Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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FRAKER (William A.) (suite)

William A. Fraker a également réalisé quelques films : un western nostalgique (Monte Walsh, 1970, avec Lee Marvin, Jack Palance et Jeanne Moreau), un thriller (A Reflection of Fear, 1973, est un film criminel avec Robert Shaw et Mary Ure) et The Legend of the Lone Ranger (1981), une évocation du fameux justicier masqué.

FRANCE.

On doit pour être honnête se contenter de survoler la période muette du cinéma français. Que reste-t-il, en effet, de cette production qui s'étale entre la Sortie des usines Lumière (1894) et la Passion de Jeanne d'Arc (C. Dreyer*, 1928) et sur laquelle on voudrait porter des jugements ? Un certain nombre de films dont les noms émaillent les histoires du cinéma et qu'on revoit dans des conditions médiocres de présentation, des catalogues qui vous livrent des nomenclatures de films de Méliès*, de Max Linder*, de Rigadin, des dates repères qui permettent de découper en tranches ces années lointaines. La préhistoire avec ses appareils aux noms rébarbatifs et ses pionniers en redingote (Marey*, Émile Reynaud*) ; les inventions (Lumière* animant la photo, Méliès devinant la richesse des spectacles qui en pourraient découler) ; les premières firmes : Pathé qui lance sur le marché les drames réalistes et les scènes religieuses de Zecca, crée une pépinière de cinéastes réunis sous le nom d'École de Vincennes et essaime des agences dans le monde entier. Gaumont et les courses poursuites filmées par Alice Guy* ou les drames de l'alcoolisme qui hantent les premiers écrans. La Star Films de Méliès qui s'épanouit au gré de ses trucages et de la fantaisie de son animateur et que l'on découvre avec ravissement. En 1908, les frères Laffite, financiers avisés, décident de donner ses lettres de noblesse au cinéma. L'Académie française et la Comédie-Française sont au rendez-vous, et l'Assassinat du duc de Guise (A. Calmettes* et Le Bargy*) ouvre la voie royale et toujours parcourue des adaptations. Tout le patrimoine littéraire et dramatique se voit ainsi colonisé par le cinéma. C'est un effort artistique considérable qui aboutit très vite à des solutions de facilité mais donne à la France, jusqu'à la déclaration de la guerre en 1914, une hégémonie incontestée. En même temps, une école comique se développe dans deux directions : celle du jeu aimable et fin de Max Linder, directement issu des comédies du Boulevard et dont la renommée dépasse vite les frontières (dans son sillage, Rigadin et ses facéties bourgeoises, Léonce [Léonce Perret*] et son « bon-garçonnisme » bedonnant) ; celle d'un burlesque apocalyptique, dévastateur et frénétique, que Jean Durand* déchaîne dans les séries Onésime ou Calino. De plus, inspiré par les bandes américaines, Jean Durand essaie d'implanter sous le ciel de Camargue un type de westerns à la française.

Victorin Jasset*, qui avait tourné une Vie du Christ après avoir monté des spectacles à grande mise en scène, s'oriente pour la firme Éclair vers des séries d'aventures populaires, soit d'origine américaine (Nick Carter, 1908-09), soit inspirées par des feuilletons français (Zigomar, 1911-1913 ; Balao, 1913 ; Protéa, id.). Louis Feuillade*, qui avait abordé tous les genres chez Gaumont, entreprend à partir de 1913 les différents épisodes de Fantômas d'après les romans de Pierre Souvestre et Marcel Allain. Il réussit à capter la sourde poésie du Paris de la Belle Époque en même temps que le satanisme de son héros le détourne des scénarios platement petit-bourgeois qu'il confectionnait alors.

1914 stoppe l'essor de la France. La production diminue et des cinéastes (Maurice Tourneur*, Léonce Perret, Albert Capellani*) se fixent à l'étranger, tandis que les films américains envahissent les écrans. On reprend la confection d'histoires qu'on dévide en épisodes à la manière d'Henri Pouctal* (Monte-Cristo, 1917-18). Ce dernier va encourager la carrière du jeune Abel Gance*, qui, après Mater Dolorosa (1917) et la Dixième Symphonie (1918), va entreprendre J'accuse, tourné à la fin de la Grande Guerre et très vite taxé d'antimilitarisme. Œuvre bouillonnante, puissamment rythmée et parfois ridicule où l'auteur bouleverse la mesure et la joliesse dont la France se faisait alors gloire.

Les fondateurs de l'art muet.

Cependant, le groupe surréaliste, de Breton à Soupault, s'enthousiasme pour le cinéma en général, et pour la Musidora des Vampires (Feuillade, 1915) en particulier. Peu à peu les critiques cinématographiques se font respecter : Louis Delluc*, en tête, qui va soutenir les noms d'Antoine, de Léon Poirier*, de Jacques de Baroncelli*, de Germaine Dulac*. Déjà la plupart de ces œuvres souffrent de leurs scénarios trop grêles et les conditions de travail en studios sont souvent déplorables. La production moyenne qui oscille entre les drames mondains et les bluettes sentimentales manque totalement d'imagination et Delluc a beau jeu de s'écrier : « Que le cinéma français soit du cinéma, que le cinéma français soit français ! », tout en proclamant son admiration pour les Allemands, les Danois et surtout les Américains. Louis Delluc, qui dirige alors la revue Cinéa, tourne quelques films avant de mourir prématurément. Ses sujets simples sont dominés par l'étude psychologique des personnages, par leur intégration au décor, par une recherche de l'atmosphère (Fièvre, 1921). Dans son sillage, les compositions de Marcel L'Herbier* recherchent l'esthétisme (l'Homme du large, 1920 ; El Dorado, 1921) mais se figent souvent dans la froideur et le maniérisme (Don Juan et Faust, 1922 ; l'Inhumaine, 1924). Germaine Dulac compromet les qualités de sa photographie et de ses montages dans des historiettes de mince intérêt, à une ou deux exceptions près. Le théoricien Jean Epstein* étonne la critique avec Cœur fidèle (1923) et son montage accéléré. Gance tourne dans le génie et la démesure la Roue (1921-1923), son premier film-fleuve, où se précipitent ses défauts et ses inoubliables morceaux de bravoure. Tout de suite après, il entame Napoléon, dont le tournage va durer quatre ans ; il y multiplie les prouesses techniques : pour sa projection, il préconisera le triple écran pour faire vibrer les salles au diapason de son lyrisme. En 1925, L'Herbier donne une adaptation soignée et pleine d'ironie de Feu Mathias Pascal, le roman de Pirandello. Il lui faut ensuite attendre la fin du muet et l'Argent (1929) pour trouver un sujet flattant son goût pour les recherches de prises de vues et le modernisme des décors. À Paris, des salles se spécialisent et, sous l'impulsion de Delluc, on crée des ciné-clubs. Le merveilleux à la Méliès et le réalisme à la Zecca* ont trouvé leur prolongement dans les inventions de René Clair* (Paris qui dort, 1924 ; le Fantôme du Moulin-Rouge, 1925 ; le Voyage imaginaire, 1926). Viendra ensuite le temps des quadrilles et des poursuites inspirés de Labiche (Un chapeau de paille d'Italie, 1928 ; les Deux Timides, 1929). Feyder*, attentif et minutieux, saisit le grouillement des Halles autour du père Crainquebille (1923), joue le pince-sans-rire avec Gribiche (1926), fait sourdre l'émotion de Visages d'enfants (id.) et sait détraquer avec ironie le mécanisme des inaugurations officielles ou des séances au Palais-Bourbon (les Nouveaux Messieurs, 1929).