carters et la capacité des bobines chargées sur le projecteur était limitée à 300 m pour des raisons de sécurité. Avec l'élimination du support nitrate, la capacité de film chargé sur le projecteur a été augmentée puis il a été autorisé de charger tout un programme sur le projecteur (projection automatique) lorsque le xénon a remplacé les arcs charbon. Pour des raisons d'exploitation, la plupart des projecteurs restent munis de bras qui permettent de projeter du film en bobines de 600 mètres au minimum. Dans des projecteurs de conception récente, le chrono est incorporé à une colonne que sert également de support à la lanterne. Une autre conception, d'origine américaine, appelée « console » consiste à incorporer en plus de la lanterne de projection, le redresseur alimentant cette lanterne, les amplificateurs de la chaîne de reproduction sonore et les commandes d'automatisme dans un même ensemble sur lequel est monté le chrono.
Certains constructeurs proposent des projecteurs mixtes 35/70 mm et 16/35. Les projecteurs 35/70 mm sont tous concentriques (même axe optique, tandis que les projecteur 16/35 peuvent être soit concentriques, soit obtenus par accouplement d'un mécanisme 16 mm et d'un mécanisme 35 mm avec mise en commun de certains organes : moteur, lanterne.
La lecture sonore.
Initialement, lors de l'apparition du cinéma sonore, un lecteur optique pour la reproduction de la piste photographique a été installé sur les projecteurs, en aval de 20 images par rapport à la fenêtre de projection. La position initiale de ce lecteur a été maintenue pour le son analogique mais d'autres lecteurs sont venus s'ajouter sur les projecteurs avec l'apparition du son magnétique en 70 et en 35 mm, puis plus récemment avec les lecteurs numériques. Les lecteurs magnétiques ont été montés en amont de l'image et étaient communs pour le 70 et le 35 mm. Les lecteurs magnétiques 35 mm ont aujourd'hui totalement disparu. Les lecteurs numériques sont distincts pour les trois procédés Dolby SR-D, DTS et SDDS. Les lecteurs DTS et SDDS sont montés en amont de la fenêtre image, sensiblement à l'emplacement des anciens lecteurs magnétiques, le lecteur numérique Dolby SR-D peut être monté en amont de la fenêtre de projection, ou de plus en plus souvent combiné avec le lecteur analogique. Ce type de lecteur est alors dit « inversé » en raison de son principe de fonctionnement optique. Dans tous ces lecteurs, le défilement du film doit être très régulier sous peine de faire apparaître des fluctuations de vitesse (pleurage). Ces lecteurs sont donc parfaitement usinés, les pièces en rotation sont équilibrées et solidaires d'un volant d'inertie pour réguler le défilement du film.
Échauffement du film.
Outre la ventilation créée par l'obturateur, on refroidit le couloir, pour les fortes puissances de lanterne, par circulation d'eau. Par ailleurs, on a de plus en plus recours, pour la lanterne, aux miroirs « froids ». Ces miroirs ont reçu un traitement de surface pour ne réfléchir en direction de la fenêtre de projection que les rayons visibles, les rayons infrarouges se trouvant donc éliminés.
Projection manuelle.
Ce type de projection a pratiquement disparu des salles, à l'exception des salles de vision, des laboratoires ou des salles de projection de centres de congrès ou de conférence qui projettent une seule fois un grand nombre de programmes. La cabine de projection comporte deux projecteurs identiques sur lesquels les bobines sont projetées alternativement. Le film est projeté en bobines d'une longueur de 600 m environ (durée 20 mn). La succession d'une bobine à la suivante se fait par une manoeuvre « d'enchaînement » à partir de repères projetés à l'écran (petits ronds projetés dans l'angle supérieur droit des images).