Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
S

ṢIDDIQ (Khalid al-)

cinéaste koweïtien (Kuwait City 1945).

Abandonnant des études commerciales à Bombay pour s'inscrire à l'Institut du cinéma indien de Poona, il doit rompre avec son milieu familial traditionaliste. Il va mener sa carrière de cinéaste en solitaire, coproducteur et coscénariste de ses films, cherchant sa voie entre les modèles qu'il refuse pour atteindre une authenticité. Il débute par des documentaires : The Falcon (al-Ṣaqr, 1965), mais parvient, sans moyens, à réaliser son premier long métrage, la Mer cruelle (Bas ya baḥr, 1972, 1970-71), évocation dramatique mais quasi documentaire de la vie des pêcheurs d'éponges du Golfe avant la modernisation. Le sens de l'image, des mouvements, de la solitude des individus dans un monde où chaque geste est chargé de sens se retrouve dans son adaptation lyrique et ludique d'un roman de l'écrivain soudanais Ṭayyib Ṣalaḥ les Noces de Zayn (Urs Zayn, 1976 - Soudan / Koweït). À partir d'une nouvelle de Boccace, Ṣiddiq tourne en Inde une fable orientale, Shahin (1985) qui échoue tant au niveau du thème que du traitement.

SIDNEY (George)

cinéaste américain (Long Island City, N. Y., 1911).

Né dans le monde du spectacle, acteur dès l'enfance, il apparaît notamment dans un western de Tom Mix au début des années 20. Garçon de course à la MGM en 1933, il gravit peu à peu les échelons et devient réalisateur à part entière en 1941. Il se spécialise dans la mise en scène de comédies musicales prestigieuses auxquelles son nom reste attaché, citons Escale à Hollywood (Anchors Aweigh, 1945), où il réunit Gene Kelly, pratiquement débutant, et Frank Sinatra, Annie, reine du cirque (Annie Get Your Gun, 1950), Show Boat (id., 1951). Ses comédies musicales ne sont pas toutes d'une qualité constante, mais elles témoignent d'un goût pour le spectaculaire et d'une invention décorative proches des stylisations formelles de Busby Berkeley, comme dans le Bal des sirènes (Bathing Beauty, 1944) avec Esther Williams. C'est pourtant dans les films d'aventures, à tendance légèrement parodique, qu'il a donné ses meilleures œuvres : les Trois Mousquetaires (The Three Musketeers, 1948) et Scaramouche (id., 1952) transforment l'univers des romans de cape et d'épée en chorégraphie acrobatique, voire délirante — en particulier dans les séquences de duel. Le reste de sa production est plus terne, la veine satirique volontiers pesante, comme dans Bye Bye Birdie (1963), réalisé à la Columbia. Il tourne aussi de grands mélodrames (Tu seras un homme mon fils [The Eddie Duchin Story], 1956) et termine sa carrière par un musical à l'ancienne mode, Half a Sixpence (1968).

Autres films :

Free and Easy (1941) ; Pacific Rendezvous (1942) ; Pilot no 5 (1943) ; Parade aux étoiles (Thousands Cheer, id.) ; The Harvey Girls (1946) ; Féerie à Mexico (Holiday in Mexico, id.) ; Éternel Tourment (Cass Timberlane, 1947) ; le Danube rouge (The Red Danube, 1949) ; la Clé sous la porte (Key to the City, 1950) ; la Reine vierge (Young Bess, 1953) ; Embrasse-moi chérie (Kiss Me Kate, id.) ; la Chérie de Jupiter (Jupiter's Darling, 1955) ; Un seul amour (Jeanne Eagels, 1957) ; la Blonde ou la Rousse ? (Pal Joey, id.) ; Qui était donc cette dame ? (Who Was That Lady ?, 1960) ; Pépé (Pepe, id.) ; A Ticklish Affair (1963) ; l'Amour en quatrième vitesse (Viva Las Vegas, 1964) ; The Swinger (1966). ▲

SIDNEY (Sophia Kosow, dite Sylvia)

actrice américaine (New York, N. Y., 1910 - id., 1999).

Fille d'immigrants juifs venus de Russie, elle joue au théâtre à l'âge de seize ans, à Washington, puis se fait remarquer à Broadway. Après quelques essais au cinéma, elle est engagée en 1931 par la Paramount et devient une des stars les plus représentatives des années 30. Avec son air innocent et vulnérable, ses grands yeux tristes et des lèvres tremblantes, Sylvia Sidney suggère idéalement la jeune fille d'origine pauvre, « en détresse », type classique du cinéma muet qu'elle prolongea pour un temps dans les films parlants, évoquant les difficultés de l'époque de la grande dépression. Elle peut interpréter des héroïnes citadines (les Carrefours de la ville, R. Mamoulian, 1931) aussi bien que rurales (la Métisse, M. Leisen, 1935 ; la Fille du bois maudit, H. Hathaway, 1936), pourvu que son personnage de victime soit constamment confronté à l'injustice et au malheur. Un de ses meilleurs rôles dans ce registre reste certainement celui de la mère célibataire, dans Jennie Gerhardt (Marion Gering, 1933). Mais c'est dirigée par Fritz Lang qu'elle révèle tout son potentiel d'émotion, évoquant une simple jeune fille progressivement horrifiée par la violence (Furie, 1936), ou une figure salvatrice qu'un destin fatal mène au seuil de la mort (J'ai le droit de vivre, id., 1937). Le couple qu'elle forme avec Henry Fonda dans ce film est l'un des plus pathétiques du cinéma américain, leur regard limpide et leur vulnérabilité se répondant étrangement. Alfred Hitchcock tire aussi un excellent parti de son talent dans Sabotage (1936), où, en épouse insatisfaite que le soupçon ronge et bouleverse, elle devient un des premiers grands personnages féminins de l'œuvre du maître.

Lasse de jouer des rôles trop stéréotypés, elle s'essaie, sans succès, à la comédie, puis retourne au théâtre à la fin des années 30, où elle n'a cessé de travailler depuis. On la revoit au cinéma de façon épisodique, s'amusant à se parodier (en Fantine dans les Misérables, L. Milestone, 1952), à jouer les beautés fatales et exotiques (Du sang dans le soleil [Blood on the Sun], F. Lloyd, 1945), les vieilles filles aigries (les Inconnus dans la ville, R. Fleischer, 1955), ou à laisser, encore une fois, l'ombre de la peur traverser ses yeux bleus (Damien — la Malédiction II, D. Taylor, 1978). À plus de quatre-vingts ans, elle fait une apparition pleine d'humour malicieux et dévastateur en invalide, survivante d'une terrible attaque martienne dans Mars Attacks ! (T. Burton, 1996).

SIEGEL (Donald, dit Don)

cinéaste américain (Chicago, Ill., 1912 - Nipoma, Ca, 1991).

Don Siegel entre à la Warner Bros en 1936 après avoir fréquenté la Royal Academy of Dramatic Arts de Londres et le Contemporary Theatre Group de Hollywood. Il travaille successivement comme archiviste, assistant monteur et chef du département « inserts » et devient, à la fin des années 30, superviseur du département « montages ». Il y réalise, jusqu'en 1943, de nombreuses séquences de montage révélant son sens du rythme et de la concision (Gentleman Jim, R. Walsh, 1942 ; la Parade de la gloire, M. Curtiz, id. ; Casablanca, id., 1943). Durant cette même période, il règle aussi les scènes d'action d'une quarantaine de grandes productions, citons Sergent York (H. Hawks, 1941), Passage pour Marseille (Curtiz, 1944) et l'Intrigante de Saratoga (S. Wood, 1945). Après avoir mis en scène deux courts métrages : Star in the Night et Hitler Lives, il aborde le long métrage avec The Verdict, thriller fin de siècle interprété par le tandem Peter Lorre-Sydney Greenstreet. En 1949, il quitte la Warner pour une carrière freelance, qui le mènera successivement à la RKO (ça commence à Vera Cruz), à la Universal (Duel sans merci) et à la Columbia (China Venture). Un thriller de style documentaire, les Révoltés de la cellule 11, confirme, en 1954, ses qualités de cinéaste : sens du suspense, sécheresse behavioriste, goût des effets percutants. Le genre restera l'un des plus propices à son talent, et il lui consacrera une dizaine de titres marquants, parmi lesquels : l'Ennemi public, The Line-up, À bout portant, Police sur la ville, Un shérif à New York, l'Inspecteur Harry et l'Évadé d'Alcatraz.