Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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MAYER (Carl) (suite)

Les scripts littéraires de Mayer, emplis d'interjections, d'exclamations, d'interrogations, découpés comme des poèmes, utilisant l'espace typographique comme le Coup de dés mallarméen, devancent ce qu'Eisenstein nommait « nouvelle cinématographique » et Aleksandr Rjechevski « scénario émotionnel » : textes qui, afin de conduire l'inspiration du réalisateur, miment la réception (et la relation) du film par son futur spectateur. La puissance visuelle de Mayer l'amène à préciser dans le détail le décor (qui devient personnage), les objets (qui deviennent symboles), les cadrages (il les essayait avec un appareil photographique), les éclairages (qui deviennent drames de lumière), les mouvements de caméra (qui deviennent éléments psychologiques ou flux dynamique du récit). Perfectionniste, il passait des semaines sur une scène, une année sur un scénario. Juif, Mayer quitte l'Allemagne en 1932. Il ne sera plus désormais scénariste, seulement conseiller technique, à Paris (auprès de Paul Czinner), à Londres (auprès de Gabriel Pascal et surtout de Paul Rotha). Il forme le projet d'un film sans coupures, qui tiendrait en un unique plan ; il cherche vainement un producteur pour un script sur l'East End : She Stoops to Conquer. Il meurt du cancer, à cinquante ans, dans la plus sombre misère. Ses amis payèrent son enterrement.

Films :

le Cabinet du docteur Caligari (R. Wiene, 1919) ; Johannes Goth (Karl Gerhardt, 1920) ; Der Bucklige und die Tänzerin (F. W. Murnau, id.) ; Genuine (R. Wiene, id.) ; Der Dummkopf (Lupu-Pick, id.) ; Der Gang in die Nacht (Murnau, 1921) ; Torgus (Hanns Kobe, id.) ; Schloss Vogelod (Murnau, id.) ; le Rail (Lupu-Pick, id.) ; l'Escalier de service (P. Leni, L. Jessner, id.) ; Vanina (A. von Gerlach, 1922) ; Loulou (L. Jessner, 1923) ; Tragie-comedie oder der Puppenmacher von Kiang-Ning (R. Wiene, id.) ; la Nuit de la Saint-Sylvestre (Lupu-Pick, id.) ; le Dernier des hommes (Murnau, 1924) ; Tartuffe (id., 1926) ; le Dernier Fiacre de Berlin (Carl Boese, id.) ; Am Rande der Welt (K. Grüne, 1927) ; Berlin, symphonie d'une grande ville (W. Ruttmann, id.) ; l'Aurore (Murnau, id.) ; Four Devils (id., 1928) ; la Bru (id., 1930) ; Ariane (P. Czinner, 1932) ; Der traumende Mund (id., id.) ; The Fourth Estate (P. Rotha, 1939) ; World of Plenty (id., 1942).

MAYER (Eliezer Mayer, dit Louis B.)

producteur américain, d'origine russe (Minsk 1885 - Los Angeles, Ca., 1957).

Son père, avec qui il avait fui la Russie, fonde en Nouvelle-Écosse une affaire de récupération de tôles à laquelle le jeune et ambitieux Louis s'intéresse un moment. À l'âge de dix-neuf ans, il s'installe à Boston où il établit sa propre affaire de récupération. Il fonde une famille et, en 1907, il achète son premier cinéma. Peu à peu, il est à la tête de toute une chaîne de salles qui s'étend jusqu'au Canada. Enrichi grâce à l'exploitation de Naissance d'une nation (D. W. Griffith, 1915), il se lance dans la production avec l'Alco Company, qu'il quitte en 1917. L'année suivante, il possède un studio à Los Angeles et sa propre compagnie. En 1924, quand Metro et Goldwyn fusionnent, il se trouve à la tête de la MGM, poste qu'il n'abandonne qu'à regret en 1951. Il était aussi propriétaire d'une importante écurie de course et il créa, en 1927, l'Academy of Motion Pictures Arts and Sciences.

Indiscutablement, un personnage haut en couleur. Inculte, agressif, sournois, Louis B. Mayer était un redoutable et peu orthodoxe homme d'affaires. Sa personnalité mégalomane faisait régner une curieuse atmosphère de paternalisme tyrannique à la MGM. Il était proverbialement menteur et acteur, prêt à tous les excès pour prouver ses dires et arriver à ses fins : pour convaincre, il se roulait par terre, montait sur les tables ou fondait en larmes. Il voulait aussi surveiller tout le monde. Il était donc partout à la fois, au courant de tout, et renseigné perpétuellement par des espions à sa solde. Ce qui donna lieu à l'anecdote apocryphe : « Une limousine vide s'est arrêtée à la porte du studio et Louis B. Mayer en est descendu. »

Il avait le culte de la star. Il la voulait élégante, diaphane, lointaine. Il fit de la MGM le studio qui possédait « plus d'étoiles qu'au firmament » (c'était le slogan !). Avec chacune d'entre elles, il entretenait des rapports paternels et prenait impitoyablement en grippe celles qui étaient trop émancipées ou qui refusaient sa protection : ainsi, il détestait Jean Harlow au su et au vu de tous. De plus, il avait une véritable dévotion pour la mère. Il gifla et chassa du studio Erich von Stroheim, qui avait impudemment affirmé que « toutes les femmes sont des putains ». Il fit de Greer Garson le symbole du maternalisme cinématographique des années de guerre 1940-1945. Notoirement républicain, il avait la réputation d'être extrêmement conservateur et il tenait en sainte horreur Franklin D. Roosevelt, avec l'administration duquel il eut les rapports les plus froids.

Indiscutablement, il bénéficia grandement du sens artistique et de la réelle finesse d'Irving Thalberg, qu'il n'aimait guère, mais sans la présence de qui il n'aurait jamais pu mener la MGM à la réussite réelle. D'ailleurs, à la mort de celui-ci, il resta dans un certain désarroi. Les films MGM souffrirent pendant les années 40 d'une mièvrerie qu'ils n'avaient pas connue du temps de Thalberg. Mais, en dépit de tout le mal qu'on pourrait légitimement en penser, il est une de ces personnalités paradoxales sans lesquelles Hollywood n'aurait pas été ce qu'il fut. Le star-system, notamment, trouva en lui un des artisans les plus décisifs.

Entre 1951 et 1954, il occupa un poste de conseiller à la Cinerama Corporation et intrigua pour renverser ceux qui dirigeaient alors la MGM.

MAYNARD (Ken)

acteur américain (Vevey, Ind., 1895 - Los Angeles, Ca., 1973).

Ancien champion de rodéo, ancien cascadeur comme son frère Kermit (1902-1971), Ken commence à travailler pour le cinéma au milieu des années 10. Il reste fidèle au western et se fait une spécialité de la série B et du sérial, dans lequel il excelle de 1930 à 1945. Ses quelques incursions hors de ce domaine sont restées sans lendemain. Il a symbolisé une manière de cow-boy souriant, « propre » et noble. Il est difficile d'isoler un titre dans une filmographie fondée, justement, sur l'uniformité.