Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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HEUSCH (Luc de)

cinéaste et ethnologue belge (Bruxelles 1927).

Il fait ses études à l'Université libre de Belgique (1944-1949) et à la Sorbonne (1951-52), puis séjourne, en tant qu'ethnologue, en Afrique centrale (1952-1954). En 1947, il a été, sous le pseudonyme de Luc Zangrie, l'assistant d'Henri Storck sur Rubens. Peu de temps après, il participe à la fondation du groupe artistique d'avant-garde, Cobra. Dans cette mouvance, il réalise, sous son nom d'emprunt, un court métrage symbolique, Perséphone (1951), proche du surréalisme et de l'esthétique d'un Jean Cocteau. Par la suite, le cinéma de Luc de Heusch traduira toujours des préoccupations documentaires et/ou sociales.

Il rapporte du Congo belge deux œuvres : Fête chez les Hamba (1955) et Ruanda (1955). Le second film, par le recours à la fiction, lui permet d'atteindre une vérité dans le traitement du sujet qui dépasse le simple point de vue descriptif. Ce regard d'ethnologue, Luc de Heusch le porte sur ses compatriotes dans les Gestes du repas (1958) et les Amis du plaisir (1961). Dans son unique long métrage de fiction, Jeudi on chantera comme dimanche (1967), évoquant les problèmes affectifs et sociaux de l'ouvrier contemporain, le cinéaste demeure fidèle à sa vision paradocumentaire. Il donne, enfin, une contribution importante au film d'art avec Magritte ou la Leçon de choses (1960). Ses derniers films sont des hommages à ses amis de Cobra : Alechinsky d'après nature (1970), Dotremont-les-logogrammes (1972).

HEUSCH (Paolo)

cinéaste italien (Rome 1924).

Il débute en 1945 comme assistant et réalise ensuite plusieurs documentaires touristiques. En 1958, il réalise son premier long métrage : La morte viene dallo spazio, un récit de science-fiction. Il fait ensuite le portrait d'un boxeur : Un uomo facile (1959). Après un retour au fantastique avec Lycanthropus (1962, signé Richard Benson), il dirige avec Brunello Rondi une adaptation d'un roman de Pasolini : Una vita violenta (1962). Avec Il comandante (1964), il essaye de donner un rôle sérieux à Totò. Ses films suivants sont sans grand intérêt (Un colpo da mille miliardi, 1966 ; Una raffica di piombo, 1967 [ 1965] ; El « Che » Guevara, 1968).

HEUZÉ (André)

cinéaste français (Saint-Arnoult-en-Yvelines 1880 - Paris 1942).

Pionnier du cinéma, il a réalisé un très grand nombre de films, souvent en décors naturels. Spécialiste du film poursuite, il travaille pour Pathé à partir de 1905 et tourne des bandes essentiellement burlesques : le Voleur de bicyclettes (1905) ; Toto gâte-sauce (id.) ; la Course à la perruque (1906) ; les Chiens contrebandiers (id.) ; le Déserteur (id.), ainsi que sa célèbre série des Boireau (1907-08). Avant de quitter Pathé pour se consacrer à des œuvres plus ambitieuses, il tourne encore jusqu'en 1911 près d'un sujet par jour, dont quelques-uns de caractère « sentimental », tel l'Âge du cœur (1906). On lui doit également les Aventures de Lagardère (1911), le Bossu (1912), Paris pendant la guerre (1916) et un film patriotique, Debout les morts (1917).

HEYMANN (Claude)

cinéaste français (Paris 1907 - id. 1994).

Un de ces hommes qui ont tout fait et tout connu dans le cinéma français. Il est à vingt ans l'assistant de Renoir pour Charleston et la Petite Marchande d'allumettes, adapte avec lui Tire-au-flanc en 1928, l'assiste à nouveau pour On purge Bébé et la Chienne (1931). Assistant de Buñuel pour l'Âge d'or (1930), il met en scène l'Amour à l'américaine en 1931, que supervise Paul Fejos, écrit poèmes et chansons, fréquente l'avant-garde. Réalisateur de versions françaises de films UFA à Berlin, il porte à l'écran les Jumeaux de Brighton (de T. Bernard) en 1936 ; il signe, avec Georges Lacombe, Paris-New York à la veille de la guerre, où figurent quantité de vedettes. Scénariste de Jéricho (H. Calef, 1946), il réalise la Belle Image (1951) d'après Marcel Aymé, tourne Victor (id., avec Gabin). Claude Heymann a écrit avec Guillaume Hanoteau un livre de souvenirs romancés (le Producteur, 1977).

HEYNEMANN (Laurent)

cinéaste français (Paris 1948).

Son premier film, la Question (1976), sur la torture pendant la guerre d'Algérie, l'oriente vers les grands sujets politiques et sociaux, qui lui permettent de mettre à jour des mécanismes cachés, que ce soit dans les actes des collaborateurs de 1944 (Stella, 1984), les manipulations des services secrets (Il faut tuer Birgit Haas, 1981) ou les dessous des courses hippiques (le Mors aux dents, 1979). Cette attitude le conduit à un film policier original Les mois d'avril sont meurtriers (1987) et à une fiction inspirée de la mystification littéraire Émile Ajar / Romain Gary : Faux et usage de faux (1990). Il élargit son domaine d'intervention dans son travail de télévision et dans des films plus récents comme la Vieille qui marchait dans la mer (1991), d'après Frédéric Dard.

HEYNOWSKI (Walter)

cinéaste allemand (Ingolstadt 1927).

Journaliste en Allemagne de l'Ouest, il passe en RDA en 1948 et poursuit sa carrière dans le journalisme de presse puis de TV. À partir de 1956, il réalise pour la DEFA des sujets d'actualités et des documentaires. Depuis 1965, il y travaille en équipe avec Gerhard Scheumann, avec qui il fonde en 1969 le Studio H S. De 1958 à 1965, il écrit et réalise une vingtaine de documentaires ; après quoi il en fait une quarantaine d'autres en forme de reportages sociaux et de pamphlets politiques, dont les longs métrages l'Homme qui rit (Der lachende Mann, sur le mercenaire Kongo-Müller, 1966) ; Pilotes en pyjama (Piloten im Pyjama, sur des pilotes américains prisonniers au Viêt-nam, 1968) ; le Premier riz après (Der erste Reis danach, sur la reconstruction du Viêt-nam, 1976). Rappelons surtout quatre films percutants sur le Chili avant et après le putsch : la Guerre des momies (Der Krieg der Mumien, 1974) ; J'étais, je suis, je serai (Ich war, ich bin, ich werde sein, 1974) ; le Putsch blanc (Der weisse Putsch, 1975) et Une minute d'obscurité ne nous rend pas aveugles (Eine Minute Dunkel macht uns nicht blind, 1975). Ces montages de documents et d'interviews se caractérisent par leur vigoureux engagement politique, par une forme filmique très élaborée et par l'habileté avec laquelle les interlocuteurs sont parfois acculés aux aveux. Peut-être discutable par certaines de leurs méthodes, leur constante volonté de dramatiser l'Histoire vaut par un impact visuel et une forte efficacité polémique. Heynowski et Scheumann ont réalisé plusieurs longs métrages pour la télévision dont Kamerad Krüger (1988) et Die Dritte Haut (1989).