Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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TAYLOR (Rodney, dit Rod)

acteur australien (Sydney 1929).

D'abord décorateur de théâtre, il s'oriente vers l'art dramatique après avoir vu sur scène Lawrence Olivier, alors en tournée en Australie avec la troupe de l'Old Vic. Il part pour Hollywood en 1954 où on lui offre de petits rôles dans quelques films intéressants (le Seigneur de l'aventure [The Virgin Queen], H. Koster, 1955 ; le Repas de noces [The Catered Affair], R. Brooks, 1956 ; Géant, G. Stevens, id.) qui mettent en valeur sa photogénie virile et son assurance sportive. Dans Une fille très avertie (Ch. Walters, 1959), il s'essaye à la séduction. Hitchcock lui confie alors l'unique rôle masculin important des Oiseaux (1963). Il semble donc promis à une grande carrière (le Jeune Cassidy, J. Ford et J. Cardiff, 1965 ; Hôtel Saint Gregory, R. Quine, 1967 ; Chuka le redoutable, G. Douglas, id. ; Zabriskie Point, M. Antonioni, 1970), car il est capable, en effet, de camper — malgré un certain statisme — les héros aux biceps impressionnants mais aussi certains personnages plus sophistiqués et non dénués d'humour. Hélas ! après un thriller (la Loi du talion [Darker Than Amber], Robert Clouse, 1970), il n'apparaît plus que dans des œuvres de routine en Italie, en Australie et en Irlande.

TAYLOR (Sam)

cinéaste américain (New York, N. Y., 1895 - Santa Monica, Ca., 1958).

Gagman et scénariste de plusieurs comédies de la compagnie Kalem, il accède à la célébrité en dirigeant — la plupart du temps avec son complice Fred Newmeyer — des comédies désopilantes dont le chef d'orchestre est Harold Lloyd : Monte là-dessus (Safety Last, 1923), Oh ! ces belles-mères ! (Hot Water, 1924), Vive le sport (The Freshman, 1925). Il signe ensuite My Best Girl (1927) avec Mary Pickford. Sa collaboration avec la célèbre actrice se poursuit avec Coquette (1929), la Mégère apprivoisée (The Taming of the Shrew, id., avec Douglas Fairbanks, film que le metteur en scène présente avec humour dans un générique facétieux où l'on peut lire : « De William Shakespeare avec des dialogues additionnels de Sam Taylor »), Kiki (1931). Il tente sans succès de faire passer le cap du parlant à Norma Talmadge (Du Barry, Woman of Passion, 1930), retrouve Harold Lloyd dans Patte de chat (The Cat's Paw, 1934). Il abandonne le cinéma en 1935 après The Vagabond Lady, mais revient sur les plateaux fugitivement, dix ans après, avec les Cuistots de Sa Majesté (Nothing But Trouble), où officie le couple Laurel et Hardy.

TAZIEFF (Haroun)

cinéaste français (Varsovie 1914 - Paris 1997).

Ingénieur de formation, vulcanologue de renommée mondiale, il a réalisé des documentaires dont l'intérêt scientifique est transcendé par la grande qualité du spectacle cinématographique. Outre quelques courts métrages (Grêle de feu, 1952 ; Stromboli, les eaux souterraines, 1956), il a signé trois longs métrages, dont l'Exploration du lac de lave du Niragongo (1959) et le Volcan interdit (1966). Mais c'est avec sa première œuvre, les Rendez-vous du diable (1959), couronnée par de nombreux prix, qu'il obtient un succès international. Son grand mérite est de ne pas jouer le jeu de la vulgarisation scientifique, mais plutôt de montrer tout simplement la réalité inaccessible, dans des films-reportages séduisants pour lesquels il n'hésite pas à prendre certains risques physiques. En 1975, il tourne un moyen métrage : l'Etna, sur les conséquences humaines et sociales de l'éruption du célèbre volcan.

TCHARDYNINE (Petr) [Pëtr Ivanovič Čardynin]

cinéaste soviétique (Tcherdyne 1873 - Odessa, Ukraine, 1934).

L'un des pionniers du cinéma russe. Après avoir étudié à Moscou la musique et l'art dramatique, il fait du théâtre en province puis entre dans la troupe de la Maison du peuple Védenski, à Moscou. Il débute au cinéma en 1907. Avec Vassili Gontcharov, il sera dès 1909 le metteur en scène attitré de la première grande firme russe, la Société Khanjonkov. Sa Dame de pique (1910) est le premier film national bien accueilli par la critique russe. Pour Khanjonkov, il tourne des drames historiques, des drames mondains, des farces, des films érotiques, pour la plupart adaptés d'œuvres littéraires. Son inspiration n'est pas très éloignée alors de celle de Yakov Protazanov. Jusqu'en 1917, il gardera la réputation d'être « le cinéaste professionnellement le plus compétent, le plus fécond et du plus grand rapport ». Prolifique (32 films rien que dans l'année 1915), abusant des lieux communs, « roi des artisans », il accorde tous ses soins à l'interprétation d'ensemble. Il dirige les vedettes les plus célèbres du temps : Ivan Mosjoukine, Véra Coralli, Nathalie Lissenko, Véra Kholodnaia, Vladimir Maksimov. Émigré à Riga en 1921 (après avoir tourné sept « agit-films » entre 1919 et 1920), il rentre en 1923 et travaille en Ukraine sans guère se soucier d'apporter un caractère original à ce jeune cinéma national. Sa carrière s'achève avec l'avènement du parlant.

Principaux films :

‘ Mascarade ’ (Maskarad, 1910) ; la Dame de pique (Pikovaja dama, id.) ; la Sonate à Kreutzer (Krejcerova sonata, 1911) ; ‘ Chrysanthème ’ (Hrizantemy, 1914) ; ‘ les Aventures amoureuses de Mme V. ’ (Ljubovnye pohoždenija gospoži V., 1915) ; le Déluge (Potop, id.) ; Près de la cheminée (U kamina, 1917) ; ‘ Oublie la cheminée, ses feux sont éteints ’ (Pozabud‘ pro kamin, v nëm pogasli ogni, 1918) ; Tais-toi, tristesse, tais-toi (Molči, grust ’, molči, 1919) ; Tarass Chevtchenko (Taras Ševčenko, 1926) ; ‘ l'Ukrasie ’ (Ukrasija, id.) ; Taras Triacilo (1927) ; ‘ Un caprice de Catherine II ’ (Kapriz Ekatériny II, 1928) ; ‘ les Ducats ’ (Červoncy, 1930).

TCHÉCOSLOVAQUIE.

La Tchécoslovaquie occupe une place enviable dans la préhistoire du cinéma grâce aux travaux du physiologue Jan Evangelist Purkyně (1787-1869). Après avoir perfectionné le Stroboscope de Simon von Stampfer, Purkyně crée, en 1850, avec l'opticien pragois F. Durst, le Kinésiscope, appareil à l'aide duquel il tente d'expliquer le fonctionnement du cœur humain ou le vol des papillons. Si la première démonstration du Cinématographe est effectuée en 1896 par un représentant des frères Lumière et par le photographe Ignác Schechtl — qui obtiendra une patente spéciale pour exercer le métier d'exploitant —, ce n'est que deux années plus tard que la production nationale prend son essor. Jan Křiženecký, architecte de profession et photographe amateur à ses heures, se prend de passion pour la nouvelle invention et n'a de cesse, après avoir acquis un appareil Lumière, de tourner de petites bandes d'actualités, scènes de rues, documents touristiques, voire pochades comiques — avec le concours du chansonnier humoriste Josef Šváb-Malostranský (1860-1932), qui devient ainsi la première grande vedette de l'écran. Le cinéma, attraction foraine, attire au cours des premières années du siècle de nombreux exploitants ambulants. L'un d'entre eux, l'illusionniste Dismas Šlambor, que l'on connaît sous le pseudonyme de Victor Ponrepo, ouvre en 1907 la première salle de cinéma « fixe » à Prague. L'organisation de la production ne commence véritablement qu'en 1910 avec la fondation des sociétés Kinofa — à la tête de laquelle se trouve Antonín Pech qui se spécialise dans les documentaires et les films de vulgarisation scientifique — et Illusion Film, dirigée par A. Jalovec et F. Tichý. En 1912, Max Urban et sa femme, la célèbre actrice de théâtre Anna Sedlačkova, ouvrent la compagnie Asum et produisent une œuvre de prestige : l'adaptation de l'opéra de Smetana ‘ la Fiancée vendue ’ (Prodana nevěsta, 1913). Malgré les difficultés du temps de guerre et de l'après-guerre, malgré les bouleversements apportés par l'effondrement de l'Empire austro-hongrois, de nombreuses sociétés de production voient le jour : la Lucernafilm (de Václav Havel), la Wetebfilm (de Václav Binovec), la Pragafilm (d'Antonín Fencl), l'Excelsiorfilm, la Pojafilm, la Favoritfilm. Dès 1921, on commence à construire à Prague-Vinohrády les premiers studios de cinéma. De cette période il convient de retenir quelques films comme ‘ le Cauchemar ’ (Nočni děs, Jan A. Palouš, 1914), ‘ Ahasver ’ (id., Jaroslav Kvapil, 1915), ‘ Un cœur d'or ’ (Zlaté Srděčko, A. Fencl, 1916), ‘ les Adamites de Prague ’ (Pražšti Adamité, id., 1917), ‘ le Sorcier ’ (Čaroděj, id., 1918), ‘ Une nuit à Karlštejn ’ (Noc na Karlštejně, Olaf Larus-Racek, 1919), ‘ le Bâtisseur de cathédrale ’ (Stavitel chrámu, Karel Degl et Antonín Novotný, id.). La production, qui a connu un important développement entre 1918 et 1922 — le premier film slovaque : ‘ Janošik ’ de Jaroslav Siakel et František Horlìvý, est tourné en 1921 —, éprouve de sérieuses difficultés vers 1924. Huit films seulement sont mis en chantier. On vote précipitamment une loi de contingentement pour lutter contre l'invasion des films étrangers, mais les effets du protectionnisme sont des plus médiocres et il faut attendre la fin de l'époque muette pour voir la production retrouver un semblant d'équilibre (35 films en 1929).