Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
H

HITCHCOCK (Alfred) (suite)

Non que l'individu Hitchcock s'exhibe ou se « défoule » à travers ses films : ce qu'il avoue à cet égard (sa longue immaturité sexuelle) ne se laisse guère plus déceler qu'un complexe d'Œdipe moins liquidé que transposé au fil des années (au prix d'un certain pessimisme) ou que les limites flagrantes de son goût esthétique (marquées, par exemple, par le cauchemar de Sueurs froides, les couleurs du Crime était presque parfait, le recours çà et là à des procédés expressionnistes). Il n'est pas le seul homme plein d'humour qui échoue à faire un film entièrement basé sur l'humour (Mais qui a tué Harry ? n'en finit plus) et longtemps, dans sa période britannique, l'humour faisait un mélange mal lié avec les autres ingrédients de son succès (on s'en aperçoit même dans les Trente-Neuf Marches).

Cela dit, reste le Hitchcock toujours à redécouvrir, donc classique (après avoir paru « d'avant-garde » dans les années 50), chez qui la stylistique et la thématique ne font qu'un. Sa pratique du montage (plans souvent très nombreux mais s'additionnant au lieu de se contredire) n'est qu'un des éléments de sa géométrie : moraliste, métaphysicien, et aussi gastronome, ce « commerçant » est un perfectionniste de la consommation visuelle. Il a créé et revendiqué un regard cinématographique spécifique, celui du point de vue, qui n'est ni l'effacement « complet » du cinéaste face à la narration objective (Hawks) ni le recul despotique du démiurge (Lang), mais qui suppose chez le spectateur une adhésion partielle, lucide, à un personnage (au moins le temps d'une séquence). Peintre de notre époque, de ses symboles vulgaires de « réussite sociale » comme de ses obsessions (l'espionnage) jusqu'à la pensée de l'Étau, il était logique qu'il choisisse le « temps libre » (vacances, immobilité forcée de Stewart dans Fenêtre sur cour) et l'espace mal défini des « agents internationaux » pour installer ses machines de précision. Ses héroïnes (déchues ou faussement frigides) relèvent moins du puritanisme que des magazines mélodramatiques « de luxe » : l'un des cinéastes les plus méfiants qui soient à l'égard du fantastique (le film d'épouvante contemporain le parodie en croyant exploiter sans vergogne quelques « trucs » hitchcockiens) rejoint ainsi l'indépendance ambiguë du rêve. Mais au sein de cette indépendance resurgissent bien entendu les matériaux de l'analyse freudienne, pris de plus en plus pour la matière même du film (ouvertement dans la conférence qui termine Psychose ; secrètement dans quantité d'autres films) : le cinéma de Hitchcock, fondé qu'il est sur une vision proche de celle de Kafka autant que de Chesterton, se redouble dans les Enchaînés, dans les Amants du Capricorne (scène de la vitre), dans Fenêtre sur cour, dans Sueurs froides, dans Pas de printemps pour Marnie (et même dans les Oiseaux ou Complot de famille) d'un discours sur la mise en scène et la signifiance « transcendante » de celle-ci. Cette transcendance rêvée (surtout) par la peur peut se révéler vide (la Mort aux trousses) : le cinéma demeure.

Films  :

Number Thirteen (CORÉ, inachevé ; 1922) ; The Pleasure Garden (1925) ; The Mountain Eagle (1926) ; The Lodger (id.) ; Downhill When Boy Leave Home (1927) ; Easy Virtue (id.) ; The Ring (id.) ; The Farmer's Wife (1928) ; À l'américaine (Champagne, id.) ; Harmony Heaven (CORÉ : Eddie Pola et Edward Brandt, 1929) ; The Manxman (id.) ; Chantage (Blackmail, id.) ; Elstree Calling (1930 ; CORÉ : A. Charlot, J. Hulbert et P. Murray. Supervision d'Adrian Brunel) ; Junon et le paon (Juno and the Peacock, id.) ; Murder (id.) ; The Skin Game (1931) ; Rich and Strange (1932) ; Number Seventeen (id.) ; Waltzes From Vienna (1933) ; l'Homme qui en savait trop (The Man Who Knew Too Much, 1934) ; les Trente-Neuf Marches (The Thirty-Nine Steps, 1935) ; Quatre de l'espionnage (The Secret Agent, 1936) ; Agent secret (Sabotage, 1937) ; Young and Innocent (id.) ; Une femme disparaît (The Lady Vanishes, 1938) ; l'Auberge de la Jamaïque (Jamaica Inn, 1939) ; Rebecca (id., 1940) ; Correspondant 17 (Foreign Correspondent, id.) ; Joies matrimoniales (Mr. and Mrs. Smith, 1941) ; Soupçons (Suspicion, id.) ; Cinquième Colonne (Saboteur, 1942) ; l'Ombre d'un doute (Shadow of a Doubt, 1943) ; Lifeboat (1944) ; Bon Voyage (CM, id.) ; Adventure Malagache (CM, id.) ; la Maison du Dr Edwardes (Spellbound, 1945) ; les Enchaînés (Notorious, 1946) ; le Procès Paradine (The Paradine Case, 1948) ; la Corde (Rope, id.) ; les Amants du Capricorne (Under Capricorn, 1949 ; GB) ; le Grand Alibi (Stage Fright, 1950) ; l'Inconnu du Nord-Express (Strangers on a Train, 1951) ; la Loi du silence (I Confess, 1953) ; Le crime était presque parfait (Dial M for Murder, 1954) ; Fenêtre sur cour (Rear Window, id.) ; la Main au collet (To Catch a Thief, 1955) ; Mais qui a tué Harry ? (The Trouble With Harry, id.) ; l'Homme qui en savait trop (1956, remake très différent du film de 1934) ; le Faux Coupable (The Wrong Man, 1957) ; Sueurs froides (Vertigo, 1958) ; la Mort aux trousses (North by Northwest, 1959) ; Psychose (Psycho, 1960) ; les Oiseaux (The Birds, 1963) ; Pas de printemps pour Marnie (Marnie, 1964) ; le Rideau déchiré (Torn Curtain, 1966) ; l'Étau (Topaz, 1969) ; Frenzy (id., 1972, GB) ; Complot de famille (Family Plot, 1976).

HLADNIK (Boštjan)

cinéaste yougoslave (Kranj 1929).

Après des études à l'Académie théâtrale de Ljubljana, puis à l'IDHEC (1957-1960), il est assistant de Chabrol, De Broca, Duvivier. Il se situe d'emblée parmi les pionniers de la Nouvelle Vague nationale avec la Danse sous la pluie (Ples v dežju / Ples na Kiši, 1961), sur un couple en crise, et le Château de sable (Peščeni grad, 1962), portrait d'une adolescente traumatisée par la guerre. Après avoir dû travailler en Allemagne, en Suède et aux États-Unis, il réaffirme ses dons d'analyste du cœur humain dans le Cri du soleil (Sunčani krik, 1968) ; Quand vient le lion (Kad dodje lav, 1971) et Tue-moi doucement (Ubij me nežno, 1979) ; Mascarade (Maskarada, 1983).

H.M.I.

Nom de marque des lampes aux halogénures métalliques de la firme Osram : H pour hydrargyre (mercure), M pour médium (arc moyen), I pour iodure. H.M.I. est devenu un terme générique pour désigner ce type de lampe ( SOURCES DE LUMIÈRE).