RAFELSON (Bob)
cinéaste américain (New York, N. Y., 1935).
Il participe aux activités de différents théâtres d'avant-garde, dont le Living, et crée en 1966 le programme télé du groupe rock The Monkees, dont il produira ensuite les disques. En 1969, il fonde avec Bert Schneider et Steve Blauner les BBS Productions, qui, outre ses propres films, contribueront au financement d'Easy Rider, de Dennis Hopper, de Drive, He Said, de Jack Nicholson, et de la Dernière Séance, de Peter Bogdanovich. En marge des studios et de l'establishment, Rafelson devient un auteur complet dès son premier film : Head (1968), parodie inventive avec les Monkees. Suivront Cinq Pièces faciles (Five Easy Pieces, avec J. Nicholson, 1970) et The King of Marvin Gardens (1972), ballades insolites et douces-amères dont les protagonistes évoluent entre la poursuite du bonheur et le vertige de l'échec. Puis il dirige Stay Hungry (1976), comédie tendre dans le milieu des culturistes, avec Jeff Bridges et Sally Field. Remplacé après dix jours de tournage sur Brubaker (1980, réalisé par Stuart Rosenberg), Rafelson connaîtra son premier succès public avec le Facteur sonne toujours deux fois (The Postman Always Rings Twice, 1981), quatrième version du roman de James Cain, avec Jack Nicholson et Jessica Lange, dans laquelle il mêle la fatalité et le sexe, retrouvant les excès du thriller de la haute époque. Il réalise en 1987 la Veuve noire (Black Widow), un thriller psychologique, en 1989 Aux sources du Nil (Mountains of the Moon) qui rejoint la tradition hollywoodienne des films d'aventures à grand spectacle, en 1992 Man Trouble, et, en 1994, l'un des épisodes (Wet) du film Erotic Tales. En 1996, il signe l'un de ses meilleurs films, un policier sobre et efficace, Blood and Wine (id.), dans lequel il retrouve Jack Nicholson. Depuis, il a réalisé pour la télévision par cable Poodle Springs (1999), enquête inédite de Philip Marlowe, interprété cette fois par James Caan. ▲
RAFFERTY (John Goffage, dit Chips)
acteur australien (Broken Hills, New South Wales, 1909 - Sydney 1971).
Avant le grand boum du cinéma australien dans les années 70, Chips Rafferty est le plus célèbre représentant cinématographique de son pays. Grand de taille, sculpté à la serpe, viril, bon vivant, il incarne dans de nombreux films anglais et américains un certain cliché (la Loi du fouet, L. Milestone, 1952 ; les Rats du désert, R. Wise, 1953). Il participe aussi, dans un rôle très important, au célèbre Overlanders (Henry Watts, 1946), qui pendant longtemps fut la seule lettre de noblesse du cinéma australien. Il est symbolique qu'il tînt son dernier rôle dans Outback (du Canadien Ted Kotcheff, 1971), qui attirait l'attention mondiale sur la cinématographie australienne en pleine effervescence.
RAFT (George)
acteur américain (New York, N. Y., 1895 - Los Angeles, Ca., 1980).
Grandi dans le bas-quartier new-yorkais de Hell's Kitchen, boxeur puis danseur mondain, acoquiné de son propre aveu à la pègre, George Raft arrive à Hollywood avec le parlant. Sa silhouette mince, sa séduction sombre et calamistrée, son charme trouble font que l'on pense un instant l'utiliser comme un nouveau Valentino. Mais sa prestation dans Scarface (H. Hawks, 1932), où il joue un gangster onctueux et où il inaugure le geste de sa légende (la pièce lancée en l'air et régulièrement rattrapée), en décide autrement. On le voit quelquefois en danseur (Bolero, W. Ruggles, 1934 ; Rumba, Marion Gering, 1935) ; mais c'est en mauvais garçon séduisant qu'il atteint la popularité et qu'il réussit ses créations les plus plaisantes (Bowery, R. Walsh, 1933 ; la Clé de verre, F. Tuttle, 1935). Il a tendance aux expressions figées, ce qui limite considérablement son jeu (Dossier criminel, F. Lang, 1938) et explique que tant de ses films des années 40, sa grande période, déçoivent maintenant par leur aspect conventionnel et par la platitude de ses créations. Des films de la qualité de Femme dangereuse (1940) ou l'Entraîneuse fatale (1941), tous deux de Walsh, ou même de Nocturne (Edwin L. Marin, 1946) ou Johnny Allegro (T. Tetzlaff, 1949) sont rares. Après de graves ennuis avec le fisc, il connaît une chute de popularité, son style étant désormais démodé. Dès lors, il se contente de jouer George Raft, dur élégant et froid, partout où on le lui demande : en France, en Italie ou en Espagne, et il reprend même dans Certains l'aiment chaud (B. Wilder, 1959) son fameux geste fétiche. Son dernier film est Sextette (K. Hughes, 1978) aux côtés de Mae West, dont il avait été le premier partenaire de cinéma (Night After Night, A. Mayo, 1932). Ray Danton interprète son personnage dans le Dompteur de femmes (J. M. Newman, 1961).
RAHN (Bruno)
cinéaste allemand (Berlin 1898 - id. 1927).
Auteur très méconnu, il a produit dans les années 20 une œuvre de qualité qui se rattache, tant par le fond que par la forme, au meilleur cinéma allemand de la période. S'attachant particulièrement à filmer les bas-fonds, et très tourné vers le problème de la prostitution, il a réalisé notamment deux films importants : la Tragédie de la rue (Dirnentragödie, 1927) et Der Kleinstadtsünder (id.). Il est également l'auteur de Vom Rande des Sumpfes (1919) et de Hölle der Liebe (1926).
RAI (Himansu)
producteur et acteur indien (Bengale 1940).
Il monte à la fin du muet, avec l'Allemagne, des coproductions telles que la Lumière de l'Asie (Light of Asia, 1926), Shiraz (id., 1928), le Jet de dés (A Throw of Dice, 1930), puis, au début du parlant, avec l'Angleterre, Destin (Karma, 1933). Il épouse l'actrice Devika Rani, fonde en 1935 la Bombay Talkies, construit un studio, engage des techniciens étrangers, gouverne 400 employés et produit huit films, que réalise le cinéaste allemand Franz Osten. Ces œuvres en langue hindi, qu'interprète le plus souvent Devika Rani, et qui ont eu un succès fabuleux, s'attachent à des sujets sociaux comme l'Intouchable (Achhut Kanya, 1936) ou mythologiques comme Savitri (id., 1937), tiré du Mahabharata.
RAIMU (Jules Muraire, dit)
acteur français (Toulon 1883 - Neuilly-sur-Seine 1946).
Étonnante carrière que celle qui mène ce jeune Toulonnais depuis ses débuts dans les caf'conc' méridionaux, sous le nom de Rallum, jusqu'à la gloire de la Comédie-Française et qui le voit disparaître des écrans où il était avant tout le César de Pagnol, dans l'habit noir d'un héros dostoïevskien, amer et haineux. Le succès, qu'il trouve d'abord dans le Midi, le pousse à Paris, où le Boulevard lui fait sa place, consacrant une présence monumentale, les sonorités d'une voix que l'acteur sait instinctivement maîtriser et une force comique qui s'épanouit dans des pièces anodines ou dans des revues, plaisir d'un moment. Pagnol, qui vient d'écrire Marius, lui offre de créer le rôle de Panisse, Raimu refuse et revendique celui de César, où il se sent à l'aise, où il va jouer de sa faconde, de ses outrances et aussi de son émotion. C'est un triomphe qui lui ouvre les portes des studios, d'où il ne sortira plus seize ans durant. Au temps du muet, il avait fait de courtes apparitions à l'écran : l'Homme nu (Henri Desfontaines, 1911) et l'Agence Cacahuète (Roger Lion, 1912). Mais c'est le parlant qui en fait l'une des plus importantes vedettes françaises de son époque. Il restera marqué à jamais par la trilogie de Pagnol : Marius (A. Korda, 1931), Fanny (M. Allégret, 1932) et César (Pagnol, 1936), mais ne dédaignera pas, bien au contraire, les rires populaires et, pour les provoquer, ne reculera ni devant la charge ni devant la grosse caricature. Il en va ainsi de ses compositions dans Mam'zelle Nitouche (M. Allégret, 1931), Théodore et Cie (Pierre Colombier, 1933), Charlemagne (id., 1934), J'ai une idée (Roger Richebé, 1934), le Fauteuil 47 (Fernand Rivers, 1937) et, plus curieusement, celles de Tartarin de Tarascon (R. Bernard, 1934) et l'Arlésienne (M. Allégret, 1942). Il sait aussi pincer la corde mélodramatique avec ironie dans le Secret de Polichinelle (A. Berthomieu, 1936), avec excès dans le Héros de la Marne (André Hugon, 1938), et tenir sa partie dans les fantaisies de Sacha Guitry (Faisons un rêve, 1937 ; les Perles de la couronne, id.). Les producteurs avisés aiment à lui confier des scènes à effet, à crescendo, où la colère monte savamment, éclate, roule et tourne dans un débit tonitruant où aucune syllabe ne s'égare : Un carnet de bal (J. Duvivier, 1937), les Nouveaux Riches (Berthomieu, 1938), Noix de coco (Jean Boyer, 1939), Monsieur Brotonneau (Alexandre Esway, 1939). Le feu d'artifice vocal qui clôt Monsieur la Souris (G. Lacombe, 1942) reste inoubliable. Que son allure volontiers pateline dissimule un autre bonhomme, qu'un chef de bande se maquille en bon commerçant (l'Étrange Monsieur Victor, J. Grémillon, 1938) ou en notable de petite ville (le Bienfaiteur, H. Decoin, 1942), sa performance est remarquable mais écrasante pour ses partenaires. Que, plus subtilement, l'avocat alcoolique et taciturne vole au secours de sa fille dans une plaidoirie enflammée (les Inconnus dans la maison, Decoin, id.), le résultat, convaincant, est identique. Aussi bien lorsqu'il s'amuse à jouer les Fregoli dans Théodore et Cie, le compositeur à double face de Mam'zelle Nitouche, les sosies des Jumeaux de Brighton (Claude Heymann, 1936) ou le maître d'hôtel qui, dans Charlemagne, devient chef de tribu.