SANTELL (Alfred)
cinéaste américain (San Francisco, Ca., 1895 - Salinas, Ca., 1981).
Après des études d'architecture, il devient à la fois scénariste, décorateur, producteur, et commence à diriger des films en 1915, notamment pour Mack Sennett. Son travail ne se fait pas remarquer par son originalité, mais, avec le parlant, il réalise des œuvres plus intéressantes, par exemple le dense mélodrame le Calvaire de Flora Winters (The Life of Vergie Winters, 1934), avec une Ann Harding remarquable. Il filme avec beaucoup de retenue et de délicatesse la pièce que Maxwell Anderson avait consacrée à Sacco et Vanzetti, Winterset (1936), où Margo fait une composition réussie. On dit aussi du bien de son adaptation du Singe velu (The Hairy Ape, 1944) d'après Eugene O'Neill, avec William Bendix et Susan Hayward. Il s'est même essayé au film exotique avec Aloma princesse des îles (Aloma of the South Seas, 1941). Il se retire en 1946.
SANTIAGO (Hugo Santiago Muchnik, dit Hugo)
cinéaste d'origine argentine (Buenos Aires 1939).
Vit et travaille en France depuis le début des années 70. Il avait suivi des études musicales, littéraires et philosophiques à l'université de Buenos Aires, puis travaillé pour la TV. On le retrouve en France assistant de Robert Bresson pour le Procès de Jeanne d'Arc (1962). De retour en Argentine, il conçoit deux moyens métrages : les Contrebandiers (1967) et les Caïds (1968). Il réalise l'année suivante, d'après un scénario qu'il coécrit avec Jorge Luis Borges et Adolfo Bioy Casares, Invasion (1969), son premier long métrage. L'auteur utilise le thème du groupe qui lutte contre un environnement hostile, une puissance maléfique, sans vraiment nous aider à identifier les camps en présence. Un sens très stylisé du mystère sourd de cette bande curieuse. Toujours sous le parrainage des mêmes écrivains, il met en scène les Autres, un film qui représente officiellement la France au festival de Cannes, en 1974. Essai remarquable sur la polyvalence des personnalités, cette œuvre demeure sans descendance dans notre cinéma : on y note un travail sur l'image et les structures sonores. Avec Écoute voir (1978), ou les aventures d'une femme détective confrontée à divers pouvoirs plus ou moins occultes, le cinéaste se fourvoie et nous donne un film maîtrisé mais glacial et artificiel, usant un peu trop de certains clichés à la mode. Après sept ans de silence, il tourne les Trottoirs de Saturne (1985), qui met en scène un musicien argentin exilé en France. Pour la télévision, il réalise Électre (1987) et la Vie de Galilée (1992).
SANTONI (Joël)
cinéaste français (Fès, Maroc, 1943).
Entré par hasard dans le monde du cinéma grâce à l'amitié de Barbet Schroeder, il obtient, en 1971, l'avance sur recettes pour les Yeux fermés, long métrage prometteur narrant la cécité volontaire d'un homme en pleine crise existentielle. Après une « étude-reportage » sur le monde du cyclisme professionnel (la Course en tête, 1974), il aborde la comédie satirique avec les Œufs brouillés (1976), évocation des tentatives démagogiques d'un président de la République. L'insuccès public le pousse, après plusieurs années, à s'essayer au récit noir et d'angoisse avec Mort un dimanche de pluie (1986).
Autres films :
Le marché est ouvert (CM1967), la Fausse Querelle (CM 1968), Ils sont grands ces petits (1979).
SANTONI (Clemente, dit Tino)
chef opérateur italien (Rome 1913).
Après des études de peinture, il travaille dès 1930 comme assistant opérateur et devient chef opérateur pour Un mare di guai (C. L. Bragaglia, 1940). Sa carrière comprend environ 70 films appartenant à tous les genres, parmi lesquels : La prima donna che passa (M. Neufeld, 1940), L'avventuriera del piano di sopra (R. Matarazzo, 1941), Addio, mia bella Napoli ! (M. Bonnard, 1946), I due orfanelli (M. Mattoli, 1947), Totò al Giro d'Italia (Mattoli, 1948), Primavera (R. Castellani, 1950), Bannie du foyer (Matarazzo, 1951), La paura fa 90 (Giorgio C. Simonelli, id.), Giuseppe Verdi (Matarazzo, 1953), Un eroe dei nostri tempi (M. Monicelli, 1955), Tam Tam Mayumbe (Gian Gaspare Napolitano, id.), la Traversée fantastique (Dagli Appennini alle Ande, Folco Quilici, 1959), Été violent (V. Zurlini, id.), la Fille à la valise (id., 1961), Maciste dans la vallée des lions (C. L. Bragaglia, 1962), Totò contro i quattro (Steno, 1963), I due maghi del pallone (Mariano Laurenti, 1970), La vedova inconsolabile ringrazia quanti la consolarono (id., 1973).
SANTOS (Carmen)
actrice, productrice et cinéaste brésilienne (Vila Flor, Portugal, 1904 - Rio de Janeiro 1952).
Arrivée au Brésil à dix-huit ans, elle est comédienne dès 1920, puis s'intéresse à la production et devient une personnalité clé dans la bataille pour la consolidation du cinéma brésilien. Elle collabore avec les deux principaux créateurs du muet, en tant qu'interprète et coproductrice : Mario Peixoto (Limite, 1931) et Humberto Mauro (Sangue Mineiro, 1930). En 1933, elle fonde la Brasil Vita Filmes, à Rio de Janeiro, l'une des tentatives industrielles du début du parlant, et produit plusieurs longs métrages de fiction de Mauro. Ensuite, pendant dix ans, elle s'attelle à un projet qui lui tient à cœur : Inconfidência Mineira (1948), reconstitution d'une conspiration contre le pouvoir colonial, mis en scène, produit, écrit et joué par cette femme dynamique et charmante, singulière pour son temps.
SANTOS (Nelson Pereira dos)
cinéaste brésilien (São Paulo 1928).
Véritable précurseur du Cinema Novo, il travaille dans la presse, après des études de droit. Sa formation idéologique est marquée par l'ambiance de libéralisation politique qui a succédé à la Seconde Guerre mondiale et à la chute de Getúlio Vargas, seule période de légalité pour le parti communiste brésilien. Il débute par des courts métrages d'inspiration militante : Juventude et Atividades Políticas em São Paulo (1950). Durant l'effervescence concomitante à la dégringolade des grands studios Vera Cruz, il défend la production indépendante et une thématique nationale comme signe distinctif du cinéma brésilien, au cours des congrès organisés par la profession (Rio de Janeiro, 1952 ; São Paulo, 1953). Rio 40 Graus (1955), puis Rio Zona Norte (1957), ses premiers longs métrages, introduisent au Brésil les leçons du néoréalisme italien et les débats sur un réalisme critique. Le premier, interdit un moment par la censure, suscite un large mouvement de solidarité. Nelson Pereira dos Santos joue ainsi d'emblée un rôle considérable, car il apparaît comme un porte-drapeau, pionnier d'un renouvellement, seule véritable issue pour le cinéma brésilien d'alors. Situations et personnages populaires sont interprétés par des comédiens inconnus ou bien utilisés hors de leur emploi habituel (Grande Otelo, dans Rio Zona Norte), décrivant le bouillonnement social souterrain de la métropole. Il produit O Grande Momento (Roberto Santos, 1958), sur une même lancée. Cependant, son relatif isolement initial l'empêche de compléter la trilogie envisagée sur Rio et l'oblige à composer avec des formules plus conventionnelles, tout en améliorant son métier : Mandacaru Vermelho (1961) constitue sa première incursion dans l'univers rural du Nordeste ; Boca de Ouro (1962) propose une version de l'œuvre de Nelson Rodrigues plus attirée par les comportements sociaux que par l'étude psychologique ou morale. Nelson Pereira dos Santos se lie aux nouvelles générations, auxquelles il s'intègre harmonieusement : frère aîné plutôt que patriarche, il monte Barravento (id.) pour Glauber Rocha, Pedreira de São Diogo (id.) et Maioria Absoluta (1964) pour Leon Hirszman. Vidas Secas (1963) était déjà un projet ancien au moment où son éclat contribue à assurer le triomphe du Cinema Novo. Cette version du roman de Graciliano Ramos adopte le dépouillement et la rigueur d'une épure, son réalisme n'ignore pas une certaine abstraction, l'émotion s'y distille avec mesure. Le Nordeste, cœur du Brésil sous-développé, y figure les contradictions du pays tout entier, telles que l'entendaient les courants idéologiques hégémoniques de l'époque. Néanmoins, signe de l'instabilité dont souffre le Cinema Novo même au faîte de son épanouissement, le cinéaste se partage entre diverses activités, pédagogiques (il contribue à l'introduction du cinéma aux universités de Brasília et Niterói), réalisation de documentaires ou long métrage de commande (El Justicero, 1967). La vague contestataire que connaît le cinéma brésilien à la fin des années 60 le plonge dans les expérimentations les plus variées. Il ne craint pas les risques, accepte toutes les aventures, souscrit aux remises en cause avec ce zeste de nonchalance dont il ne se départit guère. On le voit donc adhérer à l'underground, puis apporter au tropicalisme, à l'allégorie, à la « réhabilitation » de l'anthropophagie (courant radical du modernisme brésilien), à la politique-fiction, sa propre invention : Soif d'amour (1968) ; l'Aliéniste (1970) d'après Machado de Assis ; Qu'il était bon, mon petit Français ! (1971) ; Quem é Béta ? (1973). Après avoir parfois poussé à leur limite les recherches autour de l'éclatement du langage filmique, il s'engage sur une voie encore différente. Il participe du recentrage néoclassiciste opéré par la plupart des cinéastes brésiliens, en y introduisant un trait original : la volonté de puiser les éléments d'une dramaturgie à large audience dans l'imaginaire populaire. Ainsi, O Amuleto de Ogum (1974) et Tenda dos Milagres (1977, d'après Jorge Amado) intègrent les rites et croyances d'origine africaine, jadis ignorés ; Na Estrada da Vida (1980) épouse la musique « caipira » (rurale) transplantée à São Paulo, à chaque fois avec le même ton parodique qui brouille l'identification et la distance. Enfin, il porte à l'écran les Mémoires de prison de Graciliano Ramos (1984), un projet caressé pendant longtemps. Il recourt encore aux écrivains auxquels il doit sa formation dans Bahia de tous les Saints (1986, d'après Amado) et la Troisième Rive du fleuve (1993, d'après Guimarães Rosa).