BARRYMORE (Ethel Mae Blythe, dite Ethel)
actrice américaine (Philadelphia, Pa., 1879 - Beverly Hills, Ca., 1959).
Sœur de Lionel et de John, issus tous trois du plus célèbre couple du théâtre new-yorkais de l'époque (Maurice Barrymore [Herbert Blythe] et Georgiana Drew), elle débute sur les planches à quinze ans avec son oncle John Drew et devient vedette de Broadway en 1900. La « première dame du théâtre américain » aborde sans complexe le cinéma en 1914 et l'abandonne en 1919 pour n'y revenir qu'en 1933 dans une entreprise familiale : Raspoutine et sa cour (R. Boleslawski), qui lui vaut un grand succès personnel (John est le prince Yousoupov et Lionel est Raspoutine). Elle retourne au théâtre puis réapparaît à l'écran dans un film expérimental de Clifford Odets, Rien qu'un cœur solitaire (1944) ; dès lors, elle entame une seconde carrière (le film lui a valu un Oscar [« best supporting actress »]). Elle jouera les mères abusives (la Rose du crime, G. Ratoff, 1947) ou angoissées (le Fils du pendu, F. Borzage, 1948) et les vieilles bourgeoises infirmes victimes de sombres machinations (Kind Lady, J. Sturges, 1951) ou au contraire énergiquement vouées à la défense de la bonne cause (Bas les masques, de Richard Brooks, en 1952, l'un de ses derniers et meilleurs rôles) avec la même conviction proche de l'outrance, mais justifiée par la certitude de sa présence dramatique, qui a quelque chose d'envoûtant. On n'oublie pas non plus ses apparitions dans le Portrait de Jennie (W. Dieterle, 1949), Deux Mains la nuit (R. Siodmak, 1945) ou The Secret of Convict Lake (M. Gordon, 1951). Dans le Procès Paradine (1948), Alfred Hitchcock a fait d'elle le souffre-douleur terrorisé de son époux, le juge (Ch. Laughton).
BARRYMORE (John Sidney Blythe Barrymore, dit John)
acteur américain (Philadelphia, Pa., 1882 - Los Angeles, Ca., 1942).
Pendant son adolescence, il essaie d'échapper à la tradition familiale en devenant dessinateur dans un journal, et aussi en contractant un alcoolisme qui ne fera que s'aggraver avec les années. Toutefois il débute à Broadway en 1903 et devient le membre le plus illustre de la « famille royale », notamment grâce à ses créations shakespeariennes (Richard III en 1920, Hamlet en 1922). Il avait débuté à l'écran dès 1913, non sans succès, en se faisant remarquer dans son étonnante interprétation de Docteur Jekyll et Mr. Hyde (J. S. Robertson, 1920), pour laquelle il refusa le secours du maquillage, passant d'une personnalité à l'autre par sa seule expressivité (et par des éclairages habiles). Il joua aussi dans l'un des derniers films d'Albert Parker (Sherlock Holmes, 1922) avant d'interpréter le rôle-titre de Beau Brummel (H. Beaumont, 1924), le capitaine Achab (The Sea Beast, Millard Webb, 1926) et Don Juan, film doté d'une partition sonore (A. Crosland, 1926), et dont la première à Los Angeles est un triomphe pour le procédé Vitaphone... et pour lui. Mais le parlant est sans doute arrivé trop tard pour cet acteur au regard magnétique et à l'admirable gestuelle, qui devait cependant beaucoup à sa voix. De plus, quatre mariages, qui furent autant d'échecs, et de nombreuses aventures entretenaient autour de lui une atmosphère de scandale. Excellent dans Grand Hôtel (E. Goulding, 1932) ou dans les Invités de huit heures (G. Cukor, 1933), il joue son propre rôle transposé dans Train de luxe (H. Hawks, 1934) mais ne peut voir aboutir un projet de Hamlet en couleurs (1933), car ses trous de mémoire se multiplient. Dans Roméo et Juliette (G. Cukor, 1936), il interprète Mercutio et surclasse toute la distribution. Mais un film autobiographique, The Great Profile (W. Lang, 1940), sonne le glas de sa célébrité tumultueuse, dont la décadence est le sujet de son ultime film, Playmates (D. Butler, 1941). Ainsi s'acheva, bouclée sur elle-même, une carrière inextricablement mêlée à la vie privée de l'acteur, qui a tourné au total dans cinquante films. Il a été le père de deux acteurs (malheureux) : Diana Barrymore (issue de son mariage avec la poétesse Michael Strange [Blanche Delrichs]) et John « Drew » Barrymore Jr (né de son mariage avec l'actrice Dolores Costello).
BARRYMORE (Lionel Blythe, dit Lionel)
acteur américain (Philadelphia, Pa., 1878 - Van Nuys, Ca., 1954).
L'aîné des trois Barrymore était sans doute le plus doué pour le cinéma. Il fut en tout cas le premier à en saisir l'importance : après ses débuts au théâtre, où il devint vedette en 1900, et un voyage en Europe, il entra à la Biograph dès 1909. Interprète de Griffith, il fut aussi souvent son coscénariste. En 1924, il se fixa à Hollywood. Partenaire attitré de Pearl White, puis de Greta Garbo, il saura adapter son jeu au parlant. Il enchante par un double rôle : celui surtout de la vieille Mrs. Mandelip dans les Poupées du diable (T. Browning, 1936). Son masque puissant et sa présence despotique lui vaudront de vieillir sans difficulté dans des rôles de composition, même lorsque (après 1938) il ne pourra plus jouer que dans un fauteuil de paralytique. Son cabotinage ne fut dès lors que la rançon d'une vigueur et d'une intelligence intactes, servies par une diction aussi admirable que celle de son frère John. Monstre sacré dans toute la force du terme, il fut aussi homme de radio, peintre et graveur, compositeur de musique et écrivain (il est notamment l'auteur de We Barrymores, 1951). Il avait dirigé quelques films muets, dont Life's Whirlpool (1917) avec sa sœur Ethel en vedette. Il reçut un Oscar en 1931 pour A Free Soul de Clarence Brown.
Films
(env. 250 films) : Friends (D. W. Griffith, 1912) ; Judith de Bétulie (id., 1914) ; The Exploits of Elaine (L. Gasnier, 1915, et les suites de ce long serial) ; America (D. W. Griffith, 1924) ; The Temptress (F. Niblo, 1926) ; Sadie Thompson (R. Walsh, 1928) ; Mata Hari (G. Fitzmaurice, 1932) ; Grand Hotel (E. Goulding, id.) ; les Invités de huit heures (G. Cukor, 1933) ; l'Île au trésor (V. Fleming, 1934) ; David Copperfield (Cukor, 1935) ; la Marque du vampire (T. Browning, id.) ; le Roman de Marguerite Gautier (Cukor, 1937) ; Capitaines courageux (V. Fleming, 1937) ; Vous ne l'emporterez pas avec vous (F. Capra, 1938) ; Depuis ton départ (J. Cromwell, 1944) ; Duel au soleil (K. Vidor, 1947) ; Key Largo (J. Huston, 1948) ; Main Street to Broadway (T. Garnett, 1953 : conformément à la tradition familiale, il y tient son propre rôle).