MIXAGE.
Le montage fournit une bande image et, en correspondance avec celle-ci, un certain nombre de bandes son (couramment six ou sept, parfois beaucoup plus) que l'on peut ranger en trois grandes catégories : bandes « paroles », bandes « effets », bande musique. ( BANDE SON.)
Il faut maintenant marier ces différents sons. Les marier entre eux : par exemple, réduire le niveau de la musique pour qu'elle ne couvre pas les paroles. Les marier à l'image : par exemple, quand un personnage s'éloigne, sa voix s'entend de moins en moins, ce qui n'est pas nécessairement le cas sur l'enregistrement initial pour peu que le micro ait suivi le comédien.
Le mixage consiste précisément à régler le niveau, la tonalité, l'écho, etc., des différents sons de façon à parvenir au son définitif. On en profite pour corriger, dans la mesure du possible, les éventuelles imperfections de l'enregistrement initial.
Cette opération s'effectue dans un auditorium de mixage, où l'on s'est efforcé de recréer les conditions d'écoute d'une salle de cinéma. ( BANDE SON.) La bande image est projetée sur l'écran pendant que les diverses bandes magnétiques qui portent les sons défilent sur autant de lecteurs parfaitement synchronisés — en marche avant et en marche arrière — avec le projecteur image. (Une cabine d'auditorium compte facilement une dizaine de lecteurs.) Dans l'auditorium lui-même, un pupitre de mixage permet, grâce à nombre de boutons et de curseurs, d'intervenir de façon indépendante sur toutes les « entrées » sonores. Revenant en arrière autant de fois qu'il le faut, l'ingénieur du son (généralement un ingénieur du son spécialisé dans le mixage) détermine par tâtonnements les réglages de chaque scène, en fonction de ce que lui demande le réalisateur (ou le directeur de la version doublée). Quand le résultat est jugé satisfaisant, on procède à un dernier passage au cours duquel le son mixé est reporté sur une nouvelle bande magnétique, sur laquelle figure le son définitif du film. C'est cette nouvelle bande qui permettra de visionner le film sur projecteur « double bande » (une bande image et une bande son entraînées par des tambours dentés solidaires) avant le report du son sur les copies d'exploitation ; éventuellement, cette ultime projection conduira à demander que l'on retouche le mixage.
Ce qui précède décrit le principe du mixage. En pratique, l'opération peut s'avérer un peu plus complexe. Par exemple, le monteur peut avoir fourni plus de bandes son qu'il n'y a de lecteurs en cabine : il faut alors effectuer des prémixages, qui permettent de regrouper plusieurs sons. Indépendamment de ce problème éventuel, certains préfèrent ne pas regrouper tout de suite tous les sons sur une même piste. Dans une première étape, ils regroupent séparément « paroles », « effets », « musique ». Dans une deuxième étape, ils mixent ces trois pistes pour parvenir au son définitif. Cette méthode facilite les retouches éventuelles. Surtout, elle simplifie la fabrication de la « bande internationale » ( BANDE SON), bande où les sons mixés sont regroupés sur trois pistes :%— une piste, regroupant tous les sons, porte le son définitif qui sera reporté sur les copies ; %— une autre piste reproduit la musique, réglée telle qu'elle figure dans le son définitif ; %— la dernière piste porte, eux aussi réglés tels qu'ils le sont dans le son définitif, non seulement les « effets » fournis par le montage mais aussi les effets contenus dans les bandes paroles, ces derniers effets ayant été reconstitués par des bruiteurs. (L'intérêt de cette « bande internationale » est que les acheteurs étrangers disposent immédiatement, avec les deux dernières pistes, de tout ce qui n'est pas strictement paroles. Cela simplifie les doublages ultérieurs, pour lesquels la première piste servira de guide.)
Le mixage en son stéréophonique.
Le principe du mixage n'est pas modifié lorsque les copies comporteront quatre pistes sonores (copies en son optique Dolby Stéréo, copies à quatre pistes magnétiques type CinémaScope) ou six pistes (copies 70 mm). Les opérations de mixage, elles, sont plus complexes, mais sans que la complexité soit multipliée par quatre ou six. Pour procurer une écoute satisfaisante à tous les spectateurs, où qu'ils soient assis dans la salle, on est amené en effet ( STÉRÉOPHONIE) à travailler le plus souvent en « pseudostéréophonie » : les voix, en particulier, sont généralement enregistrées en monophonie puis « spatialisées » en les aiguillant principalement vers telle ou telle piste sonore. En dehors des éléments (musique, bruitage) enregistrés en quatre ou six pistes, et qui doivent donc être mixés en quatre ou six pistes, le mixage s'opère pour l'essentiel — paradoxalement — en monophonie, et il est suivi d'une phase de « spatialisation » des éléments monophoniques. Dans le cas particulier du Dolby Stéréo, où les différentes voies sonores d'origine sont « codées » pour prendre place sur deux pistes d'où seront extraites — à la projection — quatre voies, le mixage débouche sur la fourniture de ces deux pistes ; l'écoute du mixage se fait via un décodeur similaire à celui des salles, pour restituer l'impression sonore que ressentiront les spectateurs.
L'arrivée des machines numériques multipistes a entraîné de nouvelles manières de travailler. Les recopies successives sans dégradations du signal peuvent être mises à profit pour travailler la bande-son des films. L'application des techniques informatiques aux équipements son, et notamment aux consoles de mixage, a permis de mémoriser dans le temps toutes les manipulations de l'ingénieur du son : variations de niveau (potentiomètres) ou de filtrage. Avec de tels dispositifs, il devient possible de reproduire les corrections, en temps réel, tout au long du film (les potentiomètres de la console bougent tout seuls, comme les touches d'un piano mécanique).
L'emploi de ces consoles automatisées permet aux ingénieurs du son de travailler dans de très bonnes conditions des mixages très compliqués. Il n'est pas rare de rencontrer des consoles comportant soixante voies.