Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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DOUGLAS (Gordon)

cinéaste américain (New York, N. Y., 1909 - Los Angeles, Ca., 1993).

Venu à Hollywood dans les années 20, il est d'abord acteur, assistant et gagman pour le producteur Hal Roach. Longtemps spécialisé ou confiné dans les comédies burlesques de la série Our Gang (30 titres entre 1936 et 1939), il dirige enfin un long métrage en 1939 : Zenobia, resté connu parce qu'il réunissait Oliver Hardy et Harry Langdon. Après un autre long métrage comique réunissant cette fois Hardy à son partenaire habituel Laurel (Laurel et Hardy en croisière [Saps at Sea], 1940), Douglas passe de studio en studio, appliquant un métier sans faille aux sujets les plus variés. Bien que cinéaste très mineur, c'est en vieillissant qu'il a, comme les plus grands, montré davantage de personnalité par-delà la réussite technique dans le thriller (le Fauve en liberté [Kiss To-Morrow Goodbye], 1950), l'aventure (la Maîtresse de fer [The Iron Mistress], 1952), la science-fiction (Des monstres attaquent la ville [Them !], 1954) et surtout sans doute le western (Sur la piste des Comanches [Fort Dobbs], 1958 ; le Trésor des sept collines [Gold of the Seven Saints], 1961 ; Rio Conchos [id.], 1964 ; Chuka le Redoutable [Chuka], 1967). Avant de prendre un repos bien gagné (plus de 40 longs métrages en 35 ans), Douglas a encore dirigé, entre autres films, deux « véhicules » plus qu'honorables pour Carroll Baker (Sylvia [id.], 1965 ; Harlow, la blonde platine [Harlow], id.) et trois pour Frank Sinatra mûrissant (Tony Rome est dangereux [Tony Rome], 1967 ; la Femme en ciment [Lady in Cement], 1968 ; et, surtout, le Détective [The Detective], 1968), où son sens visuel entrait au service d'une psychologie assez subtile et d'une intrigue fascinante), puis un film pour Sidney Poitier (Appelez-moi Mr. Tibbs [They call Me Mr. Tibbs], 1970).

DOUGLAS (Issur Danielovitch, dit Kirk)

acteur, cinéaste et producteur américain (Amsterdam, N. Y., 1916).

Né dans une famille d'immigrants d'origine russe (il changera d'abord son nom en celui de Isidore Demsky), il paie ses études à St. Lawrence University puis à l'American Academy of Dramatic Art en utilisant ses talents de lutteur. Il débute à Broadway en 1941 et sert dans la marine en 1942-43 avant de revenir à Broadway pour y reprendre deux rôles créés par Richard Widmark. Dès son premier film, en 1946, on peut discerner les éléments qui caractériseront les premières années de sa carrière. Sous une façade assurée et brillante, le politicien alcoolique qu'il interprète dans l'Emprise du crime dissimule en effet une fragilité névrotique et une tendance masochiste à l'autodestruction. Les mêmes traits éclatent dans le film qui propulse l'acteur vers la célébrité : Champion (1949), dans lequel il incarne un boxeur qu'une volonté frénétique de s'accomplir entraîne vers la gloire et la mort. Le dénominateur commun de tous ses films des années 50, c'est l'individualisme farouche de ses personnages, l'instinct de mort qui les habite, l'intensité avec laquelle ils se précipitent jusqu'au bout de leurs choix. Il y a dans ses personnages les plus extérieurement forts — le reporter sans scrupules du Gouffre aux chimères (1951), le producteur cynique des Ensorcelés (1952), les cow-boys de la Captive aux yeux clairs (id.) et l'Homme qui n'a pas d'étoile (1955), l'avocat militaire des Sentiers de la gloire (1957) — une vulnérabilité extrême qui éclate dans leurs accès de violence rageuse et se développe pleinement dans le portrait halluciné de Vincent Van Gogh (la Vie passionnée de Vincent Van Gogh, 1956) et la complexité fiévreuse d'un Doc Holliday poitrinaire et raffiné (Règlements de comptes à O. K. Corral, 1957).

Il interprète en 1960 deux de ses meilleurs films : Liaisons secrètes, où il incarne un architecte idéaliste et englué dans le quotidien, et surtout Spartacus, qui concilie avec une exemplaire rigueur les exigences du spectacle et celles de la morale. Douglas produit lui-même le film et on peut y voir un bon exemple de ses constantes qualités comme producteur : goût pour des sujets difficiles et politiquement marqués à gauche, courage face aux pressions (il engage comme scénariste Dalton Trumbo, qui figurait alors sur la fameuse liste noire), intransigeance face à ceux qui lui résistent (il remplace Anthony Mann par Stanley Kubrick). Après un beau western moderne, Seuls sont les indomptés (1962), et Quinze Jours ailleurs (id.), qui poursuit à Cinecittà la réflexion sur Hollywood commencée dans les Ensorcelés, Douglas se laisse enfermer dans des rôles sans guère d'épaisseur sur lesquels tranchent le publiciste rongé par le doute de l'Arrangement (1969) et le bagnard sarcastique du Reptile (1970).

Kirk Douglas est passé à la réalisation en 1973 et, après un premier essai peu convaincant (Scalawag), a livré avec la Brigade du Texas (1975) le western qu'on pouvait attendre de lui : efficace sans esbroufe, caustiquement critique de l'exploitation de l'ordre légal par la politique.

Films :

l'Emprise du crime (L. Milestone, 1946) ; l'Homme aux abois (B. Haskin, 1947) ; Le deuil sied à Électre (D. Nichols, id.) ; la Griffe du passé (J. Tourneur, id.) ; The Walls of Jericho (J. M. Stahl, 1948) ; Ma chère secrétaire (My Dear Secretary, Charles Martin, id.) ; Chaînes conjugales (J. L. Mankiewicz, 1949) ; le Champion (M. Robson, id.) ; la Femme aux chimères (M. Curtiz, 1950) ; la Ménagerie de verre (The Glass Menagerie, I. Rapper, id.) ; le Désert de la peur (R. Walsh, 1951) ; le Gouffre aux chimères (B. Wilder, id.) ; Histoire de détective (W. Wyler, id.) ; la Vallée des géants (The Big Trees, Felix Feist, 1952) ; la Captive aux yeux clairs (H. Hawks, id.) ; les Ensorcelés (V. Minnelli, id.) ; Histoire de trois amours (The Story of Three Loves, épis. Trapèzes, G. Reinhardt, 1953) ; le Jongleur (E. Dmytryk, id.) ; Un acte d'amour (A. Litvak, FR, 1954) ; Ulysse (M. Camerini, IT, id.) ; 20 000 Lieues sous les mers (R. Fleischer, id.) ; le Cercle infernal (The Racers, H. Hathaway, 1955) ; l'Homme qui n'a pas d'étoile (K. Vidor, id.) ; la Rivière de nos amours (A. De Toth, id.) ; la Vie passionnée de Vincent Van Gogh (Minnelli, 1956) ; Règlements de comptes à O. K. Corral (J. Sturges, 1957) ; Affaire ultrasecrète (Top Secret Affair, H. C. Potter, id.) ; les Sentiers de la gloire (S. Kubrick, id.) ; les Vikings (R. Fleischer, 1958) ; le Dernier Train de Gun Hill (Sturges, 1959) ; Au fil de l'épée (G. Hamilton, GB, id.) ; Liaisons secrètes (R. Quine, 1960) ; Spartacus (Kubrick, id.) ; Ville sans pitié (Town Without Pity, Reinhardt, 1961) ; El Perdido (R. Aldrich, id.) ; Seuls sont les indomptés (D. Miller, 1962) ; Quinze Jours ailleurs (Minnelli, id.) ; Un homme doit mourir (The Hook, G. Seaton, 1963) ; le Dernier de la liste (J. Huston, id.) ; Trois Filles à marier (For Love or Money, M. Gordon, id.) ; Sept Jours en mai (J. Frankenheimer, 1964) ; Première Victoire (O. Preminger, 1965) ; les Héros de Telemark (A. Mann, GB, id.) ; l'Ombre d'un géant (M. Shavelson, 1966) ; Paris brûle-t-il ? (R. Clément, FR, id.) ; la Route de l'Ouest (A. V. McLaglen, 1967) ; la Caravane de feu (B. Kennedy, id.) ; Un détective à la dynamite (A Lovely Way to Die, D. Lowell Rich, 1968) ; les Frères siciliens (M. Ritt, id.) ; l'Arrangement (E. Kazan, 1969) ; le Reptile (J. L. Mankiewicz, 1970) ; Dialogue de feu (A Gunfight, Lamont Johnson, 1971) ; le Phare du bout du monde (The Light at the Edge of the World, Kevin Billington, ESP, id.) ; les Doigts croisés (Catch Me a Spy, Dick Clement, id.) ; Un homme à respecter (Un uomo da rispettare, Michele Lupo, 1973) ; Scalawag (K. Douglas, , id.) ; Cat and Mouse (D. Petrie, 1974) ; Une fois ne suffit pas (G. Green, 1975) ; la Brigade du Texas (Posse, K. Douglas, , id.) ; Victoire à Entebbé (Victory at Entebbe, Marvin Chomsky, TV, 1977) ; Holocauste 2000 (Holocaust 2000, Alberto De Martino, id.) ; Furie (B. De Palma, 1978) ; Cactus Jack (The Villain, Hal Needham, 1979) ; Saturn 3 (id., S. Donen, id.) ; Nimitz, retour vers l'enfer (The Final Countdown, Don Taylor, 1980) ; Home Movies (De Palma, id.) ; l'Homme de la rivière d'argent (The Man From Snowy River, George Miller, 1981) ; Un flic aux trousses (Eddie Macon's Run, Jeff Kanew, 1983) ; Coup double (Tough Guys, id., 1986) ; Oscar (J. Landis, 1991) ; Welcome to Veraz (1992) Greedy (Jonathan Lynn, 1994).