Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
A

ASHCROFT (Dame Peggy)

actrice britannique (Croydon 1907 - Londres 1991).

Grande dame de la scène britannique dès ses débuts en 1927, Dame Peggy a été avare de sa personne au cinéma. Au vu de l'excellence de ses rares interprétations, il est permis de le regretter. Après avoir campé une mémorable fermière taciturne et secrètement tourmentée par la chair dans un des épisodes les plus réjouissants des Trente-neuf marches (A. Hitchcock, 1935), elle ne tournera que trois films avant de se faire plus présente à partir de 1968. Cette année-là, elle fut pour Joseph Losey une des tantes excentriques et troubles de Mia Farrow dans Cérémonie secrète. Depuis, on retiendra des apparitions marquées par son art précis, sa diction parfaite et son élégante petite silhouette dans Un dimanche comme les autres (J. Schlesinger, 1971) ou Hullabaloo Liver Georgie and Bonnie's Picture (J. Ivory, 1979). A 77 ans, elle obtint l'Oscar du second rôle pour sa superbe création de vieille dame fanée, aventureuse et intérieurement bouleversée, qui est en fait le personnage central de la Route des Indes (D. Lean, 1984). On lui demanda à la suite de ce succès quelques créations discrètes qu'elle exécuta avec un métier consommé.

ASHER (William)

cinéaste américain (1919).

Production à petit budget, Leather Gloves (1948), son premier film, est réalisé en collaboration avec Richard Quine. Il passe ensuite plusieurs années à la TV puis revient au cinéma en 1957. La Revanche du Sicilien (Johnny Cool, 1963) est une fort bonne « série noire » dirigée avec un rythme et une efficacité nullement indignes de Don Siegel. Mais la réussite de Johnny Cool tient plus, peut-être, à l'excellent roman de John McPartland, à l'adaptation de Joseph Landon, à la photo en noir et blanc de Sam Leavitt et à l'interprétation de Henry Silva qu'au talent du réalisateur. La même année, son Beach Party, produit par American International, ne témoigne pas même de ces qualités. Après avoir dirigé quelques beach films pour la jeunesse, il s'est à nouveau essentiellement consacré à la télévision.

ASIE CENTRALE (Cinémas d')

Le cinéma se heurte pendant de nombreuses années dans les régions orientales de l'Empire russe à des handicaps très importants, qui vont freiner son essor, à un sous-développement économique et social, à la préeminence de la religion musulmane longtemps hostile à ce mode de représentation humaine, à l'importance du mode de vie rural et du nomadisme. Le nouveau pouvoir soviétique va s'efforcer peu à peu de faire tomber ces obstacles et se servira du cinéma avant tout comme un moyen de propagande idéologique. Aussi dans les premiers temps les films tournés en Asie Centrale sont le fait de réalisateurs russes qui ont pour mission première de former les jeunes cadres intellectuels autochtones et d'imposer la doctrine du parti communiste, au mépris parfois des traditions culturelles fort éloignées des modèles occidentaux. La russification ne s'impose pas toujours d'elle-même. Les fronts de résistance sont nombreux. On notera que les rôles féminins durant les années 20 sont tenus par des actrices non nationales car l'interdit traditionnel qui oblige les femmes à ne pas s'exhiber en public est respecté (l'actrice ouzbek Nourkhon qui bravera cet interdit sera assassinée en 1929 par des activistes islamistes). Jusqu'à l'arrivée du parlant, tandis que s'organisent peu à peu les structures de production (le trust Ouzbekgoskino est créé en 1925, la Kinofabrika d'Achkhabad [Turkmenistan] en 1926), le premier cinéma s'ouvre à Douchanbe (Tadjikistan) en 1927, une succursale de Vostokkino sort à Alma-Ata (Kazakhstan) un journal filmé (les Dernières nouvelles en 1929). La plupart des œuvres réalisées sont des documentaires. En 1931 le premier film de fiction tourné par un réalisateur ouzbek apparaît (la Montée [Pod'em] de Nabi Ganiev). Six ans plus tard seulement sort le premier film parlant ouzbek (le Serment [Kljatva] d'Aleksandr Oussoltsev-Garf). En 1938 Amangueldy de Moïshe Levine tourné par Lenfilm est considéré comme le premier film de fiction kazakh. En 1939 Nikolaï Dostal (le Jardin) [Sad] et Kamil Iarmatov (Les amis se retrouvent) [Druzja vstrečajutsja vnov'] donnent le coup d'envoi du cinéma de fiction tadjik.

En 1941 sont construits les studios de cinéma d'Alma- Ata qui fusionneront en novembre de la même année avec Mosfilm et Lenfilm. La guerre oblige les studios russes à se délocaliser à Alma-Ata (80 % de la production soviétique y verra le jour entre 1941 et 1944). D'autres studios sont évacués vers Tachkent en Ouzbekistan et Douchanbe au Tadjikistan, ceux de Kiev iront à Achkhabad au Turkemnistan (c'est dans cette ville que Mark Donskoï réalisera l'Arc-en-ciel). En 1948 un tremblement de terre détruit les studios d'Ahkhabad (reconstruits en 1953). Tous les grands noms du cinéma soviétique se sont croisés en Asie Centrale pendant la période de guerre (Barnet, Donskoï, Eisenstein, Poudovkine, Koulechov, Vertov) et cet afflux d'artistes va permettre aux cinéastes locaux d'enrichir leur expérience. Malheureusement l'essor des Républiques d'Asie Centrale est freiné par le malthusianisme stalinien. Entre 1945 et 1955 seulement 19 longs métrages sont entrepris et la plupart dirigés par des metteurs en scène russes. Seuls Ganiev et Larmatov parviendront à s'exprimer.

Ce n'est qu'après la mort de Staline et seulement à l'orée des années 60 que le cinéma se développe. Choukhrat Abbassov (Tu n'es pas orphelin [Ty ne sirota] 1962 Tachkent ville du pain [Taškent, gorod hlebnyj] 1968), Ali Khamraev (les Cigognes blanches, blanches [Belye, belye aisty], 1966) en Ouzbekistan, Boulat Mansourov (la Compétition [Sostjazanie], 1963) au Turkmenistan donnent le ton.

Ces metteurs en scène sont bientôt rejoints par Bolot Chamchiev et Tolomouch Okeev en Kirghizie, Elier Ichmoukhamedov en Ouzbekistan. En Occident le film d'Andreï Mikhalkov-Kontchalovski le Premier Maître (1965) attire l'attention des critiques et du public sur des régions alors pratiquement inconnues des cinéphiles (ici la Kirghizie) et sur un écrivain (Tchinguiz Aïtmatov) dont l'œuvre inspirera nombre de metteurs en scène.