Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
H

HEARST (William Randolph)

producteur américain (San Francisco, Ca., 1863 - Los Angeles, id., 1951).

Phénomène journalistique considérable, W. R. Hearst n'est entré dans l'histoire du cinéma que par le biais. On sait surtout qu'Orson Welles s'inspira de son personnage de magnat de la presse pour créer son Citizen Kane (1941) et que le milliardaire n'apprécia guère le geste. Mais on sait moins comment Hearst en vint à produire des films. Amoureux fou (alors qu'il était marié et père d'une nombreuse famille) de la belle actrice Marion Davies, il décida de faire d'elle une superstar. Il produisit ses films dès 1917 en créant la Cosmopolitan Pictures, ne regardait jamais à la dépense et n'aimait rien tant que les grands drames romantiques et historiques. Toutefois, il ne rencontra que rarement le succès, et la pauvre Marion, étouffée par cet amour excessif, n'eut presque jamais l'opportunité de laisser libre cours à sa verve de comédienne. La plupart du temps, elle s'ennuyait dans le mythique château de San Simeón, où Hearst lui organisait de somptueuses réceptions, souvent très rébarbatives. Néanmoins, Marion lui demeura fidèle et n'accepta de se marier qu'à la mort de son bienfaiteur, dont la jalousie aurait, par méprise, causé la mort de T. H. Ince à bord du yacht Oneida en 1924.

HÉBERT (Pierre)

cinéaste et théoricien canadien (Montréal, 1944).

Délaissant l'anthropologie et l'archéologie (université de Montréal), Pierre Hébert réalise, à la suite de quelques films artisanaux (Histoire grise, 1962), son premier film d'animation abstrait, soutenu par l'Office national du film du Canada (Op Hop Hop Op, 1966). Cinéaste formaliste de la transversalité (peinture, poésie, musique, danse), il se réfère à trois figures emblématiques : Léonard de Vinci, Len Lye, Van der Keuken. Celui-ci le surnomme « l'animiste volant » (1996). De Vinci Hébert retient l'approche didactique scientifique et artistique ; de Len Lye, la gravure sur pellicule et la transmission de sensations cinétiques corporelles, qui le mènent à des performances publiques de gravure sur pellicule en direct. Ses œuvres principales, Souvenirs de guerre (1982), Adieu Bipède (1987), et son premier long métrage, la Plante humaine (1996), aux techniques composites, interrogent le statut de l'image. Prix Héritage-McLaren (Ottawa, 1988), directeur du Studio français d'animation de l'ONF, il est l'auteur de plusieurs écrits théoriques : Éloge de la fixité, 1985 ; l'Ange et l'Automate, 1999.

HECHT (Ben)

scénariste et cinéaste américain (New York, N. Y., 1894 - id. 1964).

Homme de théâtre (Spéciale dernière) et littérateur (Un juif amoureux, Je hais les acteurs), scénariste prolifique et souvent inspiré, réalisateur occasionnel et marginal, le cinéma ne constitue qu'une part de sa considérable production. Son actif s'y élève à près de quarante scripts homologués, dont : Scarface (H. Hawks, 1932) ; Sérénade à trois (E. Lubitsch, 1933) ; Viva Villa ! (H. Hawks et J. Conway, 1934) ; Gunga Din (G. Stevens, 1939) ; la Maison du Dr Edwardes (A. Hitchcock, 1945) ; les Enchaînés (id., 1946) ; le Carrefour de la mort (H. Hathaway, 1947) ; le Mystérieux Dr Korvo (O. Preminger, 1950) ; Mark Dixon, détective (id., 1950) ; Chérie, je me sens rajeunir (H. Hawks, 1952) ; la Cité disparue (H. Hathaway, 1957) — outre 25 collaborations officieuses.

Reporter à Chicago à l'âge de seize ans, Ben Hecht couvre des faits divers crapuleux, sanglants, pittoresques ou dérisoires, dont il tire également ses premières nouvelles. Le journalisme restera, tout au long de ses « vies » successives, une source essentielle d'inspiration, tant pour le scénariste, passionné par les contrastes de la vie urbaine, que pour l'auteur de comédies, le polémiste et le mémorialiste.

Un séjour à Berlin, en 1918, lui fait découvrir Georg Grosz et l'expressionnisme. Hecht traverse alors une période bohème, puis trouve son vrai registre dans une étrange forme de sophistication alliant cynisme et sentimentalité. De 1921 à 1926, il signe sept romans, trois recueils de nouvelles et autant de pièces. Après le succès historique de Spéciale dernière, il entame sa carrière cinématographique. Son professionnalisme, sa prodigieuse capacité de travail, sa personnalité flambloyante et iconoclaste font de lui, très vite, un scénariste vedette. Son goût pour l'excès et la dérision, ses élans contradictoires — lyrisme et froide ironie —, sa passion pour les histrions, les mystificateurs et les barbares, clairement repérables dans ses romans et son théâtre, passent aussi, plus timidement, dans ses films. Jaloux de son indépendance, mais capable de travailler à la commande, son actif déconcerte, mêlant indifféremment les projets les plus personnels et les plus alimentaires. Homme multiple, brillant et inégal, Hecht s'essayera à la réalisation, qui lui vaudra une célébrité éphémère. Il signera avec son collaborateur le plus proche, Charles MacArthur, deux films d'inspiration expressionniste, Crime sans passion (Crime Without Passion, 1934) et le Goujat (The Scoundrel, 1935), ainsi que Once in a Blue Moon (id.) et Soak the Rich (1936), puis, en collaboration avec Lee Garmes, Angels Over Broadway (1940) et Specter of the Rose (1946). En 1952, il réalisera, seul, Actors and Sin, interprété par sa fille Jenny. Deux ans plus tard, il livrera avec A Child of the Century un des meilleurs livres de souvenirs jamais écrits par un scénariste hollywoodien.

HECHT LUCARI (Gianni)

producteur italien (Vienne, Autriche, 1922 - Rome 1998).

Après des études d'économie à Trieste, en 1948 il dirige à Rome la Europeo Film, et fonde ensuite la Documento Film, pour laquelle il produit tous ses films jusqu'à aujourd'hui. Il débute avec deux comédies de M. Mattoli (Cinque poveri in automobile, 1952 ; Siamo tutti inquilini, 1953), et produit ensuite des films ambitieux comme Du sang dans le soleil (M. Monicelli, 1955), des comédies populaires comme Bravissimo (L. F. D'Amico, id.), ou des mélodrames comme La schiava del peccato (R. Matarazzo, 1954). Dans les années 60 — mis à part quelques films risqués comme l'Imprévu (A. Lattuada, 1961) ou Moderato cantabile (P. Brooks, 1960) — il produit presque uniquement des comédies et il lance la vague des comédies à épisodes ; parmi ses meilleurs films : La parmigiana (A. Pietrangeli, 1963), les Poupées (D. Risi, L. Comencini, F. Rossi, M. Bolognini, 1965), Le coppie (M. Monicelli, A. Sordi, V. De Sica, 1970), Bello, onesto, emigrato Australia sposerebbe compaesana illibata (L. Zampa, 1971).