ROZIER (Jacques)
cinéaste français (Paris 1926).
Il suit une formation classique : élève de l'IDHEC, assistant réalisateur à la télévision et auteur de courts métrages (Langage de l'écran, 1947 ; Une épine au pied, 1954 ; la Rentrée des classes, 1955, et Blue Jeans, 1958). Son écriture et sa vision du monde s'avèrent, pourtant, fort peu orthodoxes. Dans Adieu Philippine (1962), son premier long métrage, des éléments autobiographiques (le « héros » fait de petits travaux pour l'ORTF) se mêlent à une peinture très juste de la jeunesse de l'époque. Peu de temps avant son départ pour l'armée, un garçon connaît pendant quelques jours des aventures sentimentales mouvementées. Jacques Rozier tourne peu. En 1970, il réalise, selon les mêmes principes (improvisation contrôlée, appréhension de personnages en état de disponibilité, de vacance), Du côté d'Orouet, ou la chronique d'une fin d'été vécue par trois jeunes filles. Avec les Naufragés de l'île de la Tortue (1976), Jacques Rozier, qui jusque-là fait toujours appel à des amateurs ou des débutants, utilise Pierre Richard ; ce dernier se fond au groupe et oublie sa notoriété. En 1986, le cinéaste réalise Maine Océan, un film drolatique et insolite et en 2001 Fifi Martingale. Peintre attachant des classes moyennes, Jacques Rozier n'occupe pas la place qui lui échoit.
RÓZSA (János)
cinéaste hongrois (Budapest 1937).
Il étudie à l'École supérieure de théâtre et de cinéma de Budapest de 1956 à 1961, entre au Studio Béla Balázs, où il tourne plusieurs courts métrages sur les enfants et la jeunesse. Il cosigne avec Ferenc Kardos son premier long métrage de fiction, Grimaces (Gyerekbetegségek, 1965), puis réalise divers films (‘ les Adorables ’ [Bűbájosok], 1969 ; ‘ Foot à l'araignée ’ [Pókfoci], 1976 ; ‘ le Trompette ’ [A Trombitás], 1978 ; ‘ la Nuit du sabbat ’ [Boszorkányszombat, HONG-US], 1983) ainsi que des documentaires (le Champ de bataille [Csatatér], 1977). Mais ses meilleures réussites sont sans doute une évocation lyrique de l'enfance du poète et théoricien du cinéma Béla Balázs : ‘ Jeunesse rêveuse ’ (Álmodó ifjúsag, 1974) et deux études incisives sur la vie des jeunes délinquants issus de milieux sociaux défavorisés, les Parents du dimanche (Vasárnapi szülők, 1979) et ‘ Mascotte ’ (Kabala, 1981). En 1987, il tourne ‘ Bises, maman ’ (Csók Anyu), en 1989, la Valise à hélice (Ismeretlen ismerős), en 1991, Loubards (Félálom) et en 1993, ‘ Bonne nuit, Prince ! ’ (Jo éjt királyfi !).
ROZSA (Miklos)
compositeur américain d'origine hongroise (Budapest, Autriche-Hongrie, 1907 - Los Angeles, Ca., 1995).
Auteur d'un ballet, de symphonies et de musiques de chambre, Miklos Rozsa signe sa première partition pour le cinéma en Grande-Bretagne : le Chevalier sans armure (J. Feyder, 1936), une production Korda. Alexander Korda l'emmène avec lui aux États-Unis pendant la guerre, et c'est là qu'il s'affirme. C'est un romantique authentique, un mélodiste et un orchestrateur qui mêle la tradition germano-hongroise (folklore, valses lentes, violons plaintifs) à des innovations surprenantes (le théramin de la Maison du Dr Edwardes, A. Hitchcock, 1945). Rozsa est le cas extrême d'un compositeur capable d'enrichir considérablement, voire de transformer totalement, les images qui lui servent de support. Sa fougue passionnée élève la Guerre des cerveaux (B. Haskin, 1968) ou l'Arme à l'œil (Eye of the Needle, Richard Marquand, 1981) que des mises en scène sages maintiennent fermement au sol. Son lyrisme fait brusquement apparaître chez Alain Resnais un goût du romanesque que le cinéaste avait jusqu'alors dissimulé (Providence, l'une des plus belles œuvres de Rozsa, 1977). Il est remarquable que, privées de ses accords furieux et somptueux, des superproductions comme Quo Vadis (M. LeRoy, 1951), Ben-Hur (W. Wyler, 1959) ou le Cid (A. Mann, 1961) perdent en grandeur épique. Sa musique, qui sait, comme celle d'Hermann, suggérer la menace et l'indicible (Assurance sur la mort, B. Wilder, 1944 ; les Tueurs, R. Siodmak, 1946), sait aussi créer une tristesse presque morbide (Fedora, Wilder, 1978). Il est célèbre pour l'éclat qu'il sait donner aux films d'aventures (Ivanhoe, R. Thorpe, 1952), mais ses compositions peuvent cerner l'intimisme le plus subtil (la Croisée des destins, G. Cukor, 1956). C'est peut-être dans le tissu riche et brillant des Contrebandiers de Moonfleet (F. Lang, 1955) qu'il a donné sa pleine mesure. Son concerto pour violoncelle a inspiré Billy Wilder, qui a construit la Vie privée de Sherlock Holmes (1970) sur cette œuvre, un cas assez rare pour être mentionné.
RUAN LINGYU
actrice chinoise du muet (Shanghai 1910 - id. 1935).
Née dans une famille cantonaise de condition très modeste, elle entre en 1926 à la Mingxing et obtient le rôle principal dans ‘ Un mariage blanc ’ (Guaming defuqi) de Bu Wancang, qui la rend immédiatement célèbre. En 1928, elle tient la vedette du film de Zhang Shichuan et Zheng Zhengqiu ‘ la Pagode des nuages blancs ’ (Baiyun ta). En 1929, elle est recrutée par la Lianhua pour être l'héroïne du premier film de la compagnie, qui fit sensation dès la sortie : Rêve de printemps dans l'antique capitale (Gudu chun meng) de Sun Yu. Elle reste dans cette compagnie jusqu'à sa mort. Elle a interprété 30 films, presque toujours en tête d'affiche, dans une carrière qui n'a pas duré dix ans. Elle n'avait aucune connaissance théorique de son métier, mais un savoir inné. Presque tous les rôles qu'elle a interprétés, elle les avait plus ou moins vécus et, en les jouant, elle semblait les revivre intérieurement : son art et sa vie s'interpénétraient. Certains de ses personnages sont restés légendaires dans : ' Trois Femmes modernes ' (San ge modeng nüxing, Bu Wancang, 1933), ‘ le Petit Jouet ’ (Xiao wanyi, Sun Yu, id.), ‘ Une mer de neige parfumée ’ (Xiang xuehai, Fei Mu, 1934), ‘ la Divine ’ (Shen nü, Wu Yonggang, id.), ‘ Femmes nouvelles ’ (Xin nüxing, Cai Chusheng, 1934) suivi par son suicide, quelques mois plus tard, le 8 mars, jour de la fête des femmes. Elle entrait ainsi dans la légende à 25 ans.