BELAFONTE (Harold George, dit Harry)
chanteur et acteur américain (New York, N. Y., 1927).
Il passe son enfance à la Jamaïque, dont son père est originaire, puis s'engage dans l'US Navy (1944). En 1952, il est devenu l'un des chanteurs noirs les plus en vogue des cabarets et music-halls américains, introducteur notamment de rythmes antillais. Il débute à l'écran en 1953 et Preminger l'engage comme vedette masculine de Carmen Jones (1954). Malgré ses dons manifestes, sa carrière ultérieure au cinéma se limitera à quelques films seulement, dont Une île au soleil (R. Rossen, 1957), le Monde, la Chair et le Diable (R. Mac Dougall, 1959) et le Coup de l'escalier (R. Wise, 1959). Tout en poursuivant à la scène et par le disque sa fabuleuse carrière, Belafonte s'associera avec Sidney Poitier vers 1970 pour produire des films entièrement joués et réalisés par des Noirs, où il apparaît quelquefois. Les années 90 ont vu renaître en lui l'intérêt pour le cinéma : il est saisissant en mafieux dans Kansas City (R. Altman, 1995) et en bourgeois raciste dans White Man (White Man's Burden, Desmond Nakano, id.).
BELÉN (María del Pilar Cuesta Acosta, dite Ana)
actrice et cinéaste espagnole (Madrid 1950).
Elle débute à l'écran alors qu'elle est encore adolescente (Zampo y yo, Luis Lucía, 1964), et mène une carrière à la fois de chanteuse et de comédienne. Sa popularité et sa beauté ne l'empêchent pas de choisir ses rôles avec une certaine exigence, comme en témoignent Sonámbulos (1977) et Démons dans un jardin (1982) de Manuel Gutiérrez Aragón, La colmena (1982) et La casa de Bernarda Alba (1987) de Mario Camus, La corte de Faraón (1985) et Divinas palabras (1987) de José Luis García Sánchez, La pasión turca (1994) et Libertarias (1996), tous les deux de Vicente Aranda, L'amour nuit gravement à la santé (El amor perjudica seriamente la salud, 1996) de Manuel Gómez Pereira. Elle a mis en scène Cómo ser mujer y no morir en el intento (1991).
BEL GEDDES (Barbara Geddes Schreiver, dite Barbara)
actrice américaine (New York, N. Y., 1922).
Plus active au théâtre et à la télévision qu'au cinéma, où elle débute en 1947 avec The Long Night de Litvak, elle n'en sait pas moins interpréter avec beaucoup de clarté et de sensibilité des personnages féminins réservés, plus sympathiques que séduisants : Panique dans la rue (E. Kazan, 1950), Sueurs froides (A. Hitchcock, 1958) ou Millionnaire de cinq sous (M. Shavelson, 1959). Elle tient avec aisance un rôle de première importance dans Tendresse (G. Stevens, 1948), film qui lui permet d'obtenir un Oscar (« best supporting actress »), et Caught (Max Ophuls, 1949).
BELGIQUE.
Quelques points sont à préciser lorsqu'on aborde cette cinématographie. La Belgique, comme le Canada, est un pays biculturel, où se côtoient Wallons et Flamands. La proximité de la France attire à elle, depuis les origines du 7e art, acteurs, techniciens et cinéastes (Jacques Feyder*, Charles Spaak*, Fernand Ledoux*, Raymond Rouleau*, etc.). Si de purs Flamands comme Dekeukeleire* et Storck* ont dû souvent utiliser le français dans leurs films, la tradition flamande imprègne toutefois fortement les mentalités. Ces diverses interpénétrations culturelles donnent, tout de même, un caractère d'unité – ou du moins certains traits communs – au cinéma belge. Il ne nous a donc pas semblé utile de faire une étude différenciée de chaque zone. La présence de références picturales, allant de Bosch et Bruegel à Paul Delvaux et Magritte en passant par Félicien Rops et James Ensor, l'attachement à la terre, le goût du fantastique marquent cette cinématographie ; par ailleurs, le jeu des acteurs l'éloigne, jusqu'à une période récente, de la réussite au niveau de la fiction. Le cinéma belge s'impose surtout par le documentaire, l'essai formaliste et le film sur l'art.
La préhistoire du cinéma
compte deux Belges dans ses rangs. Étienne G. Robert (dit Robertson) met au point en 1797 le Phantascope, genre de lanterne magique qui autorise les ombres projetées à changer de forme par des embryons de mouvements. Joseph Plateau conçoit, lui, en 1832, le Phénakistiscope, dans lequel un disque, pourvu de fentes permettant de voir des images dessinées, donne l'illusion du mouvement.
C'est le 1er mars 1896 qu'a lieu la première projection publique du cinématographe ; au programme : quelques bandes des frères Lumière. En 1904, Louis Van Goitsenhoven inaugure le cinéma permanent dans la capitale. En 1906, le docteur Decroly tourne le premier film du cru. Le véritable précurseur du cinéma belge est le Français Alfred Machin*, alors employé chez Pathé*. Ce dernier, à l'opposé de Gaumont*, préfère envoyer ses réalisateurs sur place, travailler avec des équipes locales, plutôt que de diffuser à outrance les œuvres de la mère patrie de par le monde. Cette politique empêche le cinéma belge de se créer une tradition filmique authentique, à l'instar de ses voisins suédois ou danois. Machin reste en Belgique de 1912 à 1914 et y réalise une vingtaine de films, dont Histoire de Minna Claessens, premier long métrage du pays (1912). La Fille de Delft et Maudite soit la guerre, deux films de 1913, ont été sauvés. Dans le premier, un mélodrame, on note un emploi très novateur du montage alterné. Maudite soit la guerre, film prémonitoire, est terminé en septembre 1913 ; il est bloqué jusqu'en juin 1914 par son producteur que les prises de position pacifistes de Machin effarouchent.
De l'immédiat après-guerre jusqu'au milieu des années 20,
aucune œuvre marquante n'est réalisée. Mais le pays se dote d'infrastructures. Hippolyte De Kempeneer installe de vastes studios à Machelen en 1921 et y invite les Français Julien Duvivier* et Jacques de Baroncelli*. De nombreux documentaires et quelques films à scénario voient également le jour dans ces années-là. C'est à cette époque que débutent le marquis de Wavrin (Au cœur de l'Amérique du Sud, 1924) et Gaston Schoukens (Monsieur mon chauffeur, 1926), respectivement pionniers du film ethnographique et du film de fiction.
En 1927 apparaissent les premiers cinéastes belges authentiques : Charles Dekeukeleire* et Henri Storck*. Ce sont des avant-gardistes qui s'orientent ensuite vers le documentaire. Combat de boxe (1927), Impatience (1928), Histoire de détective (1929) et Flamme blanche (1930), films expérimentaux très radicaux, utilisant l'alternance du négatif et du positif, le montage rapide, etc., classent leur auteur, Charles Dekeukeleire, parmi les maîtres du genre. Son effacement historique est dû au fait qu'il échappe aux classifications : ses films, qui ne sont ni abstraits ni dadaïstes, se trouvent marginalisés par les orthodoxes de tout poil. Plus éclectique, à ses débuts, Henri Storck subit l'influence du surréalisme et de Flaherty*. Après quelques films tournés dans le format 9,5 mm en 1927-28, il réalise une série d'essais poétiques et impressionnistes : Images d'Ostende (1929), Sur les bords de la caméra (1932), Une idylle à la plage (1931). Le document social (Histoire du soldat inconnu, 1932 ; Borinage [coauteur : Joris Ivens*], 1933, peut-être le premier film belge engagé politiquement), et les films sur l'art (Regards sur la Belgique ancienne, 1936) vont se partager sa carrière. Ce sont en général des courts métrages. Il n'est guère présomptueux de comparer ce courant documentariste des années 30 au mouvement britannique du GPO. Œuvre dans laquelle le cinéaste fait un parallèle entre les hommes et les paysages qui ont jadis inspiré les peintres et leurs incarnations actuelles, Thèmes d'inspiration, de Dekeukeleire (1938), est, par exemple, primé à Venise. André Cauvin inaugure une nouvelle voie dans le domaine du film sur l'art en appliquant les potentialités du langage filmique (gros plans, mouvements de caméra, etc.) à l'analyse d'œuvres picturales : l'Agneau mystique et Memling (1938). Par la suite, Cauvin s'oriente vers le film ethnographique (Congo, terre d'eaux vives, 1939 ; Bwana Kitoko, 1955, etc.), dont il est un spécialiste avec Gérard De Boe (Kisantu, 1939 ; Yangambi, 1943, etc.). À côté de ces bandes, le film expérimental se porte également bien : la Perle d'Henri d'Ursel et Georges Hugnet (1929), Fleurs meurtries de Roger Livet et René Magritte (1929), Monsieur Fantômas d'Ernst Moërman (1937) en sont les plus notoires exemples.