Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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MERRILL (Gary)

acteur américain (Hartford, Conn., 1915 - Falmouth, Maine, 1990).

La 20th Century Fox s'intéressa à cet acteur de théâtre sans doute à cause d'un physique qui, sans être régulier, séduisait en rappelant Gregory Peck ou Richard Conte, alors sous contrat au studio. Il débute en 1944, mais sa carrière commence surtout en 1949 : Un homme de fer (H. King, 1949), Ève (J. L. Mankiewicz, 1950), Mark Dixon, détective (O. Preminger, id.). Ce palmarès suffirait à bien des filmographies. Mais c'est une réussite plus modeste, Appel d'un inconnu (J. Negulesco, 1952), qui exploite au mieux la tristesse de son visage et la sensibilité sourde de son jeu. Passé aux seconds rôles, Gary Merrill s'est amaigri et est devenu plus gris, plus triste encore, sans rien perdre de son talent. On se souviendra surtout de son personnage complexe et ridé dans l'Aventurier du Rio Grande (R. Parrish, 1959). Il a été marié à Bette Davis.

MESGUICH (Félix)

chef opérateur français (Alger 1871 -Paris 1949).

Ce pionnier raconte dans ses souvenirs, Tours de manivelle (Paris, 1933), comment il est reçu le 5 janvier 1896 par Louis Lumière dans ses laboratoires de Lyon-Montplaisir, et comment il s'initie au maniement du cinématographe sous la direction d'Eugène Promio. Il est d'abord, en fait, projectionniste. Puis il accepte de faire partie des opérateurs que Lumière envoie autour du monde pour filmer les événements et faire connaître son invention. Il se trouve à New York en 1896, où, après l'enthousiasme suscité par la première séance publique du Cinématographe dans cette ville (18 juin), il se heurte à l'agressive concurrence de American Biograph ; en Russie fin 1897, en Algérie en 1905, en Tunisie, au Maroc (il assiste aux débuts de l'expédition française : bombardement de Casablanca en 1907). Il filme le tsar, les nouveaux jeux Olympiques d'Athènes (1896), la fuite dans l'Himalaya du dalai-lama, Édouard VII, et les oasis du Maghreb... Il collabore avec l'inventeur Auguste Baron, pour qui il tourne des films sonores synchronisés (sans doute en 1900), et fait des reportages pour la Compagnie générale transatlantique et le quotidien le Journal ainsi que pour l'Urban Trading Co de Londres. En 1908, il accompagne Wibur Wright en vol, caméra en mains. C'est lui qui tourne les premiers films publicitaires connus, pour Ripolin et la Cie des Wagons-lits. (Mais cette source de profits n'avait pas davantage échappé à R. W. Paul.) Une partie de ces documents inestimables a été utilisée par le cinéaste Jean Chapot dans un film de montage, les Années Lumière (1970).

MESSMER (Otto)

cinéaste d'animation américain (Union City, N.J., 1892 - Teaneck, N.J., 1983).

Il débute dans le dessin animé publicitaire en 1914, puis il est engagé par Pat Sullivan, qui vient de créer son propre studio, avec qui il travaillera jusqu'en 1933. C'est en 1919 que Messmer crée le personnage de Félix le Chat, acheté par la Paramount mais confié au studio de Sullivan, où Messmer dirige une importante équipe d'animateurs. En 1933, la mort de Sullivan et les problèmes complexes de droits et de succession empêchent Félix de survivre sur les écrans (une autre tentative, celle des studios Van Beuren en 1936, ne parviendra pas à le ressuciter). Messmer, véritable inventeur de Félix, qui a longtemps négligé d'apporter les preuves de sa paternité, se retire alors du cinéma pour se consacrer à la bande dessinée et à l'illustration.

MESSTER (Oskar Eduard)

pionnier allemand du cinéma (Berlin, Prusse, 1866 - Tegernsee 1943).

Il réalise en 1896, à peu près en même temps que le Français Continsouza, des projecteurs à entraînement par croix de Malte. (Les Allemands le considèrent d'ailleurs comme l'inventeur de ce dispositif.) Seul constructeur allemand jusqu'en 1905, il exerce dès 1897 une importante activité de producteur et de réalisateur (c'est grâce à lui que débuteront E. Jannings, Lil Dagover, R. Schünzel, C. Veidt) qui le désigne comme l'un des grands promoteurs du cinéma allemand. Il présente également les premières actualités nationales. Au début des années 1900, il met au point un dispositif de synchronisation entre projecteur et phonographe puis étudie le fonctionnement de divers systèmes de cinéma sonore. En 1914, il crée les premières actualités hebdomadaires, les Messter-Woche. Sa société de production restera indépendante jusqu'en 1917, date de son absoption par la UFA. En 1927, il sera l'un des fondateurs de la Tobis.

MÉSZÁROS (Márta)

cinéaste hongroise (Kispest 1931).

Diplômée de l'Institut du cinéma de Moscou en 1957, elle réalise entre 1959 et 1971 quelque 25 courts métrages (documentaires, vulgarisation scientifique, films sur l'art, fiction). Dès ses premiers longs métrages, elle confirme une personnalité marquante qui retient l'attention par la chaleureuse spontanéité de son approche des êtres et par la lucidité de ses analyses psychologiques, en particulier pour ce qui est de ses personnages féminins. Un épisode tragique de sa vie — elle avait six ans quand son père trouva la mort, victime des purges staliniennes, alors que sa famille vivait en exil à Moscou — peut expliquer son intérêt pour les relations fille-père et le fait que la plupart de ses films sont centrés sur le thème de la recherche du père. C'est le cas dès son premier long métrage, Cati, puis dans Adoption (sur le thème de la maternité frustrée), plus encore dans Neuf Mois (la trahison de l'homme) et surtout dans Comme chez nous (les relations d'un adulte avec une fillette qui rêve de l'avoir pour père) et dans Journal intime qui évoque de manière particulièrement sincère et émouvante sa propre adolescence à l'époque du stalinisme triomphant.

Parallèlement, un second thème sous-tend l'œuvre : l'affirmation par la femme de son autonomie, le plus souvent par la maternité désirée et assumée, même contre la volonté du géniteur (Adoption, Neuf Mois), mais simplement aussi par le désir de mener une vie indépendante au plan professionnel et/ou sentimental (Débarras, Elles deux, En cours de route).

Excellemment secondée par de remarquables chefs opérateurs (Janos Kende, Lajos Koltai) dans sa description minutieuse et vibrante de la vie quotidienne, la réalisatrice a su enraciner sa problématique personnelle dans un contexte social authentique et s'attacher à la spécificité hongroise tout en conférant à son œuvre une portée universelle. Elle perd quelque peu ce qui faisait son originalité dans les deux films qu'elle a réalisés en coproduction avec la France, les Héritières et Une mère, une fille. Elle a ensuite évoqué sa biographie personnelle sur fond d'histoire hongroise dans une remarquable trilogie : Journal intime, Journal à mes amours et Journal à mon père et ma mère.