Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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PAGLIERO (Marcello ou Marcel) (suite)

Il se fixe en France en 1947. Il y est à l'occasion acteur, dans Les jeux sont faits (J. Delannoy, 1947), Dédée d'Anvers (Y. Allégret, 1948), le Bel Âge (P. Kast, 1960). Un homme marche dans la ville, qu'il dirige en 1949 dans les ruines du Havre, est un des très rares films de l'après-guerre à éviter les clichés hérités du réalisme noir. Il y circule un air vif qui doit beaucoup au néoréalisme transalpin. Le film n'en est pas moins attaqué par la presse communiste qui lui reproche une vision désespérante de la classe ouvrière, et sa sortie est un échec. Pagliero continue une carrière inégale partagée entre la France (les Amants de Bras-Mort, 1951 ; la Rose rouge, id. ; Destinées, un sketch, 1954 ; Chéri-Bibi, 1955) et l'Italie (Vêtir ceux qui sont nus [Vestire gli ignudi], 1954 ; Vierge moderne [Vergine moderna], 1955). À l'occasion, il s'expatrie en Australie (l'Odyssée du capitaine Steve, 1956) ou en URSS (Vingt Mille Lieues sur la Terre, doc. 1960).

PAGNOL (Marcel)

écrivain et cinéaste français (Aubagne 1895 - Paris 1974).

Professeur d'anglais dans la région de Marseille, il passe ses loisirs à écrire des pièces de théâtre, qui sont jouées par des troupes locales. Nommé à Paris en 1922, il constate avec surprise que ses œuvres sont très prisées dans la capitale. Aussi abandonne-t-il rapidement l'enseignement au profit de l'écriture. Plein de curiosité vis-à-vis du cinéma parlant, il s'intéresse dès 1930 au monde du septième art. Il déclare alors : « C'est un moyen d'expression dramatique beaucoup plus commode, beaucoup plus riche que le théâtre. »

En fait, son attitude envers le cinéma est très claire : d'une part ses pièces pourront, si elles sont adaptées à l'écran, recevoir une plus large audience, et, d'autre part, le film sonore devient véritablement du « théâtre en conserve ». Le rôle auquel il confine le cinéma ne l'empêche pas d'y porter un grand intérêt puisqu'il crée le Cahier du film, dans lequel il « injurie les gens du muet ». Et malgré ses options théoriques, il saura rompre avec les conventions théâtrales. Ses pièces filmées gardent toute leur fraîcheur grâce au ton régionaliste donné par des interprètes de grand talent, venant souvent du café-concert marseillais, tels Raimu, Fernandel ou Charpin, qu'il a eu le mérite de découvrir. Dès la sortie de ses premières œuvres adaptées à l'écran, dont il a écrit le scénario et les dialogues, il obtient un gros succès public et critique. Il ne met pas personnellement en scène Marius (A. Korda, 1931), Fanny (M. Allégret, 1932) ni Topaze (L. Gasnier, id.), se contentant simplement de superviser le tournage. Cependant, il a tendance à minimiser considérablement le rôle du réalisateur, se considérant (et étant souvent considéré) comme le seul auteur. Avec le Gendre de Monsieur Poirier (1933, dont le négatif a été brûlé pendant la guerre), il devient réalisateur à part entière. Il a sans doute donné, à l'écran, ses lettres de noblesse au régionalisme — personne n'aura décrit avec tant de vérité et de pittoresque les tics, les coutumes, la spontanéité de langage de certains de ses compatriotes provençaux, mais, entouré d'acteurs « complices » (Fernandel, Raimu, Charpin, Delmont, Robert Vattier, Rellys, Blavette, Sardou), il a aussi apporté au cinéma français un ton nouveau, qui l'a fait considérer par De Sica et Rossellini comme un précurseur du néoréalisme italien. Producteur avisé de pratiquement tous ses films, il a tourné notamment : Jofroi (MM, 1934), Angèle (id.), l'Article 330 (id.), Merlusse (1935), Cigalon (id.), César (1936), Regain (1937, d'après Jean Giono), le Schpountz (1938), la Femme du boulanger (id.), la Fille du puisatier (1940). Privé de ses acteurs fétiches, il ne tournera plus ensuite que des films moins intéressants : la Belle Meunière (1949, comédie musicale avec Tino Rossi), Manon des sources (1953), les Lettres de mon moulin (1954). Il a également réalisé deux autres versions de Topaze, en 1936 et en 1951. Sa seconde femme, Jacqueline Bouvier, a joué sous le nom de Jacqueline Pagnol dans plusieurs de ses films. Il entre à l'Académie française en 1946. ▲

PAINLEVÉ (Jean)

cinéaste français (Paris 1902 - id. 1989).

Ce scientifique, fils du mathématicien et homme politique Paul Painlevé, réalise à partir de 1925 (Évolution de l'œuf) de nombreux courts métrages documentaires. Dans le genre, il innove par des œuvres qui, loin de sacrifier le côté artistique du cinéma à l'aspect purement scientifique, rigide et parfois ennuyeux, présentent de réelles qualités esthétiques, poétiques et rythmiques. Ami des surréalistes, fondateur de l'Institut du cinéma scientifique en 1930, directeur général du Cinéma, organisme provisoire créé à la Libération (1944-45), fondateur de la Commission supérieure technique (→ cst), président de la Fédération française des ciné-clubs (1946-1956), il a essentiellement filmé des animaux « de la naissance à la mort, du point de vue scientifique et photogénique » : la Pieuvre (1928), les Oursins (id.), la Daphnie (id.), l'Œuf d'épinoche (id.), les Crabes (1930), les Crevettes (id.), le Bernard-l'ermite (id.), l'Hippocampe (1934), qui enchanta les surréalistes, le Vampire (1945), Assassins d'eau douce (1947), les Oursins (1958), Danseuses de la mer (1960), Comment naissent les méduses (id.), les Amours de la pieuvre (1967). Il a également tourné : Rupture de fibres (1931), Voyage dans le ciel (1937), Notre planète la Terre (1947), les Alpes (1958). Il a réalisé un film d'animation : Barbe-Bleue (1936) et écrit notamment le fameux commentaire du film de Franju le Sang des bêtes (1949).

PAINTER (Baburao Krishnarao Mestri, dit Baburao)

cinéaste et producteur indien (Kolhapur, Maharashtra, 1890 - 1954).

À l'origine peintre, d'où son pseudonyme, il s'enthousiasme pour les films de Phalke, bricole une caméra et fonde la Maharashtra Film Company, qu'il gère de 1917 à 1932 à Kolhapur. Il réalise une trentaine de films jusqu'en 1952 (Vishwamitra, 1952), surtout des œuvres mythologiques et historiques (Sairandhri, 1919 ; Sinhagad, 1923 ; Sati Padmini, 1924 ; Usha, 1935 ; Pratibha, 1937) qu'il situe dans ce contexte régional, mais aussi des films sociaux frappants de réalisme (Savkari Pash, 1925). Il assure la formation de V. Shantaram, de Damle et Fathelal (qui s'illustreront dans la Prabhat Company), et il est en quelque sorte leur précurseur. Langue marathi hindi.