Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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KAVUR (Ömer)

cinéaste turc (Ankara 1944).

Il fait ses études supérieures en France. Après l'École des hautes études sociales, il opte pour le cinéma. Il commence par tourner des films documentaires et publicitaires avant de réaliser son premier long métrage, Eminé (Yatık Emine, 1974). Devenu producteur de ses propres films, Ömer Kavur est, avec son cinéma intimiste et personnel, le chef de file du « nouveau cinéma d'auteur turc » qui s'ouvre davantage à la vie citadine en s'intéressant aux interrogations existentialistes de ses personnages. Parmi ses films les plus réussis, notons les Gamins d'Istanbul (Yusuf ile Kenan, 1979), Hôtel de la mère patrie (Anayurt Oteli, 1986), le Voyage de nuit (Gece Yolculuǧu, 1987) et le Visage secret (Gizli Yüz, 1991), dont le scénario est cosigné par Orhan Pamuk, écrivain contemporain de premier plan. Après ce dernier, son chef-d'œuvre, Ömer Kavur réalise d'abord un court métrage, Rencontre (Buluşma, 1995), puis deux films qui ne peuvent éclipser les précédents : la Tour de l'Horloge (Akrebin Yolculuǧu, 1997) dont le scénario rappelle le Visage secret sans en atteindre l'intensité poétique, et Maison des anges (Melekler Evi, 2000) qui s'épuise dans la recherche d'une synthèse originale entre un sujet d'actualité politico-policier et le thème favori du cinéaste : la quête de soi à travers le temps, menée dans une géographie aux repères indéfinis.

Autres films :

Ah la belle Istanbul (Ah Güzel Istanbul, 1981), Une histoire d'amour amer (Kırık Bir Aşk Hikâyesi, id.), le Lac (Göl, 1982), Colin maillard (Körebe, 1984), la Route désespérée (Amansız Yol, 1985).

KAWAKITA (Nagamasa)

producteur japonais (Tokyo 1903 - id. 1981).

Après des études faites en Allemagne, il fonde en 1928 la Cie Towa, qui deviendra la plus importante entreprise d'import-export du cinéma au Japon, jusqu'à sa fusion avec la Cie Toho en 1977. Pendant la guerre sino-japonaise et la Seconde Guerre mondiale, il est vice-président de la China Motion Picture Company, qui se charge des coproductions avec le Japon. Tout en important un grand nombre de films étrangers, dont beaucoup de films français devenus des classiques, Kawakita s'occupe de coproductions avec l'étranger (‘ la Nouvelle Terre ’, A. Franck et M. Itami, 1937). Après la brève éclipse qu'il subit pendant l'occupation américaine d'après-guerre, il reprend ses activités importatrices pour la Towa et coproduit des films comme Fièvre sur Anatahan, de Josef von Sternberg (1953). Sa femme, Kashiko Kawakita, décédée en 1993, fut directrice de la Japan Film Library de Tokyo (devenue Kawakita Memorial Film Institute après la mort de Nagamasa en 1981).

KAWALEROWICZ (Jerzy)

cinéaste polonais (Gvozdets, Ukraine, 1922).

Il étudie la peinture et l'histoire de l'art et suit les cours de l'Institut du cinéma à Cracovie. Il assiste à partir de 1947 L. Buczkowski, S. Urbanowicz, W. Jakubowska ou T. Tanski et écrit en 1950 avec Kazimierz Sumerski un scénario original qui est primé et que les deux jeunes gens réalisent en 1952 : la Commune (Gromada). Inspiré d'un événement authentique, le film tente de concilier une approche néoréaliste et une soumission maladroite aux thèses politiques du moment. En 1954, Kawalerowicz adapte en deux parties un des plus célèbres romans polonais de l'après-guerre : dans Une nuit de souvenirs (Celuloza) et Sous l'étoile phrygienne (Pod gwiazd¸a frygijsķa), deux films rassemblés en France sous le titre Cellulose, adaptation de l'œuvre d'Igo Newerly, il décrit, à propos de la prise de conscience d'un travailleur avant la Seconde Guerre mondiale, la relation entre le destin individuel de son héros et l'évolution de toute une société. L'Ombre (Cień, 1956) fait revivre, sous le masque d'un film policier à tiroirs, plein d'ombres et de mystères, trois périodes de l'histoire polonaise entre 1943 et 1953 : l'occupation, l'après-guerre, les années du plan. Après Tout n'est pas fini / la Vraie Fin de la guerre (Prawdziwy koniec wielkiej wojny, 1957), Kawalerowicz connaît un premier succès international avec Train de nuit (Poci¸ag, 1959), où il mêle, à une réflexion quasi antonionienne sur la difficulté d'un rapport vrai entre les êtres, une description désabusée de la foule disparate que peut emporter un train de vacances et de ses réactions. La consécration vient en 1961 avec le prix obtenu à Cannes par Mère Jeanne des Anges (Matka Joanna od Aniołów), qui transpose dans une Pologne stylisée l'affaire des possédées de Loudun. Le cinéaste y évoque avec une superbe maîtrise l'antagonisme entre les diverses aliénations suscitées par le phénomène religieux et la revendication à exister pour lui-même ; il produit là son œuvre formellement la plus achevée. Pharaon (Faraon, 1966), belle superproduction ambitieuse tournée au Turkménistan, concilie avec une rare intelligence l'évocation minutieuse d'un passé lointain, la description des luttes pour le pouvoir politique, l'analyse psychologique individuelle et les exigences du spectacle populaire. Après le Jeu (Gra, 1969) et Maddalena (1971), coproduction italo-yougoslave qui reprend certaines préoccupations de Mère Jeanne des Anges, Kawalerowicz réaffirme sa place essentielle dans le cinéma polonais avec la Mort du président (´Smierć Prezydenta, 1977), qui évoque les problèmes politiques du monde contemporain au travers de la situation polonaise de 1922 et de l'assassinat du président libéral Narutowicz. Rencontre sur l'Atlantique (Spotkanie na Atlantyku, 1979) est une œuvre mineure, ce que ne saurait être son film suivant, Austeria / l'Auberge du vieux Tag (1982), évocation du microcosme tragique d'une communauté juive en Galicie à l'aube de la Première Guerre mondiale. Jerzy Kawalerowicz a dirigé de 1955 à 1968 l'équipe de réalisation Kadr ; il en est depuis 1972 le directeur artistique (sous sa nouvelle formule). Son épouse Lucyna Winnicka apparaît dans la plupart de ses films depuis Sous l'étoile phrygienne. En 1989, il réalise l'Otage de l'Europe (Jeniec Europy), qui évoque l'exil de Napoléon à Sainte-Hélène, en 1990, les Enfants Bronstein (Bronstein Kinder), d'après le roman de Jurek Becker, en 1996. Pourquoi ? (Za co ?) et Quo Vadis (id., 2001), une superproduction historique. ▲