Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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BURNETT (Charles)

cinéaste américain (Vicksburg, Mo.,1944).

Originaire du Sud, il grandit dans le ghetto de Watts à Los Angeles. Après des études d'électronique, il entre au département cinéma de l'UCLA, où il acquiert une formation d'opérateur. En 1969, il réalise son premier court métrage, Several Friends. Après avoir été opérateur sur plusieurs films d'indépendants noirs, il réalise en 1977 un court métrage, The Horse, et un long métrage considéré comme une des meilleures œuvres du cinéma indépendant noir américain : Killer of Sheep. Tourné entièrement avec des acteurs non professionnels dans le ghetto de Watts, le film nous fait pénétrer dans l'univers de Stan, employé dans un abattoir, que son travail aliénant éloigne progressivement de sa famille et de sa communauté. Participant de la veine du réalisme social, ce film, primé au festival de Berlin (1981) est en même temps une peinture, tendre et ironique, de la communauté de Watts. Après My Brother's Wedding (1984), Charles Burnett s'oriente, avec To Sleep With Anger (1990), dans une direction radicalement différente mais avec une réussite indéniable : il y recrée une inquiétante histoire gothique, proche de la Nuit du chasseur, sans pour autant abandonner son militantisme antiraciste. En 1993, il tourne The Glass Shield, drame policier sur la corruption et le racisme qui ronge la police de Los Angeles. Il est depuis très actif, notamment à la télévision, mais peu de ses films franchissent les frontières : il a tourné pour le cinéma When It Rains (1995), Dr Endesha Ida Mae Holland (1998), The Annihilation of Fish (1999) et Olivia's Story (id.).

BURNETT (William Riley)

scénariste et romancier américain (Springfield, Ohio, 1899 - Santa Monica, Ca., 1982).

À la fin des années 20, il est, avec Dashiell Hammett et James M. Cain, l'un des chefs de file d'une nouvelle tendance du roman policier, fondée sur l'étude réaliste des comportements criminels et servie par une écriture descriptive qui fait abstraction de tout jugement moral. Inspiré par la chronique de Chicago, Little Caesar, que Mervyn LeRoy tourne à la Warner en 1930, introduit l'archétype du gangster mégalomane et définit la structure et les situations clés qui alimenteront le genre durant une décennie. En 1940, la Grande Évasion (tournée par Raoul Walsh sur un scénario de John Huston) crée un modèle d'inspiration plus romantique : le gangster vieillissant, solitaire, traqué par la société. En 1949, Quand la ville dort, qu'adapte et réalise John Huston, fait l'autopsie d'un coup parfait et illustre la diversité des motivations criminelles. Portrait en coupe d'une grande ville moderne, et premier titre d'une trilogie littéraire consacrée à la corruption, l'œuvre fixe les canons d'un genre destiné à connaître une faveur considérable jusque dans les années 70.

Outre ces trois classiques du roman policier, où se devine son goût pour la littérature française réaliste du XIXe siècle, W. R. Burnett a écrit de nombreux récits historiques, ainsi que des westerns. Une trentaine d'entre eux ont été portés à l'écran, dont : Law and Order (Edward L. Cahn, 1932), Toute la ville en parle (J. Ford, 1935), Dr. Socrates (W. Dieterle, id.), l'Escadron noir (R. Walsh, 1940), la Ville abandonnée (W. Wellman, 1948) et Capitaine Mystère (D. Sirk, 1955).

Burnett a également collaboré aux scénarios de dix-sept films, sur lesquels son influence personnelle est parfois difficilement appréciable. Parmi ceux-ci : Scarface (H. Hawks, 1932), Tueur à gages (F. Tuttle, 1942), Convoi vers la Russie (L. Bacon, 1943), San Antonio (D. Butler, 1945), Vendetta (M. Ferrer, 1950), Racket (The Racket, J. Cromwell, 1951), le Témoin à abattre (Illegal, L. Allen, 1955), les Trois Sergents (J. Sturges, 1962).

BURR (Raymond)

acteur américain (New Westminster, Colombie britannique, Canada, 1917 - Sohoma County, Ca., 1993).

Célèbre pour avoir créé deux des séries les plus longues et les plus populaires de la TV américaine : Perry Mason et l'Homme de fer (Ironside), Raymond Burr est un excellent acteur de composition. Sa carrure massive le confina d'abord dans les seconds couteaux, mais il déploya avec éclat ses possibilités en assassin solitaire et pataud dans Fenêtre sur cour (A. Hitchcock, 1954). Il faut aussi se souvenir du procureur cauteleux et lunetté de Une place au soleil (G. Stevens, 1951), ou du tragique tenancier de tripot dans l'Or et l'Amour (J. Tourneur, 1956). Quand il n'est pas accaparé par la TV, on retrouve avec plaisir sa forte silhouette cinématographique : ainsi, dans le rôle de nabab odieux et sadique du Syndicat du meurtre (J. Guillermin, 1968).

BURSTYN (Edna Rae Gillooly, dite Ellen)

actrice américaine (Detroit, Mich., 1932).

Elle suit les cours de Lee Strasberg à l'Actors Studio et se consacre d'abord au théâtre. Au cinéma, elle s'impose en 1971 dans la Dernière Séance (P. Bogdanovich) mais on la cantonne trop souvent dans des rôles de femme simple ou désaxée, The King of Marvin Gardens (B. Rafelson, 1972), l'Exorciste (W. Friedkin, 1973), Harry et Tonto (P. Mazursky, 1974), Même heure, l'année prochaine (R. Mulligan, 1978), Cri de femmes (J. Dassin, 1978), Résurrection (D. Petrie, 1979) ; en 1975, elle interprète Alice n'est plus ici (M. Scorsese), rôle qui lui vaut l'Oscar de la meilleure actrice et, en 1976, Alain Resnais lui donne, dans Providence, le rôle d'une femme sensible et blessée, où son talent et sa grande intelligence des personnages font merveille. Elle est devenue un des plus éminents professeurs de l'Actors Studio. En 1988 elle apparaît dans Hannah's War (M. Golan, 1988) mais c'est surtout en 2000, avec Requiem for a Dream (id., Darren Aronofski) et The Yards (J. Gray) que l'on peut parler d'un véritable retour : tour à tour femme vieillissante en proie aux drogues amaigrissantes et mère maladive et éplorée, Ellen Burstyn nous rappelle son grand talent.

BURTON (Richard Walter Jenkins Jr., dit Richard)

acteur britannique (Pontrhydfendigaid, pays de Galles, 1925 - Genève, Suisse, 1984).

Né dans un milieu modeste, il commence des études universitaires, puis il s'engage dans la RAF (1944-1947). Acteur-né, il est sur les planches à douze ans ; en toutes occasions, il fait ses preuves, et prend le nom de Burton en hommage à son professeur. Il débute à l'écran dans The Last Days of Dolwyn, de Emlyn Williams (1949). En 1950, il joue à Broadway, où il est très remarqué et, deux ans plus tard, sollicité par la Fox. Toute sa carrière va se partager entre cinéma et théâtre. Il passe pour un acteur shakespearien (il a fréquenté l'Old Vic). Portant beau, il est à l'aise dans les films en costume : Marcellus, jeune officier romain chargé, sans états d'âme, de la crucifixion dans la Tunique (H. Koster, 1953), le premier film en CinémaScope ; ou Alexandre le Grand, dans le film homonyme de Robert Rossen (1956) ; puis Marc Antoine dans Cléopâtre (J. L. Mankiewicz, 1963), à qui il prête l'ambition molle, l'indécision un peu romantique des losers. Il est intéressant de noter qu'en dépit d'Amère Victoire (N. Ray, 1957), et du rôle de Jimmy Porter dans les Corps sauvages (T. Richardson, 1959), Burton non seulement ne s'est pas imposé, mais est choisi pour remplacer à peu de frais l'oublié Stephen Boyd, car il est en fait considéré à cette date à Hollywood comme un has been. Cléopâtre sauve sa carrière comme elle a perdu Marc Antoine : le mariage avec Liz Taylor, leur séparation, leurs retrouvailles composent un contrepoint tapageur, exagéré, voire vulgaire, à leurs affrontements à l'écran, et Burton retrouve la notoriété. Mal à l'aise dans le Chevalier des sables (V. Minnelli, 1965), il s'est livré à d'heureux éclats, inspirés, dit-on, de ses souvenirs du poète Dylan Thomas, dans la personnification du Révérend Shannon, ivrogne et blasphémateur, sous la direction de John Huston (la Nuit de l'iguane, 1964). Il prouve sa nature de monstre sacré face à sa redoutable épouse, et avec un métier d'autant plus assuré qu'il s'agit souvent d'adaptations théâtrales, tel Becket (P. Glenville, 1964). Mais Qui a peur de Virginia Woolf ? (M. Nichols, 1966) prend de front un public américain stupéfait, peu accoutumé à voir étaler avec une telle brutalité les hargnes conjugales. La cote de Burton monte en flèche. Suivent la Mégère apprivoisée (F. Zeffirelli, 1967), Boom (J. Losey, 1968), l'Escalier (S. Donen, 1969), où Rex Harrison prend la place, en quelque sorte, de Liz Taylor... ou encore Equus (S. Lumet, 1977). Le masque alourdi, fatigué, voire usé de l'acteur ne nuit pas à cette vocation aux rôles excessifs et théâtraux, tant que la mise en scène est maîtrisée. Or, sa filmographie est on ne peut plus inégale. La chance lui valut d'interpréter O'Brien dans le 1984 de Michael Radford (1985) : une belle fin de carrière. Il a coréalisé Dr. Faustus avec Nevill Coghill en 1967.