JESSNER (Leopold)
cinéaste et acteur allemand (Königsberg 1878 - Los Angeles, Ca., États-Unis, 1945).
Sa carrière est surtout celle d'un metteur en scène de théâtre, mais il est également acteur et mérite d'être signalé parmi les cinéastes occasionnels pour deux tentatives intéressantes : Escalier de service (Hintertreppe, avec Henny Porten et Fritz Kortner ; CO Paul Leni, 1921) et pour une adaptation de l'œuvre de Wedekind Loulou (Der Erdgeist, 1923). Il a également tourné Reigen (1922) et collaboré à la Maria Stuart de Friedrich Feher en 1927. Il part pour les Pays-Bas en 1933, puis pour la Grande-Bretagne, enfin pour les États-Unis à l'avènement du nazisme et subsistera, à Hollywood, de tâches mineures et anonymes.
JESSUA (Alain)
cinéaste français (Paris 1932).
Formé par l'assistanat auprès de réalisateurs tels que Jacques Becker, Max Ophuls, Marcel Carné et Yves Allégret, Alain Jessua obtient le prix Jean-Vigo en 1957 pour son court métrage Léon la Lune, coréalisé par Robert Giraud, peinture d'un de ces marginaux dans tous les sens du terme (ici un clochard) qui peupleront ses films ultérieurs. Peu copieuse, l'œuvre de Jessua est à la fois originale et inachevée. Auteur de ses propres scripts, qu'il s'agisse de scénarios originaux ou d'adaptations, Jessua va à l'épure, à l'essentiel, sans fioritures, sans « mise en scène », au sens de mise en valeur du sujet, de l'anecdote ou du jeu de l'acteur — un peu à la manière d'un Buñuel, mais sans la richesse de l'imaginaire. Ses plus belles réussites sont celles qui bénéficient de l'argument le mieux charpenté, la mise en scène se limitant à mettre au jour la folie des personnages et des systèmes dans lesquels ils sont pris. L'hyperréalisme de la forme contribue à la crédibilité de récits basculant généralement dans le fantastique brut de Traitement de choc (1973), qui modernise le thème des vampires, ou Frankenstein 90 (1984), le fantastique social d'Armaguedon (1977), les Chiens (1979), Paradis pour tous (1982) ou encore le fantastique psychologique (la Vie à l'envers, 1963 ; Jeu de massacre, 1967). On peut déplorer chez ce cinéaste à part, très attachant au demeurant, un défaut fréquent d'élaboration qui empêche l'œuvre de s'épanouir dans ses développements possibles (ce sera notamment le cas pour En toute innocence, 1988, exercice de style à la manière d'Hitchcock, malheureusement inabouti). ▲
JEUNET (Jean-Pierre)
cinéaste français (Roanne 1955).
Passionné de cinéma d'animation, il est l'auteur de plusieurs courts métrages, dont le Manège (César du court métrage 1980) et le Bunker de la dernière rafale (1981), coréalisé par Marc Caro ; il est aussi l'auteur de Foutaises (1989), un grand succès de festivals. Après quelques années de cinéma publicitaire, Caro et Jeunet présentent Delicatessen (1991), un long métrage influencé par la bande dessinée, provocateur et bouffon. Le succès public est au rendez-vous, contrairement à l'œuvre suivante du duo, la Cité des enfants perdus (1995), rare tentative de fantastique dans le cinéma français, dont l'organisation du récit n'est pas à la hauteur des qualités visuelles. Les compétences techniques affirmées par Jean-Pierre Jeunet l'introduisent aux États-Unis pour la réalisation de Alien IV-Résurrection, quatrième épisode de la fameuse saga de science-fiction. Malgré le succès de l'entreprise, il revient en France tourner dans des conditions bien différentes le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain (2001), qui rencontre un succès populaire remarquable.
JEWISON (Norman)
cinéaste américain d'origine canadienne (Toronto, Ontario, Canada, 1926).
Étrange carrière que celle de cet homme de télévision qui passe de comédies poussives avec Doris Day à la superproduction ambitieuse... Appelé en catastrophe pour remplacer Sam Peckinpah sur le Kid de Cincinnati (The Cincinnati Kid, 1965), il saisit l'occasion de faire un film accrocheur sur le monde du poker. Dès l'année suivante, on décèle dans la comédie Les Russes arrivent (The Russians Are Coming, 1966) une volonté rageuse tout à fait nouvelle. Couronné de lauriers pour Dans la chaleur de la nuit (In the Heat of the Night, 1967), bon policier sur thèse antiraciste, Jewison devient un réalisateur de prestige. Ce qui ne signifie pas que tout est bon dans sa filmographie. L'Affaire Thomas Crown (The Thomas Crown Affair, 1968) se perd dans les méandres d'un scénario chantourné et d'un montage à la virtuosité fatigante. Jésus-Christ Superstar (id., 1973) étouffe sous le gigantisme. Rollerball (id., 1975) montre qu'on ne peut imiter impunément Stanley Kubrick. Mais il y a aussi une grande fluidité dans le musicial Un violon sur le toit (Fiddler on the Roof, 1971). Et on peut se passionner pour la vigoureuse saga du syndicalisme de F. I. S. T. (id., 1978) ou pour le démontage un peu simpliste de Justice pour tous (And Justice for All, 1979). Bilan modeste, certes, mais suffisant pour faire de Jewison un bon artisan : les Meilleurs Amis (Best Friends, 1982), Soldier's Story, (1985) ; Agnès de Dieu (Agnes of God, id.) ; Éclair de lune (Moonstruck, 1987) ; Un héros comme tant d'autres (In Country), 1989 ; Larry le liquidateur (Other People's Money, 1991) ; Only You (id.,1994), Bogus (1996) ; Hurricane Carter (The Hurricane, 1999).
JIANG WEN (Wen)
acteur et cinéaste chinois (Tang-shan 1963).
A 17 ans, il est admis à l'Institut d'art dramatique de Pékin. À peine deux ans après son diplôme, il fait ses débuts au cinéma en interprétant avec beaucoup de classe le rôle complexe de l'empereur Pu Yi dans la Dernière Impératrice (Wei dai huanghou, Chen Jialin et Sun Jinguo, 1985). Dans la Ville des Hibiscus (Furong zhen, Xie Jin, 1986), il joue, face à Liu Xiaoqing, le personnage d'un paysan condamné comme « droitier ». L'année 1987 est faste pour lui puisque, après un rôle dans le Palanquin des larmes (Jacques Dorfmann), il est la vedette, avec Gong Li, du Sorgho rouge (Zhang Yimou), Ours d'or au Festival de Berlin 1988, puis celle de Chun Tao (id., Ling Zifeng, 1988). En 1989, c'est encore lui que l'on trouve dans l'Année de tous les malheurs de Xie Fei – Ours d'argent au Festival de Berlin 1990 –, adaptation d'un roman de Liu Heng qui décrit le mal de vivre des jeunes de la capitale. En 1990, c'est une nouvelle évocation de la cour mandchoue avec Li Lianying, eunuque impérial (Da Taijian, Li Lianying, Tian Zhuangzhuang), où s'exprime, plus que jamais, sa complicité avec Liu Xiaoqing. Après la Piste (Long teng zhongguo, Zhou Xiaowen et Manfred Wong, 1992), Jiang Wen, que beaucoup considèrent comme le meilleur acteur de sa génération, décide de passer à la réalisation. En 1994, il achève Des jours radieux (Yangguang canlan de rizi), d'après un roman cynique de Wang Shuo : Comme des bêtes sauvages, qui oppose le Pékin d'aujourd'hui aux souvenirs de la Révolution culturelle, quand le malheur de certains ne semblait pas affecter le bonheur des autres. Il continue sa carrière d'acteur avec notamment les Sœurs Soong (Songjia Huangchao, Cheung Yuen-Ting, 1995), l'Ombre de l'empereur (Qin Yong, Zhou Xiaowen, 1996) et Keep Cool (Zhang Yimou, 1997). Pour Les démons à ma porte (Guizi Lai Le, 2000), une tragi-comédie – dont il tient le rôle principal – qui se situe dans un village pendant la guerre sino-japonaise, il remporte le Grand Prix du Jury au festival de Cannes 2000.