Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
G

GISH (Lillian) (suite)

Dans les années 30, Lillian Gish entre dans une semi-retraite. La mythologie de l'époque ne semble guère lui proposer la place qui lui convient. Mais, à la fin des années 40, elle resurgit magique, telle qu'en elle-même, dans Duel au soleil (K. Vidor, 1947). Son visage vieilli gardait toute sa beauté dans ses yeux chargés d'émotion. Et Vidor la faisait revivre, échevelée, implorante, se traînant aux pieds de Lionel Barrymore au nom de l'amour qu'ils avaient jadis vécu, image bouleversante d'une passion sur laquelle le temps n'a pas de prise.

Après, elle apparaît dans quelques seconds rôles, toujours mémorables, comme celui de l'intendante dans la Toile de l'araignée (V. Minnelli, 1955) ou, surtout, celui de la vieille dame dans la Nuit du chasseur (Ch. Laughton, 1955). Dans Un mariage (1978), Robert Altman la nimbe de lumière, déploie encore une fois ses cheveux, grand-mère mourante, symbole ambigu d'un monde qui s'éteint, aïeule lucide qui comprend tout d'un regard. La magie, encore une fois, est intacte. Il faut enfin savoir sa lutte acharnée pour arracher les films muets à l'oubli et à la destruction.

Autres films :

The Musketeers of Pig Alley (D. W. Griffith, 1912) ; Judith de Béthulie (id., 1914) ; Naissance d'une nation (id., 1915) ; The Lily and the Rose (Paul Powell, id.) ; Intolérance (D. W. Griffith, 1916) ; À côté du bonheur (id., 1918) ; Une fleur dans les ruines (id., id.) ; le Roman de la Vallée heureuse (id., 1919) ; Le cœur se trompe (id., 1919) ; Annie Laurie (J. S. Robertson, 1927) ; The Enemy (F. Niblo, 1928) ; Une nuit romantique (One Romantic Night, Paul L. Stein, 1930) ; Les commandos frappent à l'aube (J. Farrow, 1943) ; Miss Susie Slagle's (J. Berry, 1946) ; le Portrait de Jennie (W. Dieterle, 1949) ; Ordre de tuer (A. Asquith, GB, 1958) ; le Vent de la plaine (J. Huston, 1960) ; Demain des hommes (Follow Me Boys !, Norman Tokar, 1966) ; L'assassin est-il coupable ? (Warning Shot, Buzz Kulik, 1967) ; les Comédiens (P. Glenville, id.) ; Sweet Liberty (A. Alda, 1986) ; les Baleines du mois d'août (L. Anderson, 1987).

GITAI (Amos)

cinéaste israélien (Haifa 1950).

Ses grands-parents maternels participent au début du siècle en Russie à la fondation des premiers kibboutz. Son père étudie au Bauhaus en Allemagne avant de fuir le nazisme et d'émigrer en 1934 en Palestine où il s'établit comme architecte. Amos Gitai opte tout d'abord pour la discipline paternelle et reçoit un diplôme d'architecture à Berkeley en Californie avant de se tourner vers le cinéma. Ses documentaires et ses films-enquêtes (After [Aharè], 1974 ; Charisma, 1976 ; Dimitri, 1977 ; Wadi Rushmia, 1978 ; les Émeutes de Wadi Salib [Meoraot Wadi Salib], 1979 ; la Maison / House [Baït], 1980 ; Wadi, id. ; À la recherche de l'identité / In Search of Identity, id. ; American Mythologies, 1981 ; Journal de campagne / Field Diary [Yoman Sade], 1982 ; Ananas, 1983 ; Travail à vendre / Bangkok-Bahrein, 1984) sont souvent contestés voire boycottés. Dans son propre pays, le cinéaste est peu ou prou marginalisé car ses idées « dérangent ». Il décide de s'orienter vers la fiction en 1985 avec Esther, signe un nouveau documentaire (Brand New Day) en 1987 et tourne en 1989 Berlin-Jérusalem. Il réalise ensuite Golem, l'esprit de l'exil (1991), Petrified Garden (1993), Dans la vallée du Wupper (DOC., 1993), The Arena of Murder (1996), Devarim (1998), Yom-Yom (id.), Kadosh (1999, présenté au Festival de Cannes) dans lequel il interroge les valeurs et les contradictions du fondamentalisme religieux juif, Kippour (2000) où il souligne l'horreur et l'absurdité de toute guerre et Eden (2001).

GLASS (Philipp)

compositeur américain (Baltimore, Maryland, 1937).

Figure de l'avant-garde new-yorkaise (il supervise en 1966 la musique de Chappaqua, de Conrad Rooks, où l'on voit Ginsberg, Burroughs, Ravi Shankar et Moondog), il est, avec Steve Reich, un apôtre de la musique dite répétitive/minimaliste qui mettra des années à s'imposer, bien que les opéras de Glass, d'une conception toute nouvelle, lui ait valu la reconnaissance d'un public éclairé en Europe et en Amérique. C'est le musicien des fameux documentaires écologiques et poétiques réalisés par Godfrey Reggio : Koyaanisqatsi (1983), Powaqatsi (1988) et Anima Mundi (1991). Il a composé pour Mishima, de Paul Schrader, et pour Kundun, de Scorsese. Il a écrit des partitions pour le docudrame d'Erroll Morris le Dossier Adams (1988) et pour son film sur le scientifique Stephen Hawking : Une brève histoire du temps (1992). La musique de cinéma n'est pour lui, en dehors de quelques compositions pour Reggio, Schrader et Morris, qu'une activité secondaire, dérivée de ses œuvres pour ballets, ses opéras et sa musique orchestrale. Néanmoins, son style parfois obsessionnel, généralement rythmé, où le rythme crée souvent de lui-même la mélodie, a favorisé bien des emprunts au profit de bandes-son cinématographiques. C'est probablement un de ces emprunts pour Suspiria, de Dario Argento, qui lui a valu des collaborations à plusieurs films d'horreur dont Candyman, de Bernard Rose (1992), et la suite, Candyman II, de Bill Condon (1995).

GLENN (Pierre-William)

chef opérateur et cinéaste français (Paris 1943).

Diplômé de l'IDHEC, ce cameraman, passionné par la moto, tourne un long métrage documentaire (le Cheval de fer, 1975) sur les compétitions. Puis il travaille avec des cinéastes marginaux aussi bien qu'avec Truffaut ou Vadim, mais reste fidèle à Bertrand Tavernier et Alain Corneau. Sans imposer un style — encore qu'il se plaise à des brillances un peu métalliques —, il traduit de manière personnelle des univers très différents avec une belle sûreté technique. On peut citer notamment : Out One : Spectre (J. Rivette, 1970) ; la Nuit américaine (F. Truffaut, 1973) ; État de siège (Costa-Gavras, id.) ; Que la fête commence (B. Tavernier, 1975) ; le Juge et l'Assassin (id., 1976) ; Monsieur Klein (J. Losey, id.) ; I Love You, je t'aime (G. Roy Hill, 1979) ; Série noire (A. Corneau, id.) ; Loulou (M. Pialat, 1980) ; Coup de torchon (Tavernier, 1981) ; la Crime (Philippe Labro, 1983) ; Ronde de nuit (Jean-Claude Missiaen, 1984) ; Sans espoir de retour (S. Fuller, 1989) ; l'Orchestre rouge (J. Rouffio, id.) ; Une saison blanche et sèche (Euzhan Palcy, id. ; CO Kelvin Pike) ; les Enfants du désordre (Y. Bellon, id.) ; A Captive in the Land (J. Berry, 1991) ; l'Affût (Y. Bellon, 1992) ; Hasards ou coïncidences (C. Lelouch, 1998). En 1985, il réalise son premier long métrage de fiction, les Enragés, suivi en 1987 par Terminus, une fable futuriste avec Johnny Halliday, et, en 1993, par 23 heures 58.