USMAR (Ismaïl)
écrivain et cinéaste indonésien (Bukittingi, Sumatra, Indes néerlandaises, 1921 - Jakarta, Java, 1971).
Originaire de l'ouest de l'Insulinde, du pays Minankabau malais et musulman, le jeune poète et dramaturge participe, le temps de l'occupation japonaise, à des activités de groupes amateurs, puis il fonde en 1945 ‘ le Quotidien du peuple ’ (Harian Rakjat), et rallie les troupes nationalistes en lutte contre les Hollandais, revenus gouverner leur empire colonial. Ce sont eux pourtant qui lui permettent de s'initier au cinéma en travaillant sur les tournages de la South Pacific Film Corp. (dont les capitaux sont hollandais) ; ainsi participe-t-il au tournage de ‘ la Villageoise ’ (Gadis desa) de Andjar Asmara en 1949. Il fonde, après l'indépendance de l'archipel, la Perusahaan Film Nasional (Perfini), en 1950, et en assumera la direction, s'associant en 1954 avec la Persari de son ami Jamaluddin Malik pour résoudre les problèmes de survie et de concurrence qu'affronte le cinéma indonésien. Usmar ne cessera de lutter pour une production de qualité à la tête de cette Association des producteurs de films (PPFI) ou de l'Institut d'art et de culture des musulmans indonésiens (Lesbumi), dont il est nommé directeur en 1962. Comme Jamaluddin Malik, de mêmes origines que lui, Usmar incarne la volonté des Malais de doter leur pays d'un cinéma indépendant et spécifiquement indonésien — c'est-à-dire de s'opposer, pratiquement et qualitativement, aux importations indiennes, chinoises ou philippines. Ce n'est pas qu'Usmar, taxé parfois d'humanisme, n'ait sacrifié aux obligations de circonstance : ses deux premiers films exaltent la révolution et la lutte contre les Pays-Bas (‘ Six Heures dans Jogja ’ [Enam djam di Jogja], 1950). Il revient sur ce thème avec ‘ le Combattant ’ (Pejuang, 1959), alors que ‘ Trois Filles ’ (Tigra dara, 1956) était un musical fait pour renflouer la Perfini. Si plusieurs des 24 films qu'il a dirigés ont été des échecs auprès du grand public, plusieurs demeurent représentatifs d'un cinéma original et témoin des réalités : ‘ Crise ’ (Krisis, 1953), critique d'une « nouvelle société » assise sur sa victoire, remporte un large succès ; ‘ le Visiteur de marque ’ (Tamu aquinq, 1955) est une satire discrète des mœurs politiques ; ‘ les Vacances de l'artiste ’ (Liburan seniman, 1965) est l'adaptation d'une de ses œuvres théâtrales ; Ananda (1970) enfin lui vaut une ovation critique. Considéré comme le meilleur cinéaste indonésien et un de ses plus actifs producteurs (la Perfini a produit 42 films en 20 ans), plus inspiré qu'homme d'affaires, Usmar meurt d'un accident cardiaque le 2 janvier 1971, huit mois avant l'inauguration de la Cinémathèque de Jakarta, dont la première manifestation est un hommage à son œuvre.
USTAOˇGLU (Yeşim)
cinéaste turc (Sarıkamış 1960).
Architecte de formation, elle réalise au début des années 90 des courts métrages où elle s'interroge déjà sur la prise de conscience et la recherche d'identité qui en découle. Son premier long métrage, la Trace (Iz, 1994), est un exercice de style maîtrisé sur les états d'âme d'un policier chargé, à la veille de sa retraite, de l'enquête d'un meurtre qui le bouleversera en attisant les mystères du passé. Yeşim Ustaoǧlu se fait un nom international par le Voyage vers le soleil (Güneşe Yolculuk, 1999), l'histoire d'une amitié entre deux jeunes hommes, venus chercher du travail dans la jungle d'Istanbul ; l'un, marchand ambulant d'origine kurde, a l'habitude des descentes de police ; l'autre, natif de la région égéenne, ressemble pourtant plus que son copain à un kurde ; sa prise de conscience sera d'autant plus aiguë. Il s'agit d'une nouvelle approche du cinéma politique qui place au centre du récit la complexité des trajectoires individuelles en évitant tout didactisme. La réalisatrice décrit la réalité socio-politique du pays, sans complaisance ni emportement, dans une mise en scène rigoureuse, focalisée sur les mésaventures des protagonistes.
USTINOV (Peter)
acteur, scénariste, cinéaste, écrivain, dessinateur et auteur dramatique britannique (Londres 1921).
Il monte sur scène en 1938 et paraît à l'écran en 1941. Auteur d'une vingtaine de pièces et d'une dizaine de livres, interprète de plus de 40 films et de plusieurs disques, sept fois réalisateur, il témoigne d'un tel éclectisme qu'il est malaisé de cerner sa personnalité. Brillant touche-à-tout, il a connu quelques remarquables réussites comme acteur : Quo Vadis ? (M. LeRoy, 1951, rôle de Néron), Beau Brummel (C. Bernhardt, 1954, rôle du prince de Galles), Lola Montès (M. Ophuls, 1955), Spartacus (S. Kubrick, 1960), Romanoff et Juliette (P. Ustinov, 1961), Topkapi (J. Dassin, 1964), les Comédiens (P. Glenville, 1968), Mort sur le Nil (J. Guillermin, 1978), Rendez-vous avec la mort (M. Winner, 1988), la Révolution française (R. Enrico, 1989, dans le rôle de Mirabeau). Ses réalisations sont souvent assez insignifiantes (School for Secrets, 1946 ; Vice versa, 1947 ; Private Angelo, CO M. Anderson, 1949 ; Romanoff et Juliette , 1960 ; Lady L, IT-FR-ÉU, 1965 ; Hammersmith Is Out, ÉU, 1972), mais on lui doit une belle adaptation de Herman Melville : Billy Budd (id., 1962), où il a également trouvé un de ses meilleurs rôles, celui du capitaine Edward Fairfax Vere.