Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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TCHÉCOSLOVAQUIE. (suite)

Le renouveau des années 80-90.

La fin des années 80 avec les grands bouleversements politiques inaugurés par la perestroïka soviétique et qui s'achèvent avec la « révolution de velours » de novembre 1989 et l'élection de l'écrivain Vaclav Havel à la présidence de la République permettra au cinéma tchécoslovaque de reconquérir peu à peu ses positions perdues. Hanak gagne un Ours d'argent pour la mise en scène au Festival de Berlin en 1989 (pour J'aime tu aimes, réalisé neuf ans auparavant), Menzel remporte l'Ours d'or de ce même festival l'année suivante (Pour Alouettes, un fil à la patte, réalisé... vingt et un ans auparavant!), les films censurés et interdits sont à nouveau programmés et cette « sortie de prison » connaît un grand retentissement international (Hanak et Menzel sont dans ce cas mais aussi Karel Kachyña pour l'Oreille [1969], Evald Schorm, Pavel Juraček, Jan Nemeč, Vojtech Jasný, Juraj Jakubisko, Zdenek Sirovy, Drahomíra Vihanová). Parallèlement, une nouvelle génération commence à s'implanter dans un paysage qui s'éclaircit. Peut-être bénéficiera-t-elle de ce nouveau climat de liberté qui ravive enfin les couleurs du cinéma tchécoslovaque, après deux décennies où il s'est trouvé pratiquement écarté de la scène internationale. Parmi les nouveaux noms prometteurs, on trouve : Miloš Zabransky (‘ Une maison pour deux ’ [Dům pro dva], 1988 ; Václav Křístek (les Animaux dans la ville [Zvířata ve městě], 1989) ; Irena Pavlásková (le Temps des larbins [Čas sluhů], 1989) ; Fero Fenič (‘ Étranges créatures ’ [Zvláštní bytosti], id.). Le début des années 90 est marqué d'abord par la privatisation de la production et de la distribution, et aussi par la séparation politique des deux pays formant la Tchécoslovaquie.

Depuis 1992, il faut donc distinguer le cinéma tchèque du cinéma slovaque. Les prévisions pessimistes d'une mort rapide de la production cinématographique ne se sont pas révélées entièrement exactes même si, à l'instar de tous les pays qui faisaient parti de l'ex-bloc communiste d'Europe Centrale les premières années de transition sont marquées par une certaine confusion qui n'est guère favorable à la création artistique. L'invasion du cinéma américain modifie le paysage et la distribution et les nouveaux producteurs misent avant tout sur des projets susceptibles d'être acceptés par le grand public particulièrement sollicités par les « produits » étrangers. De nouveaux talents commencent néanmoins modestement à s'imposer comme Zdeňek Tyc avec Un orphelin nommé Vojtěch (Vojtěch, řečeny sirotek, 1990) et le Fil du rasoir (Žiletky, 1994), Milan Šteindler avec Merci pour chaque jour nouveau (Díky za každe nové ráno, 1995), Saša Gedeon avec l'Été indien (Indiánské leto, 1995) et le Retour de l'Idiot (Návrat Idiota, 1999), Petr Zelenka avec les Boutonniers (Knoflíkaři, 1997), Petr Václav avec Marian (id., 1996), Alice Nellis, Jan Hřebejk, David Ondříček.

La génération de la « nouvelle vague » des années 60 reste active : Jaromil Jireš, Jíři Menzel, Vera Chytilova, Juraj Jukabisko signent des œuvres qui témoignent d'une vitalité toujours en éveil. On note le retour à l'écran de Jan Němec et Vojtech Jasný longtemps absents de leur pays natal et l'excellente forme d'un autre « vétéran » Karel Kachyňa qui signe successivement deux œuvres remarquables : la Vache (Krava, 1993) et Hanele (1999).

Résolument marginal mais toujours aussi créatif, le maître de l'animation tchèque Jan Švankmajer s'aventure avec brio dans le long métrage après l'expérience d'Alice en 1988 en réalisant Faust (1994), les Conspirateurs du plaisir (Spikleno slasti, 1996), Otesánek (2000) où les éléments animés et les personnages de fiction s'interpénètrent parfois, rendant l'univers de l'artiste plus mystérieux, intrigant et insolite. Mais la production tchèque est surtout « dopée » par la réussite d'un jeune cinéaste, Jan Svěrak, qui, après avoir gagné la sympathie du public et de la critique avec l'École élémentaire (Obecná škola, 1991), Accumulátor (1993) et l'Excursion (Jizda, 1994), triomphe à Hollywood en remportant l'Oscar du meilleur film étranger 1996 avec Kolya (Kolja).

En Slovaquie la production reste assez faible et peine à s'exporter. Néanmoins Martin Šulik (le Jardin [Záhrada], 1995) se distingue par une manière très personnelle de saisir le cocasse et le bizarre de la quotidienneté en franchissant parfois les barrières du surréalisme poétique.

TCHERINA (Monique Tchemerzine, dite Ludmilla)

danseuse et actrice française (Paris 1925).

Ballerine à la beauté glaciale, étoile des Ballets de Monte-Carlo, partenaire privilégiée de Serge Lifar, elle interprète un rôle de danseuse auprès de Louis Jouvet dans Un revenant (Christian-Jaque, 1946). Elle danse aussi, fort décorativement, dans les Chaussons rouges (M. Powell et E. Pressburger, 1947) et dans les Contes d'Hoffmann (id., 1951). Elle est, toujours très hiératique, la Fille de Mata Hari (La figlia di Mata Hari, Renzo Merusi, 1955) et joue les tentatrices antiques (Spartacus, R. Freda, 1953 ; le Signe du païen, D. Sirk, 1954). Après s'être investie totalement dans le médiocre les Amants de Teruel (R. Rouleau, 1962), elle n'a plus paru à l'écran.

TCHERKASSOV (Nikolaï) [Nikolaj Konstantinovič Čerkásov]

acteur soviétique (Saint-Pétersbourg 1903 - id. 1966).

Fils d'un employé des chemins de fer, il s'adonne à la musique dès l'enfance et se passionne pour le théâtre lyrique. Mobilisé à seize ans, durant les travaux de défense de Petrograd, bientôt démobilisé, il suit simultanément les cours de médecine de l'Académie militaire et les cours de mime du théâtre Marie (aujourd'hui Kirov) tout en faisant de la figuration. À partir de 1920 au Studio du ballet moderne, de 1923 à l'Institut des arts scéniques, il pratique la pantomime, la danse, la parodie, le burlesque. En 1926, il monte une tournée de danses acrobatiques (Pat, Patachon, Charlot), puis fait du music-hall à Moscou (1929-30). Il débute à l'écran en 1927 dans ‘ le Poète et le Tsar ’. Désormais il conduira, sans faille, une double carrière d'acteur de théâtre et de cinéma. Logiquement, ses premiers rôles, au cinéma, sont comiques. En 1936, ‘ les Enfants du capitaine Grant ’ lui apportent un commencement de célébrité. Mais, dès son film suivant, le Député de la Baltique (1937), où il incarne à 30 ans le professeur Poléjaiev qui en a 70, il change de registre et se révèle « un génie de la métamorphose psychologique et de la réincarnation ». Dirigé par Vladimir Petrov, il est un remarquable Pierre le Grand (1937-1939) avant d'incarner le tsar Ivan le Terrible, à seize étapes différentes de sa vie (de 17 à 53 ans!), sous la férule imaginative d'Eisenstein.