OLEA (Pedro)
cinéaste espagnol (Bilbao 1938).
Il débute avec Días de viejo color (1967) à l'époque de l'essor du nuevo cine et développe une carrière en dents de scie. Ses films les plus intéressants sont El bosque del lobo (1970), portrait d'un psychopathe pris pour un loup-garou ; Tormento (1974), d'après Pérez Galdós, où, pour la première fois sur un écran espagnol, on découvre un curé sexué ; et Un hombre llamado Flor de Otoño (1978), curieuse évocation de la Barcelone d'avant-guerre, dont le protagoniste est à la fois avocat, anarchiste et travesti. Parmi ses autres films, on peut citer Pim, Pam, Pum ... ¡ Fuego ! (1975) et le Maître d'escrime (El maestro de esgrima (1992).
OLIN (Lena)
actrice suédoise (Stockholm, 1955).
Une des dernières actrices révélées par Ingmar Bergman peu avant sa semi-retraite cinématographique, Lena Olin fut remarquée en jeune comédienne sensuelle et arriviste dans Après la répétition (Bergman, 1984). Belle et d'un talent riche et contrasté, elle fut vite intégrée au cinéma américain sans rien perdre de ses qualités. Elle était magnifique, un chapeau sur l'œil, au cœur de l'étrange trio de l'Insoutenable légèreté de l'être (P. Kaufman, 1988) ou, vêtue plus bourgeoisement mais également très sensuelle, au sein d'un autre trio, dans Ennemies (P. Mazursky, 1989). Son grand rôle romantique fut, face à Robert Redford, dans le sous-estimé Havana (S. Pollack, 1990), belle évocation du mythique Casablanca, où elle reprenait avec une grande fraîcheur un rôle qui évoquait celui d'Ingrid Bergman jadis. Depuis, on l'a confinée dans des emplois marginaux où, néanmoins, elle excelle : avocate sûre d'elle dans Dans l'ombre de Manhattan (S. Lumet, 1997) ou sorcière déchaînée dans la Neuvième Porte (R. Polanski, 1998).
OLIVEIRA (Manoel Candido Pinto de Oliveira, dit Manoel de)
cinéaste portugais (Porto 1908).
Fils de l'industriel Francisco José de Oliveira, le jeune Manoel connaît une enfance aisée. Il s'inscrit au collège de La Guardia mais abandonne rapidement ses études. L'amour du cinéma le saisit dès l'âge de dix-huit ans. En 1928, Rino Lupo vient achever, à Porto, le tournage de Fatima miraculeuse (Fátima Milagrosa). Il fonde une école d'acteurs : Manoel de Oliveira la fréquente et figure dans le film de Lupo. Il tient, en 1933, un rôle plus important dans la Chanson de Lisbonne (Canção de Lisboa), de Cottinelli Telmo.
En 1929, grâce à l'aide paternelle, il achète une caméra 35 mm portative. Prenant comme opérateur le comptable António Mendes, Oliveira commence la confection de Douro, Faina Fluvial, qu'il achève en 1931. Ce court métrage relève du documentaire poétique et symphonique tel qu'on le pratique alors dans de nombreux pays. L'auteur établit, par les vertus du montage, un parallèle entre des phénomènes naturels (le cours du fleuve) et des éléments de la vie sociale (activités des mariniers, femmes transportant du charbon...). Oliveira avoue s'être inspiré de Berlin, symphonie d'une grande ville, de Walter Ruttmann (1927). On projette pour la première fois le film en 1931, au Congrès international de la critique. Les journalistes portugais sont scandalisés par son aspect naturaliste. Le critique français Émile Vuillermoz se montre, lui, enthousiaste. Douro, Faina Fluvial sort, commercialement, en 1934, avec un accompagnement musical de Luís de Freitas Branco, en complément de programme du film d'António Lopes Ribeiro, Bétail sauvage (Gado Bravo). Longtemps incompris dans son pays, Manoel de Oliveira ébauche de nombreux projets qu'il ne peut mener à terme. De plus, des raisons politiques et la faiblesse de l'infrastructure — le Portugal n'a pas les moyens de créer une authentique industrie cinématographique — empêchent alors Manoel de Oliveira de développer son ambition d'auteur. Ses courts métrages Miramar, Praia das Rosas (1939), Já se Fabricam Automóveis em Portugal (id.), Famalicão (1940) n'offrent pas un grand intérêt artistique.
En 1941, Oliveira amorce la prise de vues de son premier long métrage, Aniki-Bobó, adapté d'une nouvelle de Rodrigues de Freitas, Meninos Milionários. À partir du quotidien de quelques enfants de Porto, il propose une vision, néoréaliste avant la lettre, de la vie des quartiers populaires de la ville. Par ailleurs, le croquis de ses jeunes sujets échappe, par son naturel, à toute forme de convention et de moralisme : choses qui déplaisent aux intellectuels et aux censeurs de l'époque. Après cela, Manoel de Oliveira reste quatorze années sans toucher à une caméra. Autodidacte et éclectique, il s'occupe d'autre chose, notamment d'agriculture. En 1955, il séjourne en Allemagne, où il étudie l'emploi de la couleur. Muni de nouveaux appareils, il réalise, à son compte, le Peintre et la Ville (O Pintor e a Cidade, 1956), un nouvel essai sur Porto. Faisant alterner caméra subjective et « cinéma direct », représentations de la ville et reflets des tableaux d'António Cruz, ce film marque la naissance d'un nouveau courant dans le documentaire, qui trouve des échos jusque chez Johan Van der Keuken. Oliveira réalise, en 1959, le Pain (O Pão), pour la Federação nacional dos industriais de moagem. Enchevêtrant données symboliques (la représentation du pain dans nos sociétés) et processus de fabrication, l'auteur fait de ce court métrage une œuvre d'un grand intérêt.
Oliveira commence, en 1961, le tournage du Mystère du printemps (O Acto da Primavera), son deuxième long métrage. Cette bande marque une rupture dans la filmographie de l'artiste. Elle le fait passer du documentaire axé sur le montage à un cinéma de texte visant à une économie maximale de moyens. Désormais, le metteur en scène témoigne, de l'intérieur, de la mentalité et de la culture portugaises. Le Mystère du printemps se fonde sur un texte du XVIe siècle, Auto da Paixão, de Francisco Vaz de Guimarães que les paysans de Curalha interprètent tous les ans, en plein air, durant la semaine sainte. Si Aniki-Bobó s'inspire d'un ouvrage préexistant, ce dernier constitue un simple postulat pour éclairer le réel. Pour la première fois ici, le référent de l'auteur n'est plus la réalité mais une représentation. Il la montre comme telle et ne cache pas la nature de sa démarche : la confection d'un film. C'est une œuvre de transition où fiction et documentaire se côtoient pour piéger certaines données culturelles et sociales de la région. Le réalisateur élabore, en 1963, la Chasse (A Caça), une parabole sur la solidarité et, en 1965, les Peintures de mon frère Júlio (As Pinturas do Meu Irmão Júlio), ses deux derniers courts métrages.