Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
L

LAUNDER (Frank)

scénariste, cinéaste et producteur britannique (Hitchin 1907 - Monaco 1997).

Son nom est étroitement lié à celui de Sidney Gilliat pour une abondante carrière de scénariste commencée en 1929. On leur doit notamment les scripts d'Une femme disparaît (A. Hitchcock, 1938) et de Train de nuit pour Munich (C. Reed, 1940). Launder signe son premier long métrage en 1943 (Ceux de chez nous [Millions Like Us], CO S. Gilliat), puis réalise une quinzaine de films qu'il est difficile de sortir de l'oubli, à part l'Étrange Aventurière (I See a Dark Stranger, CO S. Gilliat, 1946), le naïf Lagon bleu (The Blue Lagoon, 1948) et le pittoresque Geordie (CO S. Gilliat, 1955), tourné dans les magnifiques paysages écossais.

LAURE (Carole)

actrice canadienne (Montréal, Québec, 1950).

En quelques années, la jeune institutrice québécoise est devenue une comédienne internationale. Après avoir joué dans des courts métrages de Jean Chabot (Mon enfance à Montréal, 1970), c'est par la Mort d'un bûcheron (1973) que débute sa fructueuse collaboration avec le cinéaste Gilles Carle : les Corps célestes (id.) ; la Tête de Normande Saint-Onge (1975) ; l'Ange et la Femme (1977) ; Maria Chapdelaine (1983) ; Fantastica (1980), qui révèle son talent de chanteuse, confirmé dans un disque et un spectacle avec Lewis Furey (sous la direction duquel elle tourne Night Magic en 1984). Impulsive et instinctive, elle choisit néanmoins avec soin ses films, plus encore depuis Sweet Movie (D. Makavejev, 1974). Après la Menace (A. Corneau, 1977), son premier film français, elle jouera notamment dans Préparez vos mouchoirs (Bertrand Blier, 1978), À nous la victoire (J. Huston, 1981), Un assassin qui passe (Michel Vianey, 1981), Croque la vie (J. Ch. Tachella, id.), À mort l'arbitre (J. -P. Mocky, 1984), Drôle de samedi (Bay Okan, 1985), Sauve-toi Lola (M. Drach, 1986), Sweet Country (M. Cacoyannis, 1987), Elles ne pensent qu'à ça (Charlotte Dubreuil, 1994).

LAUREL ET HARDY.

Laurel (Arthur Stanley Jefferson, dit Stan), acteur et cinéaste américain (Ulverston, GB, 1890 - Santa Monica, Ca., 1965) et Hardy (Oliver Norvell Hardy, dit Oliver), acteur américain (Harlem, Ga., 1892 - North Hollywood, Ca., 1957).

Sous le nom de Laurel et Hardy, ils forment ensemble le tandem comique le plus célèbre de l'histoire du cinéma.

Leur carrière commence d'abord individuellement. Venu en Amérique avec la troupe de music-hall de Fred Karno (de même que Chaplin), Laurel fait ses débuts au cinéma en 1917 ; après une période de flottement, durant laquelle, entre autres occupations, il travaille brièvement pour Larry Semon (comme gagman et acteur), il tourne, entre 1923 et 1925, des films en vedette pour Hal Roach (Pathé) et pour Joe Rock (Standard Cinema Corp.). Tout en subissant l'influence de son ex-collègue Chaplin, il crée alors une « silhouette » exceptionnelle, aussi agressive que souple, et dont les films se distinguent autant par leurs qualités rythmiques que par la finesse des gags. En 1925 et 1926, Laurel retravaille pour Hal Roach comme acteur occasionnel et surtout comme réalisateur, métier qu'il apprécie par-dessus tout et qui représente son ambition véritable.

C'est alors qu'une rencontre accidentelle avec Hardy, dans un même film, marque le départ de leur carrière commune ; après une période de transition, consacrée à fixer les contours de leurs personnages et la nature de leurs rapports mutuels (1926-27), le tandem prend la forme que l'on connaît et qu'il gardera jusqu'à la fin.

Quant à Hardy, avant cette rencontre, il travaille depuis 1913 comme figurant et comme acteur de seconds rôles pour différentes productions. Il acquiert une certaine notoriété dans des rôles de « méchants », dramatiques ou comiques, puis se spécialise dans le comique, travaillant successivement aux côtés de Billy West (1917-18), de Jimmy Aubrey (1920) et de Larry Semon (1921-1925). Hal Roach, pour qui il travaille dès 1923, l'engage à titre exclusif en 1926. Par la suite, il sera le producteur du tandem jusqu'à la fin des années 30.

Une fois leur style défini, Laurel et Hardy, à la fin des années 20, inscrivent à leur compte une éblouissante série de courts métrages, dans lesquels ils déclenchent de véritables avalanches de destructions (Battle of the Century, 1928 ; Two Tars, id. ; Big Business, 1929, etc.). Bien qu'ils tournent des courts métrages jusqu'en 1935, en réussissant — chose rare ! — à passer sans heurt du muet au parlant, la qualité de cette série ne sera jamais dépassée. Dans leurs longs métrages, malgré la constance de leur succès public, Laurel et Hardy vont même descendre du niveau de « comiques d'opérette » (R. Borde), dans des productions « féeriques » où leur comique perd à peu près tout ce qu'il pouvait avoir d'explosif (Fra Diavolo, 1933 ; la Bohémienne, 1936). À la fin des années 30, toutefois, ils reprennent du souffle dans une série de longs métrages, dont les deux premiers sont produits par Laurel lui-même (C'est donc ton frère, 1936 ; Laurel et Hardy au Far West, 1937), et dont Têtes de pioche (1938), pour lequel ils collaborent avec Harry Langdon, marque sans doute le sommet. En 1941 commence une lente mais fatale agonie : de moins en moins indépendants, les deux comiques sombrent dans des productions hasardeuses et bâtardes qui, si elles remportent toujours du succès, ne font plus qu'exploiter commercialement leur notoriété.

Leurs personnages n'en ont pas moins atteint à une sorte d'immortalité. Promouvant la destruction au rang d'un des beaux-arts — ils l'accommodent notamment d'un savant dosage conforme aux principes du style Roach —, dédoublant la solitude du comique dans un dialogue qui est comme un raccourci « exemplaire » de nos rapports à l'Autre, avec toute leur irréductible absurdité, ils créent à eux seuls un mythe des plus vivants de toute l'histoire du cinéma. Sans tomber dans l'anecdote psychologique, qu'ils transforment constamment en rituel autonome (cf. leurs bagarres au ralenti), ils dévoilent comme personne d'autre, dans leurs meilleurs films, la face cauchemardesque du quotidien et la folie latente de l'homme, individuelle ou collective (les destructions en chaîne des courts métrages muets). Même s'il est difficile de les séparer, on peut, en plus, dire de Laurel, la cheville ouvrière du tandem, qu'il est un des génies authentiques de tout le burlesque, à la fois comme réalisateur, comme gagman et comme acteur. L'admiration que lui ont vouée de nombreux comiques, de Chaplin à Jerry Lewis, est d'ailleurs en ce sens éloquente.