Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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DELON (Alain) (suite)

Ayant momentanément renoncé aux affaires extracinématographiques, Delon recentre ses activités sur le cinéma, où il se veut omniprésent, comme acteur, producteur (Productions ADEL), et finalement réalisateur (Pour la peau d'un flic, le Battant). Toute sa carrière traduit la dualité d'un comportement soucieux de séduire l'élite aussi bien que le grand public. C'est ainsi qu'il produit parfois des films de talent (Monsieur Klein de Losey), en s'effaçant modestement derrière le réalisateur — alors qu'il intervient parfois brutalement dans la mise en scène de ses productions plus commerciales. Un pessimisme masochiste paraît souvent déterminer ses attitudes, son adhésion à une vision du monde fondée exclusivement sur la lutte pour la survie et qui s'exprime notamment par son attirance vers les combats du ring.

Dans la filmographie de Delon, considérable et inégale, les ouvrages commerciaux, qui témoignent d'une conception simpliste de la société et des rapports entre les êtres, alternent avec les œuvres ambitieuses. Parmi les premiers, certains cependant sont loin d'être mésestimables : l'Insoumis (A. Cavalier) ; le Samouraï (J.-P. Melville) ; Diaboliquement vôtre (J. Duvivier) ; Borsalino (J. Deray) ; la Veuve Couderc (P. Granier-Deferre) ; le Professeur (V. Zurlini), dans lequel il change fondamentalement de registre ; Flic Story et Trois Hommes à abattre (tous deux de J. Deray).

Mais, outre trois films déjà évoqués (Plein Soleil, Rocco et ses frères, l'Éclipse), la postérité retiendra plus probablement la Piscine, de Jacques Deray, où Delon retrouve Romy Schneider dans une atmosphère digne de la Laura de Preminger. Elle prendra en compte le Guépard à l'occasion duquel Visconti offre à Delon un rôle lui permettant d'exprimer la face d'ombre de sa personnalité, symétrique de l'angélisme de Rocco. Elle n'oubliera vraisemblablement pas l'Assassinat de Trotsky ou Monsieur Klein, véritable quête d'identité, œuvre cathartique, peut-être, pour l'acteur lui-même. Enfin, dans Traitement de choc, d'Alain Jessua, éclate le charme méphistophélique de cette personnalité inconfortable, qui paraît mue par une pulsion de mort.

La carrière de Delon connut, dans les années 60, une parenthèse américaine, d'ailleurs peu couronnée de succès. Durant cette période, qui correspondait à une perception aiguë de la crise du cinéma français, Delon ne voyait de salut que dans le vedettariat international et, par conséquent, américain. Il convient également de mentionner une prestation théâtrale qui tient un rôle important dans ses « années de formation » : Dommage qu'elle soit une putain, du dramaturge élisabéthain John Ford, dans une mise en scène de Visconti, avec Romy Schneider pour partenaire. En 1985, il reçoit un César pour son rôle dans Notre histoire, film qui tranche quelque peu — comme le fera, cinq ans plus tard et dans un style très différent, Nouvelle Vague de Godard — sur une carrière qui semble s'essouffler en acceptant des rôles stéréotypés dans des œuvres de facture banale qui, curieusement, sont loin de rencontrer le succès commercial escompté.

Films :

Quand la femme s'en mêle (Y. Allégret, 1957) ; Sois belle et tais-toi (M. Allégret, 1958) ; Christine (Pierre Gaspard-Huit, id.) ; Faibles Femmes (M. Boisrond, 1959) ; le Chemin des écoliers (id., id.) ; Plein Soleil (R. Clément, 1960) ; Rocco et ses frères (L. Visconti, id.) ; les Amours célèbres (sketch : Agnès Bernauer, Boisrond, 1961) ; Quelle joie de vivre ! (Clément, id.) ; l'Éclipse (M. Antonioni, 1962) ; le Diable et les Dix Commandements (sketch : l'Inceste, J. Duvivier, id.) ; Marco Polo (inachevé, Christian-Jaque, id.) ; le Guépard (Visconti, 1963) ; Mélodie en sous-sol (H. Verneuil, id.) ; Carambolages (Marcel Bluwal, id., cameo) ; la Tulipe noire (Christian-Jaque, 1964) ; l'Insoumis (A. Cavalier, id.) ; les Félins (Clément, id.) ; la Rolls Royce jaune (A. Asquith, id.) ; l'Amour à la mer (G. Gilles, 1962-1965, cameo) ; les Tueurs de San Francisco (R. Nelson, 1965) ; Texas, nous voilà ! (Texas Across the River, M. Gordon, 1966) ; Paris brûle-t-il ? (Clément, id.) ; les Centurions (Robson, id.) ; les Aventuriers (R. Enrico, 1967) ; le Samouraï (J.-P. Melville, id.) ; Diaboliquement vôtre (J. Duvivier, id.) ; Histoires extraordinaires (sketch : William Wilson, L. Malle, 1968) ; la Motocyclette (J. Cardiff, id.) ; Adieu l'ami (Jean Herman, id.) ; la Piscine (J. Deray, 1969) ; Jeff (Herman, id.) ; le Clan des Siciliens (Verneuil, id.) ; Borsalino (J. Deray, 1970) ; le Cercle rouge (Melville, id.) ; Madly (Roger Kathane, id.) ; Soleil rouge (T. Young, 1971) ; Fantasia chez les ploucs (G. Pirès, id. cameo) ; la Veuve Couderc (P. Granier-Deferre, id.) ; Doucement les basses (Deray, id.) ; l'Assassinat de Trotsky (J. Losey, 1972) ; Un flic (Melville, id.) ; le Professeur (V. Zurlini, id.) ; Il était une fois un flic (G. Lautner, 1972, cameo) ; Scorpio (M. Winner, 1973) ; Traitement de choc (A. Jessua, id.) ; les Granges brûlées (Jean Chapot, id.) ; Big Guns (D. Tessari, id.) ; Deux Hommes dans la ville (J. Giovanni, id.) ; la Race des seigneurs (Granier-Deferre, 1974) ; les Seins de glace (Lautner, id.) ; Borsalino Co (Deray, id.) ; Zorro (D. Tessari, 1975) ; Flic Story (Deray, id.) ; le Gitan (Giovanni, id.) ; Monsieur Klein (Losey, 1976) ; Comme un boomerang (Giovanni, id.) ; le Gang (Deray, 1977) ; Armaguedon (Jessua, id.) ; l'Homme pressé (E. Molinaro, id.) ; Mort d'un pourri (Lautner, id.) ; Attention, les enfants regardent (Serge Leroy, 1978) ; Airport 80 - Concorde (Airport 79 - the Concorde, D. Lowell Rich, 1979) ; le Toubib (Granier-Deferre, id.) ; Trois Hommes à abattre (Deray, 1980) ; Téhéran 43 / Nid d'espions (A. Alov et V. Naoumov, id.) ; Pour la peau d'un flic (A. Delon, 1981) ; le Choc (Robin Davis, 1982) ; le Battant (id., 1983) ; Un amour de Swann (V. Schloendorff, 1984) ; Notre histoire (Bertrand Blier, id.) ; Parole de flic (José Pinheiro, 1985) ; le Passage (René Manzor, 1986) ; Ne réveillez pas un flic qui dort (J. Pinheiro, 1988) ; Dancing Machine (Gilles Behat, 1990) ; Nouvelle Vague (J.-L. Godard, id.) ; le Retour de Casanova (E. Niermans, 1992) ; Un crime (Deray, 1993) ; l'Ours en peluche (id., 1994) ; les Cent et Une Nuits (A. Varda, 1995) ; Une chance sur deux (P. Leconte, 1998) ; les Acteurs (B. Blier, 2000).