DELUBAC (Jacqueline)
actrice française (Lyon 1910 - Paris 1997).
On s'aperçoit aujourd'hui en voyant évoluer cette ravissante brune aux beaux yeux, toujours suprêmement élégante, que son jeu intelligent, légèrement en décalage avec celui de ses partenaires, a une allure très moderne. Venue des théâtres-bonbonnières, après un passage à la Paramount, elle rencontre Sacha Guitry, qui l'utilise au mieux dans le Roman d'un tricheur (1936), Faisons un rêve (1937), les Perles de la couronne (id.), le Mot de Cambronne (id.), Désiré (id.), Quadrille (1938) et Remontons les Champs-Élysées (id.). Après leur séparation et jusqu'à la guerre, elle continue de tourner, en cherchant à varier ses rôles : Dernière Jeunesse (J. Musso, 1939) ; Volpone (M. Tourneur, 1941). Ensuite, plus rien ou si peu que rien. Elle a marqué pourtant toute une époque du cinéma français.
DELVAUX (André)
cinéaste et musicien belge (Héverlé 1926).
Il étudie la philologie germanique et le droit à l'université de Bruxelles tout en poursuivant au Conservatoire royal des études de piano et de composition. Professeur de langues, il se passionne pour le cinéma et anime, à partir de 1956, la réalisation par ses élèves de plusieurs courts métrages en 16 mm. Il réalise parallèlement ses propres premiers courts métrages, écrit en 1958 la musique de deux courts films de son ami Jean Brismée, dirige plusieurs émissions télévisées, dont des séries sur Fellini (1960) et Rouch (1962), et anime un séminaire sur le langage cinématographique à l'université de Bruxelles. En 1963, il est chargé de cours de langage et de réalisation cinématographiques à l'Institut national supérieur des arts du spectacle de Bruxelles. Depuis, son activité se partage entre l'enseignement théorique du cinéma, la réalisation de ses films et celle de séries télévisées. Aussi s'est-il penché sur le cinéma polonais (1964) et les métiers du cinéma (Derrière l'écran, 1966, réalisé en marge du tournage des Demoiselles de Rochefort). L'Homme au crâne rasé (1966), produit avec l'aide de la télévision flamande, est une histoire d'amour fou où le rêve se confond avec la réalité sans que nous sachions jamais avec certitude si ce qui nous est donné sur l'écran participe de l'objectif ou du subjectif. Un soir un train (1968) élargit son audience tout en précisant ses thèses et son esthétique : dans le voyage hors des lieux et du temps qui mène Mathias (Yves Montand) à la rencontre de la femme qu'il a côtoyée sans la connaître jamais (Anouk Aimée) et de sa propre vérité, le réel bascule dans l'imaginaire. Plus encore que son film précédent, Delvaux construit celui-ci comme une œuvre musicale, non seulement dans son emploi raffiné du dialogue et des bruits mais aussi dans sa structure même. De nouveau, c'est dans les paysages d'une Flandre embrumée par l'automne qu'il trouve la correspondance secrète avec la conscience confuse qu'a Mathias de son identité morale et culturelle. Rendez-vous à Bray (1971), produit en France comme le précédent, adapte à l'écran une nouvelle de Julien Gracq et l'annexe à l'univers propre de Delvaux. Le thème, une fois encore, est celui de la frontière impossible à situer entre deux univers, le passé et le présent, et le réalisateur joue de la temporalité pour mieux en brouiller les repères. La musique est projetée au premier plan (le personnage principal est pianiste et accompagnateur de films muets, ainsi que le faisait Delvaux à la Cinémathèque royale). Avec Belle (1973), qui est une sorte de quintessence de toute son œuvre (un écrivain tombe follement amoureux d'une créature de rêve qu'il rencontre dans les landes d'Ardenne et qui n'existe peut-être pas), Delvaux renoue avec bonheur avec le sens du mystère de ses premiers films. Femme entre chien et loup (1979), en revanche, s'éloigne de ses thèmes de prédilection pour traiter la prise de conscience d'une femme dans la Flandre des années 40. Ce n'est plus l'imaginaire qu'il invoque, mais les souvenirs d'une période de l'histoire flamande que les mémoires ont occultée, et le réalisme minutieux avec lequel sont décrits les gestes quotidiens réaffirme l'ordre ailleurs contesté. Mais l'intimisme psychologique sied moins au cinéaste que les vertiges de l'imaginaire. Dans Benvenuta (1983), il tente de revenir aux jeux de miroir qui l'ont toujours fasciné en décrivant un itinéraire passionnel placé sous le double signe de la réalité et des fantasmes. En 1988 il signe une adaptation ambitieuse et consciencieuse de l'Œuvre au noir de Marguerite Yourcenar.
Films :
Forges (CM, 1956) ; le Temps des écoliers (Haagschool, CM, 1962) ; l'Homme au crâne rasé (De man die zijn haar kort liet knippen, 1966) ; les Interprètes (Tolken, CM, 1968) ; Un soir un train (id.) ; Rendez-vous à Bray (1971) ; Belle (1973) ; Avec Dierick Bouts (CM, 1975) ; Femme entre chien et loup (Een vrouw tussen hond en wolf, 1979) ; To Woody Allen, From Europe With Love (1980) ; Benvenuta (1983) ; Babel Opera (1985) ; l'Œuvre au noir (1988).
DEMARE (Lucas)
cinéaste argentin (Buenos Aires 1910 - id. 1981).
Il débute durant la phase d'expansion de l'industrie cinématographique (Dos amigos y un amor, 1938). Son grand succès reste la Guerre des gauchos (La guerra gaucha, 1942), d'après Leopoldo Lugones, tentative de fonder une épopée filmique nationale inspirée par les luttes d'indépendance. Cette ambition, qui s'abîme dans l'emphase académique et la rhétorique grandiloquente, le porte encore vers les évocations du passé, toujours avec un souci d'édification civique conservatrice. Ses autres titres significatifs sont Chingolo (1940), El cura gaucho (1941), Su mejor alumno (1944), Pampa barbare (Pampa bárbara, 1945, CO H. Fregonese), Los isleros (1951), Zafra (1959), Hijo de hombre (1961).
DE MATTEIS (Maria)
costumière italienne (Florence v. 1912).
Depuis 1935, elle travaille au théâtre et débute au cinéma en collaboration avec Gino Sensani en 1939 : Torna caro ideal (G. Brignone). Elle se spécialise dans les films d'aventures et de cape et d'épée, dont Don César de Bazan (R. Freda, 1942), la Fille du capitaine (La figlia del capitano, M. Camerini, 1947), Figaro qua, Figaro là (C. L. Bragaglia, 1950). Restent inoubliables ses costumes flamboyants pour le Carrosse d'or (J. Renoir, 1953), le Carrousel fantastique (E. Giannini, 1954), Guerre et Paix (K. Vidor, 1956), la Tempête (A. Lattuada, 1958), la Bible (J. Huston, 1966).