Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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MOUVEMENTS D'APPAREIL. (suite)

Le plan fixe.

Il n'est pas de mouvement plus simple que... l'absence de mouvement, qui donne lieu au plan fixe (sauf en cas d'effet de zoom pendant la prise de vues).

Pour les plans fixes, la caméra est presque toujours installée sur un pied. Dans les circonstances particulières où il n'est pas possible d'installer un pied (caméra au ras du sol, en haut d'une échelle, etc.), on a recours à des socles spéciaux (appelés « bases »), à des pinces, à des montages en tube, etc.

En extérieurs et en décors naturels, là où il faut un matériel léger et facile à transporter, on emploie les « pieds de campagne », pieds télescopiques à trois branches, en bois ou en métal, dérivés de ceux des photographes d'antan.

En studio, on a beaucoup employé le « pied boule », à colonne centrale télescopique montée sur un socle à roues qui permet un déplacement aisé. (On parle en France de « pied boule » par allusion au modèle de la firme Debrie, où les roues sont protégées par des capotages en forme de grosses demi-boules. D'autres pieds de studio ne comportent pas ce capotage caractéristique.) Le pied boule et les pieds de studio similaires tendent en fait à appartenir à l'histoire, tant il est devenu banal qu'un plan prévu comme fixe se transforme, au moment du tournage, en un plan comportant une part de panoramique ou de travelling, par exemple pour recadrer la scène ou pour suivre un acteur. Compte tenu de cette éventualité, la caméra est aujourd'hui très généralement installée, en studio, sur un chariot de travelling du type Dolly ou Elemack (voir plus loin), le plan fixe étant obtenu tout simplement en immobilisant le chariot.

Pour la même raison, les pieds sont toujours équipés avec une tête permettant les panoramiques, le plan fixe étant obtenu par immobilisation de la tête.

Le panoramique.

Le panoramique (familièrement « pano ») est simplement une rotation de la caméra : panoramique horizontal, vertical ou oblique. (On appelle panoramique aussi bien le mouvement de la caméra que le résultat visuel de ce mouvement. La remarque vaut, plus loin, pour travelling. En anglais, « pan » désigne le panoramique horizontal, « tilt » le panoramique vertical.)

La caméra doit être ici montée sur une tête qui permette ces mouvements. Une simple rotule ne convient qu'aux caméras d'amateur. En cinéma professionnel, la tête comprend deux axes de rotation perpendiculaires : le panoramique horizontal s'obtient par rotation autour de l'axe vertical, le panoramique vertical par rotation autour de l'axe horizontal, le panoramique oblique par combinaison des deux mouvements. Afin de pouvoir être bien mise à niveau, la tête est liée au support par un mécanisme réglable : « griffe » (fixation en trois points) ou, pour les caméras légères, « bol » hémisphérique.

La tête classique du cinéma professionnel est la tête à manivelles (bien antérieure au parlant) où deux manivelles, placées à l'arrière et à gauche du socle de la caméra, commandent séparément les rotations autour des deux axes décrits plus haut. Cette tête permet des panoramiques extrêmement « coulés », mais elle demande un cadreur expérimenté, particulièrement pour l'exécution des panoramiques obliques.

Avec les « têtes à manche », l'opérateur dirige l'orientation de la caméra grâce à un manche, plus ou moins long, situé à l'arrière de la tête. Depuis une vingtaine d'années, ces têtes ont été considérablement perfectionnées, et l'on peut aujourd'hui réaliser avec elles des panoramiques comparables en qualité à ceux obtenus avec les têtes à manivelles. Dans la réalisation traditionnelle, il y a simplement friction (réglable en fonction de la caméra et de la vitesse prévue du panoramique) entre les surfaces mobiles et les surfaces fixes de la tête. Pour mieux contrôler les mouvements, et notamment pour éviter les à-coups au début ou en fin de mouvement, on a d'abord fait appel aux têtes gyroscopiques, où la rotation de volants assez lourds assure un effet régulateur. Bruyantes, délicates, difficiles à manier, ces têtes ont été supplantées par les têtes fluides, où un dispositif à fluide assure l'amortissement des mouvements.

Outre la qualité du matériel et l'adresse de l'opérateur, la réussite d'un panoramique repose sur la prise en compte des données techniques du problème.

Une de ces données est la distance focale de l'objectif. Avec les longues focales, le champ filmé est étroit, ce qui équivaut à « agrandir » une partie de la scène. Si le mouvement n'est pas extrêmement régulier, ses irrégularités sont amplifiées par cet agrandissement : le résultat peut devenir rapidement insupportable. Têtes à manivelles et têtes fluides sont ici d'un grand secours.

Un autre phénomène, parfois qualifié d'« effet stroboscopique », est lié à une vitesse trop élevée de défilement de l'image sur l'écran. Il y a alors sur l'écran — entre deux images successives — un déplacement des éléments de l'image trop important pour que notre sens de la vision puisse « raccorder » ces images entre elles : nous ne voyons plus qu'une succession saccadée très rapide, et pénible à regarder, d'images fixes. Cet effet, dont le risque croît avec les longues focales (puisque celles-ci amplifient les mouvements apparents), est évité grâce à la règle empirique des « 7 secondes », valable quelle que soit la focale : il n'y a pas de risque si chaque élément de l'image met au moins 7 secondes pour traverser le cadre. (Le phénomène de « saccades » disparaît également si le panoramique est délibérément très rapide, l'image devenant carrément floue par effet de « bougé » : on obtient sur l'écran un filé, qui donne une impression de panoramique vertigineux et qui fut beaucoup utilisé comme procédé de liaison, notamment dans les actualités.)

Dans les plans truqués, comportant par exemple des maquettes raccordant visuellement avec les éléments réels de la scène, il faut encore veiller à faire coïncider l'axe du panoramique avec le « point nodal » de l'objectif, c'est-à-dire le point où il faudrait placer l'œil pour voir la scène de la même façon que la voit l'objectif : faute de cette coïncidence (que l'on réalise grâce à une glissière d'adaptation qui permet de reculer la caméra), les maquettes « glissent », en cours de panoramique, par rapport au reste de l'image.